Une rencontre a été organisée en hommage à la mémoire de feu Driss Chraïbi, jeudi à Casablanca, dans le cadre du 16ème Salon international de l'Edition et du Livre (SIEL) qui se poursuit jusqu'au 21 février.
Dans l'œuvre de Chraïbi, on retrouve les qualités d'un homme qui adorait la vie, le contact de vrais gens et horreur des salons littéraires et des rencontres entre intellectuels puisqu'il vivait toujours retiré dans des îles (île de Ré) ou dans des régions reculées", a souligné l'universitaire Kacem Basfao qui animait cette rencontre.
Driss Chraïbi, qui est arrivé en 1945 en France pour étudier la chimie mais se passionnait pour la littérature et le journalisme, était aussi un homme de radio durant une trentaine d'années. Il animait des émissions (ORTF, RTF, France culture, ...) léguant ainsi une œuvre radiophonique immense.
"Précurseur et grand orateur", Chraïbi, qui a reçu de nombreux prix littéraires dont celui de l'Afrique Méditerranéenne pour l'ensemble de son œuvre en 1973, le prix de l'amitié franco-arabe en 1981, s'est fait connaître par ses deux premiers romans.
Il s'agit du "Le Passé simple" (Gallimard, 1954), récit autobiographique dans lequel il dénonce à la fois le colonialisme français et les archaïsmes de la société marocaine et les "Les Boucs" (Gallimard, 1955), qui relate pour la première fois les conditions des travailleurs immigrés en France.
L'œuvre prolifique et éclectique à l'humour espiègle de Driss Chraïbi a influencé des générations d'écrivains et d'auteurs traitant avec une ironie et liberté de ton rare la condition de la femme, les relations amoureuses, le colonialisme, le racisme, ou Al Andalus: "Succession ouverte" (Gallimard, 1962), "La civilisation ma mère !..." (Gallimard, 1972), "Un ami viendra vous voir" (1967), "Mort au Canada" (1975), "Une enquête au pays" (1981), "La mère du printemps" (1982), "Naissance à l'aube" (1986), "Lu, vu, entendu", "Le monde à côté" (Denoël, 2001) et "L'homme qui venait du passé" (Denoël 2004).
"Nos destins se sont croisés en 1972, quand il écrivait +La civilisation ma mère !...+, a témoigné sa femme Sheena Chraïbi. "J'étais donc sa première auditrice, il lui fallait toujours déclamer à haute voix ce qu'il était en train d'écrire, commencer et recommencer une page plusieurs fois", a-t-elle confié. Il lui a fallu 10 ans de réflexion "pour accoucher dans la douleur de L'homme du livre", a-t-elle dit.
Cette rencontre qui s'est déroulée en présence de plusieurs intellectuels, a été agrémenté par des lectures d'extraits de "Lu, Vu, Entendu" et de la postface des "Les Boucs" par Sheena Chraïbi.
Driss Chraïbi s'est éteint en 2007 dans le Dôme où il résidait et fut enterré, à sa demande, aux côtés de son père au Cimetière Chouhada de Casablanca.
Source : MAP