Des centres d’accueil de candidats au départ vont voir le jour au Sahel, dont un pionnier à Agadez (Niger). Un premier pas pour dissuader certains de tenter l’aventure.
A gadez, dans le nord désertique du Niger, est une plaque tournante sur les routes menant les migrants d'Afrique sahélienne vers la Libye puis, par la mer, vers l'Europe. C'est là qu'un centre d'accueil pilote pourrait bientôt ouvrir. Soutenu par des fonds européens, ce dispositif permettrait de retenir à la source des candidats au départ pour leur faire toucher du doigt les risques ; leur offrir une vision « réaliste » du voyage ; et leur présenter les aides possibles pour qu'ils puissent revenir chez eux et y mener une vie digne.
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Voilà pour le projet. Élément du plan d'action présenté la semaine dernière par la Commission européenne, il a été au cœur des discussions que Bernard Cazeneuve vient de tenir à Niamey avec le président du Niger, Mahamadou Issoufou. Le ministre français de l'Intérieur a continué son chemin vers Yaoundé (Cameroun), où l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) mène des projets de réinsertion d'anciens migrants. Plusieurs cas concrets lui ont été présentés, autant d'exemples de ce que les Européens aimeraient développer comme alternative à l'afflux incontrôlé de migrants. « Il faut attaquer le mal à la racine », juge le président du Niger, qui se dit prêt à ouvrir plusieurs centres pour migrants dans son pays : à Agadez, mais aussi à Arlit et à Diffa.
Avec l'aide du G5
Son homologue de Gambie, Yahya Jammeh, dont le petit pays déplore des centaines de morts en Méditerranée, tient de son côté un discours très direct : pour lui, les parents qui laissent leurs enfants émigrer sont critiquables, « car ils ferment les yeux sur la façon dont ils gagnent leur vie en Europe ». Le président affirme même qu'il existerait en Gambie des emplois équivalents à ceux que ces migrants voudraient occuper en Europe.
Impliquer les États de départ est une piste que la France, engagée au Sahel, veut promouvoir au sein du G5, ce groupe de pays (Niger, Tchad, Burkina, Mauritanie et Mali) sur lequel Paris s'appuie déjà dans la lutte antiterroriste. Jeudi, à Niamey, tous se sont engagés à prendre des mesures en amont pour freiner les migrants et améliorer l'échange de renseignements.
Côté français, on se soucie aussi de l'aval. Samedi, Manuel Valls et son ministre de l'Intérieur étaient à la frontière franco-italienne des Alpes-Maritimes, là où la pression migratoire se manifeste en ce moment avec le plus d'acuité : 944 migrants interceptés en une semaine et 54 passeurs arrêtés depuis le début de l'année, ce qui conduit des responsables de l'opposition à réclamer le retour des contrôles aux frontières. L'occasion pour le Premier ministre de rencontrer le préfet, les douaniers, les policiers de l'air et des frontières, qui contrôlent les trains et points de passage.
Répartition « plus équitable »
L'occasion aussi de préciser la position de la France dans les discussions européennes actuelles, avec la volonté de bien distinguer immigration économique et demandes d'asile. Les quotas de migrants proposés par Bruxelles ? « Je suis contre : cela n'a jamais correspondu aux propositions françaises », a martelé Manuel Valls. Ce refus des quotas, partagé à Londres (lire ci-dessous) ou à Varsovie, où l'on préférerait « des décisions bénévoles », est-il un signe de fermeture ? Le Premier ministre s'en défend : « L'asile est un droit attribué sur critères internationaux, c'est pourquoi il ne peut pas faire l'objet de quotas : on est demandeur d'asile ou pas. »
Il a rappelé que la France assurait sa part et voulait une répartition « plus équitable », sachant que cinq pays (Allemagne, Suède, France, Italie et Royaume-Uni) prennent en charge 75 % des demandeurs. Paris, qui rappelle avoir accueilli 5 000 Syriens et 4 500 Irakiens depuis 2012, voudrait aussi que les Européens tiennent compte, dans les critères de répartition, des efforts militaires consentis par le pays en Afrique pour la sécurité européenne et celle des pays de départ.
18/05/2015, Christophe Lucet
Source : sudouest.fr