mercredi 3 juillet 2024 10:20

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Plus de la moitié des jeunes émigrants n’envisagent pas de retourner au Liban

Les jeunes de 18 à 35 ans représentent plus de trois émigrants sur quatre. Mais une partie des émigrants reviennent au Liban, notamment des pays arabes et d'Afrique.

Dans le cadre de notre publication de l'enquête sur « L'émigration des jeunes Libanais et leurs projets d'avenir », réalisée par l'Observatoire universitaire de la réalité socio-économique (Ourse) de l'Université Saint-Joseph, nous abordons aujourd'hui le second et dernier aspect intitulé « Les jeunes Libanais dans la vague d'émigration, de 1992 à 2007 ». Il aborde la place des jeunes dans le phénomène migratoire, les caractéristiques et l'implantation des jeunes migrants, ainsi que les attitudes et opinions des jeunes Libanais vis-à-vis de l'émigration. La première partie de cette étude portant sur « Les jeunes Libanais dans la population résidente » a été publiée dans notre édition de mardi 30 mars 2010.


Deux tiers d'hommes

Cette enquête concerne les émigrés de 1992 à 2007 ayant un lien direct de parenté avec l'échantillon formé de 8 061 ménages. Elle comporte des données individuelles sur 5 695 émigrés, à partir d'informations données par leurs familles au Liban. De manière générale, 45 % des ménages libanais ont au moins un membre de leur famille résidant à l'étranger qui a quitté le pays entre 1992 et 2007. Quant au nombre d'émigrés pour cette période, il est estimé au moins à 466 000 individus et, au plus, à 640 000 individus. Si 18,7 % des émigrés considèrent ces départs comme provisoires, 53 % pensent qu'ils sont définitifs et 28 % n'ont pas encore pris leur décision à ce sujet.

Les jeunes de 18 à 35 ans représentent plus de trois migrants sur quatre (environ 77 %). De même, un peu moins du tiers des migrants (32 %) sont âgés de 24 à 29 ans. L'âge moyen du départ est sensiblement le même chez les hommes (28 ans) et les femmes (27 ans), mais il diffère selon les régions et les communautés. Ainsi, les jeunes migrants du Liban-Sud et de Nabatiyeh partent en moyenne vers 26 ans, alors que ceux du Mont-Liban partent à 29,6 ans. Par ailleurs, les jeunes sont de plus en plus nombreux à émigrer, et la progression de ces départs s'accentue au fil des années. Les deux tiers des jeunes émigrés sont composés d'hommes, et les jeunes instruits ont une propension plus forte à émigrer que les moins instruits. Le travail est incontestablement la principale raison de l'émigration des jeunes hommes (52 % entre 1992 et 2007 et 73,8 % entre 2002 à 2007). Mais les raisons familiales, notamment le mariage ou le regroupement familial, sont la principale cause de départ des jeunes femmes (68,1 %). Toutefois, de plus en plus de femmes émigrent pour travail (23,3 % entre 2002 à 2007), ou, dans une moindre mesure, pour poursuivre des études supérieures.

Nombre important d'universitaires

Parmi les jeunes émigrés, un homme sur deux est marié au moment de l'enquête, alors que ce taux est de 84,3 % chez les femmes. Par ailleurs, la prédominance de l'émigration des jeunes universitaires est remarquable et 43,4 % des émigrés ayant quitté le pays entre 18 et 35 ans ont un diplôme universitaire. Cette tendance s'accentue actuellement et les jeunes générations qui émigrent ont un niveau d'instruction encore plus élevé, notamment les jeunes femmes dont 50 % détiennent un diplôme universitaire. Le domaine prédominant de spécialisation des jeunes émigrés, hommes et femmes, est la gestion et les services (30 %). On note toutefois un taux élevé de spécialisation masculine en ingénierie (33,4 %) et un taux élevé de spécialisation féminine en lettres et sciences humaines (27,1 %).

Les jeunes Libanais de l'émigration présentent un taux d'activité élevé (72,9 %). La différence reste cependant sensible entre les hommes, dont 91 % exercent un emploi en 2007, contre 36 % des jeunes femmes émigrées. Cette différence s'explique par le fait que ces dernières sont souvent mères au foyer. Les jeunes Libanais travaillent principalement dans les métiers de service (23 %) et les métiers intellectuels ou scientifiques (22 %). Les trois quarts environ des jeunes émigrés sont salariés : 12 % d'entre eux sont directeurs ou gérants de sociétés, 14 % travaillent dans des professions intermédiaires et 13 % sont artisans ou ouvriers qualifiés.

Les destinations des jeunes émigrés sont identiques à celles de leurs aînés. Les pays arabes attirent 35 % d'entre eux, l'Europe 24 % et l'Amérique du Nord 20,5 %, alors que seulement 8,4 % choisissent l'Afrique ou l'Australie. Par ailleurs, 31,7 % des émigrés ayant quitté le pays entre 18 et 35 ans ont obtenu une nationalité étrangère, notamment européenne, américaine, canadienne et australienne.

