jeudi 4 juillet 2024 06:16

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Des migrants africains rescapés rêvent encore de l'Europe (REPORTAGE)

Gambiens, Sénégalais ou Maliens, ils ont sacrifié leurs économies pour rejoindre l'Europe depuis la Libye. Mais leur espoir a fait naufrage avec leurs navires au large de la Tunisie, même si plus chanceux que d'autres, ils ont pu être sauvés.

Depuis mars, la météo redevenant plus clémente en Méditerranée, ils sont des milliers à tenter de rejoindre l'Italie par la mer, embarquant sur des zodiacs vétustes de passeurs profitant du chaos en Libye pour conduire leur trafic.

Bien souvent, le moteur tombe en panne ou le rafiot prend l'eau. Et chaque année des milliers d'entre eux périssent noyés. D'autres, sont secourus à temps, comme Souleïman, un Malien de 38 ans, qui fait partie des centaines de migrants repêchés ces dernières semaines au large de Zarzis, un port du sud-est de la Tunisie.

"On m'avait dit qu'il était facile de gagner l'Europe à partir de la Libye. J'ai mis deux mois pour arriver à Zouara (port libyen à 60 km de la frontière avec la Tunisie) et j'ai payé tout ce que j'avais: 4.000 dinars libyens" soit 2.770 euros, raconte-t-il.

"Au bout de quelques heures, le zodiac a commencé à prendre de l'eau tellement on était nombreux. Celui qui m'a inscrit sur la liste des partants ne m'avait pas parlé du nombre (de passagers) ni de l'état du bateau", poursuit-il.

"Heureusement que des marins tunisiens nous ont sauvés et ramenés ici", conclut Souleïman, désormais pris en charge dans un minuscule local du Croissant rouge à Zarzis.

 'Souffert le martyre"

Cissé, un Ivoirien sauvé des flots il y a cinq mois, raconte des déboires similaires.

"(J'ai) souffert le martyr (...) on était nombreux, 84 en tout, des Nigériens surtout. Ils se bousculaient trop. Le zodiac a pris l'eau et des marins ont avisé les agents de la garde maritime. Soixante-seize migrants ont été secourus, deux autres sont tombés à la mer et les six restants ont redémarré à grande vitesse avec le zodiac et sont arrivés sains et saufs à (l'île italienne de) Lampedusa", se souvient-il.
Pour ne pas avoir à payer la traversée, il raconte avoir ramené des clients aux trafiquants, et dit aussi connaître certaines combines utilisées par les passeurs libyens pour maximiser les profits.

"Ils prétendent que le moteur est en panne quand ils arrivent au large de Ben Guerdane ou de Zarzis pour être repêchés par la marine tunisienne", explique Cissé.

"Puis ils s'évadent du centre (d'hébergement), regagnent de nouveau clandestinement la Libye pour effectuer un autre voyage. Ainsi, ils font fortune", dit-il.

Pas de quoi décourager les plus déterminés.

"Quatre des immigrés sauvés le 19 mars se sont évadés de Zarzis, sont retournés à Zouara, ils ont récidivé mais leur aventure a (échoué) une autre fois le 13 avril" lorsque 178 migrants ont été sauvés par des navires tunisiens, assure Cissé.

 'A la prochaine!'

Car malgré les mésaventures, les arnaques et les risques, beaucoup de ces "harraga" estiment n'avoir rien à perdre, quitte à connaître le même sort que les quelque 400 personnes portées disparues depuis un naufrage dimanche.

Certains rescapés, éparpillés dans des centres d'accueil dans le sud de la Tunisie, travaillent, gagnent un peu d'argent avec comme objectif de partir.

"Des entrepreneurs en bâtiment viennent les chercher à 05H00 du matin. Ils font tout et n'importe quoi: chantiers de construction, jardinage, peinture, pêche", explique Mohamed Trabelsi du Croissant rouge.

Abdoulay, des écouteurs enfoncés dans les oreilles, jure ainsi qu'il ne restera pas en Tunisie et ne rentrera pas en Gambie, même s'il a déjà perdu une fois toutes ses économies dans une traversée ratée.
"Je suis chômeur et je n'ai aucune spécialité. Mon objectif restera toujours le même: vivre en Europe", dit ce jeune Gambien, "à la prochaine donc!" lance-t-il goguenard.

16 avr. 2015

Source : AFP

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