dimanche 24 novembre 2024 02:16

Les Népalais du Qatar multiplient les sacrifices pour aider leur pays

Depuis sept ans, Pralhad Ghimire envoie une partie de son salaire d'ouvrier durement gagné au Qatar pour payer une maison à sa famille au Népal. Samedi, cette bâtisse a été réduite en miettes et il ne peut pas rentrer au pays.

L'aller simple pour Katmandou coûte plus de la moitié du salaire mensuel de ce jeune homme de 27 ans, rongé par l'angoisse de savoir ses parents, son épouse et ses fils de 10 et 7 ans vivre dans la rue depuis le séisme qui a coûté la vie à plus de 5.000 personnes au Népal.

Comme Pralhad, quelque 400.000 Népalais sont installés au Qatar, constituant la deuxième communauté d'immigrés de ce richissime émirat gazier.

L'écart de niveau de vie y est immense entre ces migrants travaillant principalement dans la construction et les locaux: le salaire de Pralhad, qui monte des échafaudages pour environ 300 euros par mois, est ainsi 60 fois inférieur au revenu moyen d'une famille qatarie.

"Ma maison a été entièrement détruite", se lamente aujourd'hui le jeune homme, "il ne reste plus rien" du bâtiment de deux étages et huit chambres qu'il s'est échiné à financer depuis qu'il est arrivé au Qatar.

Ses années d'expérience n'ont pas convaincu ses patrons de lui donner un bonus, ni même une aide pour le billet d'avion, explique-t-il.

Pralhad sait que beaucoup d'autres de ses compatriotes veulent rentrer au pays pour aider les leurs, qui manquent de tout y compris de nourriture. Mais avec leurs maigres salaires, ils n'en ont simplement pas les moyens.

"Certains viennent juste d'arriver et d'obtenir leur visa. S'ils partent au Népal, comment pourront-ils revenir au Qatar ?", souligne-t-il.

Mais selon l'ambassade népalaise au Qatar citée par le journal The Gulf Times, seulement "une dizaine" de ressortissants ont réclamé une aide pour rentrer chez eux.

Malgré tout, les preuves de solidarité ne manquent pas.

Un journal local, The Peninsula, raconte ainsi l'histoire d'un ouvrier dont les collègues de travail se sont cotisés pour amasser 1.400 dollars afin qu'il puisse rentrer enterrer sa femme et deux enfants en bas âge au Népal.

Ces ouvriers aux salaires de misère se sont insurgés en apprenant que l'employeur avait refusé de lui accorder la moindre aide, pas même la course de taxi jusqu'à l'aéroport.

 Mariage reporté

De nombreux Qataris se sont montrés généreux à l'égard des victimes du séisme, répondant notamment à un appel de la branche locale du Croissant rouge qui cherche à lever d'urgence 12 millions de dollars.

Pour les travailleurs népalais, les sommes versées pour aider les rescapés représentent souvent un important sacrifice.

Dans un restaurant népalais du centre de Doha, où tous les regards sont tournés vers une chaîne d'informations égrainant les nouvelles du désastre, Raju Maharjan explique qu'il a offert une partie des économies avec lesquelles il devait payer son mariage prévu à l'été.

"Je pouvais en donner 30 à 40%, c'est donc ce que j'ai fait", assure ce responsable commercial qui a passé dix ans au Qatar.

La noce a été reportée puisque la maison de sa famille dans la région de Siddhipur, non loin de Katmandou, a été en grande partie détruite.

Babitha Shrestha, une Népalaise dont la demeure familiale a "craqué" sous les secousses du tremblement de terre, raconte que sa fille d'un an a survécu mais est désormais "effrayée".

Mme Shrestha veut remercier tous ceux qui, au Qatar, ont levé des fonds.

"Ils sont vraiment engagés à aider toutes les victimes de ce désastre et pas seulement les Népalais. Je leur suis reconnaissante".

Le mari de la patronne du restaurant, le docteur Dev Dangol, qui est un leader de la communauté népalaise au Qatar, assure que de nouvelles levées de fonds vont avoir lieu et confirme qu'il s'agit d'un effort collectif.

"Nous avons de nombreuses communautés ici, et toutes essayent de récolter" de l'argent.

30 avr 2015,David HARDING

Source : AFP

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