Le flux des migrants récupérés en Méditerranée reste ininterrompu, avec quelque 6.000 personnes secourues en un seul week-end, contraignant les secours en mer, essentiellement italiens, à redoubler d'efforts.
A moins que la Libye, d'où partent la très grande majorité de ces migrants, ne se décide à intervenir.
Près de 7.000 d'entre eux ont été arrêtés en Libye au moment où ils tentaient de rejoindre par mer l'Europe, a annoncé lundi un responsable relevant du gouvernement parallèle formé à Tripoli après la prise de la capitale libyenne en août 2014 par une coalition de milices appelée Fajr Libya. Le gouvernement libyen reconnu par la communauté internationale est, quant à lui, installé dans l'est du pays
Ces migrants, la plupart originaires d'Afrique, ont été arrêtés au large de la Libye ou avant de quitter ce pays et sont placés dans 16 centres de rétention dans la région de Tripoli, à Misrata, à 200 km plus à l'est, et dans d'autres secteurs.
Plus de la moitié des immigrés secourus ce week-end en Méditerranée sont arrivés lundi en Italie et un bébé est né au cours des opérations de sauvetage, a annoncé la Marine.
Une petite fille a vu le jour à bord d'un patrouilleur de la marine italienne, le Bettica, sa mère ayant ressenti les premières douleurs peu de temps après avoir embarqué depuis les côtes libyennes. La mère et l'enfant transportées à l'hôpital sitôt arrivées en Italie, se portent bien, selon la Marine.
D'autres n'ont pas eu cette chance. Dix migrants ont été retrouvés morts à bord de plusieurs embarcations de fortune, le nombre total des personnes qui ont perdu la vie depuis le début de l'année en Méditerranée dépassant désormais 1.750.
Quelque 6.000 migrants ont été sauvés ce week-end, dont, pour la seule journée de samedi, 3.690 qui se trouvaient à bord de 17 embarcations en détresse, principalement au large de la Libye.
Et même si, les 12 et 13 avril, plus de 6.600 migrants avaient été secourus en deux jours, il s'agit d'un des chiffres les plus élevés de ces dernières années.
Un premier groupe de près de 900 migrants est arrivé dans le port de Pozzallo, près de Raguse, en Sicile. Les migrants, essentiellement des Somaliens et des Erythréens, doivent être transférés après identification dans des centres d'accueil disséminés dans toute la péninsule, à Rome, Milan et Naples, entre autres.
Plusieurs autres navires de guerre sont par ailleurs arrivés dans la journée avec près de 2.000 migrants, à Reggio Calabria (sud-ouest), Messine et Augusta en Sicile ou sur l'île italienne de Lampedusa, au large de la Tunisie.
Multiplication des sorties en mer
Les garde-côtes et la marine italienne ont multiplié les sorties en mer ce week-end. Et pour la première fois samedi, le patrouilleur français Commandant Birot a participé aux opérations, secourant 219 migrants qui se trouvaient à bord de trois embarcations différentes.
L'envoi de ce navire était prévu de longue date, a affirmé lundi la Commission européenne, pour qui le renforcement de Triton, l'opération européenne de surveillance et de secours en mer, n'a pas encore débuté. Les 28 membres de l'UE n'ont toujours pas définitivement adopté le nouveau dispositif qui prévoit notamment l'extension de la zone géographique d'action des navires engagés.
Or, selon le porte-parole de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) à Rome, Flavio Di Giacomo, "toutes les opérations de secours ont été effectuées à environ 100 milles marins (185 km), loin des 30 milles qui représentent la limite d'action de Triton".
Pour l'OIM, les décisions prises le 23 avril par les dirigeants européens après les hécatombes parmi les migrants en Méditerranée les jours précédents n'ont encore eu aucun effet.
"Nous n'avons pas vu de changements car j'imagine que la majeure partie des forces de Triton doit encore être mise en place. L'immense majorité des interventions de ce week-end a été réalisée par les Italiens, ou des navires marchands gérés par le centre opérationnel des gardes-côtes", a-t-il expliqué à l'AFP.
Lundi, Frontex, l'agence européenne chargée de la surveillance des frontières extérieures de l'espace Schengen, qui gère Triton, a précisé de son côté avoir intensifié ses opérations en Méditerranée.
"Nous travaillons à augmenter le nombre des bateaux et des avions. Nous avons demandé et obtenu la confirmation de pays européens, dont la France, concernant l'envoi de leurs unités", a déclaré à l'AFP Ewa Moncure, la porte-parole de Frontex, dont le siège se trouve à Varsovie.
Deux navires de la marine de guerre allemande ont ainsi accosté en Crète pour participer à l'aide au secours des migrants en Méditerranée.
A la suite d'une série de naufrages ayant fait plus de 1.200 morts en avril, les dirigeants européens réunis en sommet extraordinaire le 23 avril ont décidé de renforcer la présence de l'UE en mer en triplant le budget de l'opération européenne Triton, qui était jusqu'alors de trois millions d'euros par mois.
4 mai 2015,
Ljubomir MILASIN