mercredi 3 juillet 2024 16:29

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Asile, frontières : l'Autriche ne fléchit pas envers les migrants (WEEKENDER)

Après sa récente offensive pour fermer la route des Balkans aux migrants, l'Autriche pourrait encore semer la zizanie dans le débat européen sur l'accueil des réfugiés en verrouillant une autre frontière stratégique ainsi que son droit d'asile.

Il y a deux mois, Vienne s'attirait le courroux d'Athènes avec sa volonté d'isoler la Grèce, porte d'entrée du flux migratoire vers l'Europe. Cette semaine, le gouvernement autrichien a essuyé un feu de critiques venues d'Italie sur son projet de dispositif anti-migrants, assorti d'une clôture au col de Brenner qui relie les deux pays dans la région du Tyrol.

Annoncé en janvier, cet aménagement policier, et sans doute militaire, a vaguement pris corps ces jours-ci avec la mise en chantier d'un "auvent". Vienne, qui n'a pas arrêté de date pour la pose de la clôture proprement dite, souhaite un dispositif opérationnel d'ici juin.

Mais ce sont aussi les déclarations des dirigeants autrichiens qui ont irrité leurs homologues transalpins. La ministre de l'Intérieur sortante Johanna Mikl-Leitner (conservatrice) a ainsi intimé à Rome de "s'assurer qu'il n'y aura pas de flux migratoire incontrôlé" si l'Italie veut que le col reste ouvert.
Une pression qui n'est pas sans rappeler les mises en garde répétées de la ministre, cet hiver, à la Grèce sur son supposé laxisme migratoire.

L'Autriche dit faire de la "prévention" contre une possible augmentation des arrivées via la Libye. Les autorités italiennes ont enregistré 25.816 personnes depuis le début de l'année, soit environ 7.000 de plus que l'année dernière à la même date.

C'est aussi par "prévention" que le gouvernement planche sur une loi qui réduira drastiquement les possibilités des migrants de demander l'asile en Autriche, après que ce pays a accueilli 90.000 réfugiés, soit plus de 1% de sa population, en 2015. Les organisations d'aide dénoncent le risque d'une "abolition du droit d'asile" à l'avenir.

Le projet de loi, passé jeudi en commission parlementaire, doit être adopté vers la fin du mois.

Concrètement, le gouvernement pourrait par "décret d'urgence" lié au maintien de l'ordre public ne plus accorder sa protection qu'aux réfugiés qui ont déjà de la famille en Autriche, et à ceux qui sont menacés dans les pays européens par lesquels ils ont transité avant d'arriver à la frontière autrichienne.
Les candidats à l'asile déposeront leur demande directement à la frontière dans des centres dédiés où elle sera traitée en 120 heures maximum, une procédure accélérée qui évoque les "zones de transit" pour demandeurs d'asile aux frontières hongroises.

Ceux ne rentrant pas dans les deux catégories de bénéficiaires seront refoulés vers les pays voisins, avec, comme cet hiver, un risque "d'effet domino".

"Il n'y aura donc plus d'examen de demande d'asile à proprement parler, comme le droit des réfugiés l'impose, juste une vérification de la présence de famille en Autriche", déplore auprès de l'AFP Cristoph Pinter, responsable du Haut-Commissariat de l'ONU aux réfugiés dans le pays.

La justification de ce "décret d'urgence" pose également problème à de nombreux juristes, comme Reinhard Klaushofer, directeur de l'Institut universitaire autrichien pour les droits de l'Homme: "se baser, comme dans le projet actuel, sur une +prévision+ de hausse du flux migratoire est contraire au droit européen qui exige la preuve d'un danger concret et significatif", explique-t-il à l'AFP.

A la frontière slovène, où affluaient des milliers de réfugiés cet automne, les arrivées sont aujourd'hui quasi-nulles mais 100 à 150 demandes d'asile sont déposées chaque jour en Autriche, laissant penser que les réseaux de passeurs sont actifs.

Il n'est d'ailleurs pas dit que l'Autriche obtienne l'autorisation de la Commission européenne pour prolonger les contrôles frontaliers temporaires au delà-du 12 mai, date d'expiration du délai de huit mois autorisé au sein de l'UE. La Commission s'est dite "très préoccupée" par le risque d'une nouvelle entorse au principe de libre circulation au Brenner, une axe névralgique pour le transport Nord-Sud.

Autant d'incertitudes qui valent à la coalition viennoise entre sociaux-démocrate et conservateurs des critiques contre un "effet d'annonce" à but électoral, avant le premier tour de la présidentielle le 24 avril. Les candidats des deux formations gouvernementales ne seraient, selon les sondages, pas qualifiés pour le second tour. Verts et extrême droite sont en tête des intentions de vote.

15 avr 2016

Source : AFP

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