vendredi 22 novembre 2024 10:51

Rachida M'faddel retrace un voyage en aller simple au Canada

Pour son deuxième roman, Rachida M'faddel revient, une fois encore, sur la problématique de l'émigration. Une œuvre écrite d'une main simple, mais qui dévoile bien des complexités.

Partir, quel que soit le coût. Quitter le pays pour aller vers un inaccessible rêve. Passer les frontières pour vivre mieux. S'installer ailleurs pour faire comme les autres qui sont partis et qui ont ou semblent avoir réussi. Prendre famille et bagages pour «garantir son avenir».

En voilà quelques-unes des formulations qu'on adosse au verbe «immigrer», quand on tente l'argument par sa mise en perspective. Seulement, au cours des dernières décennies, et compte tenu de la « aturation» de la destination Europe, doublée du verrouillage de la forteresse vieux continent, les yeux se sont tournés vers le grand large : Adieu Europe, bienvenue au Canada, serait le titre d'un éventuel récit sur cette nouvelle destination. Pas facile d'y accéder, mais tous les chemins sont bons pour tenter la grande aventure. Avec, néanmoins, cette particularité quant au profil de ceux qui «choisissent» de s'embarquer vers ce pays qui, proximité géographique oblige, se prête fort bien au qualificatif du «nouvel Eldorado». C'est qu'on n'est plus dans la logique d'un sans- emploi ou d'un sous-employé, sous-rémunéré qui décide de partir pour se faire plus d'argent. Mais, bel et bien de personnes bien installées chez eux, qui sont cadres, qui «vivent bien», qui ont une voiture, un appartement et patati et patata. Et hop, le démon de l'immigration les prend par surprise. Sauf que la décision, elle, est souvent soigneusement préparée. Peu importe la suite des événements. C'est un peu à cela que ressemble le destin de Nabil Mansouri. Un personnage plus vrai que vrai qui se trouve être le protagoniste du deuxième roman de Rachida M'fadel, «Canada, aller simple». Pour le jeu de mot, ce n'est pas aussi simple que cela ! Tout commence par l'histoire d'une de ses connaissances. Un ami, qui répond au nom de Mourad qui, après avoir reçu son visa d'immigrant, vendit une voiture de marque et un appartement dans un quartier chic de la métropole avant de partir. Nabil, pris du même désir et sur fond des chimères qui se dessinait devant ses yeux, décida de tenter sa chance. Première tentative, première déception.

Outre les tensions qui se sont fait jour dans le couple, rien qu'à l'idée, la déception était que sa demande auprès de la délégation générale du Québec à Paris a essuyé une fin de non-recevoir. Pas de problème, il y a toujours dans les parages quelqu'un pour donner le conseil qu'il faut. Et le conseil, bien entendu agrémenté de belles perspectives d'une connaissance qui se plaît bien sur place, n'est autre que l'option de prendre un avocat en immigration. Détail à l'appui, l'auteur, qui est aussi journaliste, trace la trajectoire d'un départ annoncé. Le récit, d'une écriture qui ne cherche pas les détours, encore moins le phrasé qui frappe, Rachida M'fadel suit l'itinéraire de Nabil. Pas à pas et démarche par démarche, on rencontre un Nabil dans tous les états de celui qui émigre. Notre protagoniste, pareil à Mourad, brade ses biens et part avec femme, enfants et bagages. La porte du grand rêve s'ouvre. Mais, le destin lui cachait bien des nuages à l'horizon. D'un extrême à l'autre. Devant le rêve se cachait les revers de la médaille. L'idée d'une vie meilleure se transforme, au fil des 368 pages du roman sorti aux éditions Fennec avec l'appui du CCME, en une bataille pour la survie. L'échec, aux multiples facettes, pointe à l'horizon. Une expérience d'un couple qui n'a rien d'unique. Ils sont, en fait, nombreux à avoir rêvé de paradis, pour se retrouver en enfer. C'est ce destin que retrace ce récit.

Source : Le Matin

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