Nombre de jeunes émigrés gardent des liens avec leur famille au Liban : 34,3 % d'entre eux rendent des visites régulières à leur famille restée au pays, 41,4 % retournent au pays de manière intermittente, et 22,3 % n'y retournent jamais. Ce sont les jeunes partis le plus récemment qui reviennent le plus souvent au Liban : 37 % de ceux qui sont partis entre 2002 et 2007 reviennent souvent au Liban, contre 28,4 % de ceux qui sont partis entre 1992 et 1996. De plus, 19,5 % des jeunes émigrés aident financièrement leur famille au Liban, de manière régulière, alors que 29,3 % les aident de temps à autre. En revanche, 47,9 % des jeunes émigrés, et plus spécifiquement ceux qui figurent parmi les émigrés récents, n'envoient aucune aide financière à leur famille. Cet écart s'explique par le fait que les émigrés de courte durée n'ont pas encore de situation financière leur permettant d'aider leur famille, ou qu'ils sont étudiants.

Raisons professionnelles

Par ailleurs, 60 % des jeunes émigrés de la période de 1992 à 2007 possèdent au Liban des biens immobiliers, des terrains ou des investissements. Mais aussi 29 % d'entre eux ont acquis un logement dans le pays d'émigration. Un chiffre qui explique l'amélioration de la situation des jeunes émigrés dans leur pays d'accueil, à mesure qu'augmente la durée de leur séjour.
Plus de la moitié des jeunes émigrés ont définitivement quitté le Liban. En revanche, leur intention de retour augmente légèrement avec leur niveau d'éducation. Ainsi, 20 % des jeunes émigrés ayant fait des études universitaires ont l'intention de revenir au Liban. Mais les émigrés installés depuis longtemps à l'étranger ont moins l'intention d'y retourner : 59 % des émigrés de 1992 à 1996 n'ont pas l'intention de retourner au Liban. L'intention de retour est cependant la plus élevée parmi les jeunes émigrés installés dans les pays arabes (21,2 %) et en Afrique (20,6 %).

L'opinion des jeunes sur l'émigration est partagée. Un peu plus du quart des jeunes de 18 à 35 ans résidant au Liban déclarent avoir l'intention d'émigrer ou de quitter provisoirement le pays. La fréquence est sensiblement plus élevée parmi les jeunes hommes (33 %) que les jeunes femmes (19,2 %). À l'opposé, 56,2 % des jeunes disent n'avoir pas l'intention de partir. Le désir d'émigrer varie en fonction du lieu de résidence du jeune : les taux sont ainsi supérieurs pour les jeunes résidents au Mont-Liban (40 %) et au Liban-Nord (30 %). Le souhait d'émigration varie aussi en fonction de l'activité du jeune : nombreux sont les jeunes chômeurs ayant déjà exercé un emploi, désireux de quitter le pays (50,6 %), de même que ceux à la recherche d'un premier emploi (34,4 %). Par ailleurs, les jeunes ayant un niveau universitaire et secondaire sont plus tentés de quitter le pays que les moins instruits. Toutefois, les jeunes ayant les revenus mensuels les plus élevés sont moins enclins à vouloir émigrer (8,1 %).

Quant aux raisons qui poussent les jeunes à vouloir émigrer ou partir provisoirement, elles sont multiples. La majorité des jeunes font le projet de partir pour des raisons professionnelles, notamment la recherche d'un emploi et l'obtention de meilleures conditions de travail (17,6 % des jeunes et 67,4 % de ceux ayant l'intention de partir). Près de 37 % d'entre eux recherchent des revenus plus élevés, 37 % veulent assurer leur avenir professionnel et 28,3 % se plaignent de la stagnation économique du pays. La poursuite des études est aussi une des raisons d'intention de départ des jeunes. Par contre, la majorité de ceux qui ne veulent pas partir, même s'ils le souhaitent, parlent des liens familiaux comme raison essentielle (50 %).
Parmi les avantages de l'émigration, 35,3 % de jeunes citent l'amélioration de la situation financière, 35,1 % estiment que l'émigration permet d'avoir plus d'opportunités de travail et 15,8 % qu'elle permet de vivre en sécurité. Par contre, le principal inconvénient pour 48,2 % des jeunes est l'éloignement de la famille, et à moindre échelle, l'éloignement du pays (30 %).
Enfin, 25 % des jeunes sont encouragés par leur famille à quitter le pays. Mais la moitié d'entre eux (55,7 % des femmes et 42 % des hommes) souhaite ne jamais quitter le Liban. Un rêve qu'ils semblent partager avec les jeunes de l'émigration dont seulement 30 % avouent souhaiter vivre à l'étranger.

Source : L’Orient-Le Jour

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