Plus de mille migrants venus de Libye ont encore débarqué jeudi en Italie où des municipalités comme Reggio de Calabre ont du mal à gérer l'afflux de naufragés et où les autorités réclament plus d'aide et de solidarité de l'Union européenne.
Jeudi, près de 600 personnes sont arrivées à Trapani en Sicile, après avoir été récupérées en mer par les garde-côtes et la marine italienne. Près de neuf cents autres étaient attendues dans la journée dans deux autres ports siciliens, selon les autorités italiennes.
Dimanche, quelque 400 de ces migrants n'auront pas eu cette chance. Ils auraient tous péri dans le naufrage de leur embarcation de fortune, selon des récits de survivants.
Ces derniers, environ 150 personnes, ont commencé à quitter Reggio de Calabre où ils avaient été transportés, pour des centres d'accueil dans le nord et le centre.
Le ministre italien des Affaires étrangères Paolo Gentiloni a exprimé sa colère envers l'Union européenne dans le Corriere della Sera: "Le problème est européen mais le remède est italien, ça ne va pas. La surveillance et les secours en mer pèsent à 90% sur nos épaules".
Giovanni Muraca, responsable municipal de Reggio, reconnaît que cette ville en pleine crise économique "a du mal" à relever le défi des migrants: "Nous avons déjà accueilli tant de migrants, mais jamais avec une telle proportion de maladies contagieuses. Les ressources de la commune sont limitées, nous devons faire appel aux bénévoles", explique-t-il à l'AFP.
Les réfugiés "ont dormi par terre sous une tente. Ils sont arrivés morts de fatigue, ont peur, sont traumatisés", raconte Giuseppe Princi de l'association "Nuova Solidarieta", dont le siège a été réquisitionné pour accueillir les migrants malades à Salice, en périphérie de Reggio Calabria.
"Cette situation n'est plus tenable. D'autres vont arriver mais nous ne sommes absolument pas prêts", assure-t-il.
A l'écart, des migrants embarquent dans des autocars. Somaliens et Erythréens, ils sont très jeunes. Silencieux et visiblement fatigués, ils n'ont pas pris de douche ni changé de vêtement depuis leur arrivée. Plusieurs ont des plaies aux jambes.
Ils sont encadrés de volontaires munis de masques et, pour certains, de combinaisons isolantes, selon les constatations de l'AFP.
Chaque jour, des centaines de migrants, qui embarquent depuis la Libye à la faveur du chaos régnant dans ce pays, arrivent sur les côtes italiennes où ils sont pris en charge avant d'être conduits dans des centres d'accueil disséminés en Italie.
Plus de place
Ces villes italiennes où ils sont acheminés dans un deuxième temps sont aussi débordées par ces arrivées.
A Chieti, le maire de cette petite ville des Abruzzes (centre), a interdit mercredi la venue de nouveaux migrants, une vingtaine, dans les locaux d'un centre d'accueil pour personnes âgées et handicapées. Car faute de place, les préfets en Italie, sur ordre du gouvernement, ont demandé aux communes et collectivités locales de trouver d'urgence des milliers de places supplémentaires pour faire face à ce flux sans cesse croissant.
En Lombardie (nord de l'Italie), le gouverneur de cette région, l'une des plus riches du pays, s'est insurgé contre ces nouvelles demandes.
"Nous nous refusons à subir cette invasion, donc zéro place en Lombardie tant que continuera cette attitude irresponsable de la part du gouvernement", avait lancé mercredi Roberto Maroni, membre du mouvement anti-immigration de la Ligue du Nord.
Aucun incident entre migrants et population locale n'a jusqu'à présent été déploré, mais le ministère de l'Intérieur, selon les médias italiens, envisage de réquisitionner des casernes pour aider les autorités locales.
'Fardeau énorme'
"L'Italie porte un fardeau énorme pour le compte de l'Europe en ce qui concerne le problème de l'immigration", a déclaré un porte-parole des Nations unies, Stéphane Dujarric, cité jeudi par les médias italiens.
Plusieurs organisations internationales et humanitaires ont également sommé l'Europe de réagir et d'en faire plus pour éviter de nouveaux drames.
"Le nombre intolérable des victimes ne va que s'accroître si l'UE n'agit pas maintenant pour garantir des opérations de secours", a souligné mercredi Judith Sunderland, responsable régionale de l'ONG Human Rights Watch (HRW).
Selon l'OIM, quelque 500 migrants ont déjà trouvé la mort en Méditerranée depuis le début de l'année, sans compter les 400 portés disparus depuis dimanche.
Avec le temps calme et printanier qui s'est installé sur la zone, plus de 10.500 arrivées ont été enregistrées depuis le début du mois en Italie, où les structures d'hébergement des demandeurs d'asile accueillent déjà plus de 80.000 personnes.
16 avr. 2015,Fanny CARRIER
Source : AFP