Depuis une semaine, des parents se relaient à Lyon pour occuper une école du quartier de la Guillotière, et tenir compagnie à un père de famille au centre de rétention. Ils veulent obtenir la libération et le maintien en France de Guilherme Hauka-Azanga, Angolais de 45 ans, arrivé en France il y a huit ans, dont les enfants sont scolarisés à l’école Gilbert-Dru (7e arrondissement). Une audience est prévue ce matin après l’appel par le parquet du refus, dimanche, de la prolongation de sa rétention...
Asile. Depuis le centre de rétention où Libération l’a rencontré dimanche, il raconte qu’il a fui son pays juste après la mort de Jonas Savimbi, ancien chef de l’Unita, mouvement rebelle replié dans le nord du pays. Il a appris deux ans plus tard la mort de son ex-compagne, d’une crise cardiaque après s’être fait tirer dessus. «Là-bas, explique-t-il, quand tu portes un vêtement avec le coq [l’emblème de l’Unita, dont le chef était surnommé «le Coq noir», ndlr], ils te disent qu’ils veulent pas te tuer, seulement tirer sur le coq.» Ses deux plus jeunes enfants ont disparu après la mort de leur mère et les trois aînés se trouveraient en république démocratique du Congo, sous l’autorité parentale d’une religieuse catholique.
A Lyon, Guilherme a eu deux enfants, avec Florence, qui est en situation régulière et souffre d’un sérieux problème de thyroïde. Ils élèvent également les deux premiers enfants de celle-ci. Après plusieurs refus d’asile politique, Guilherme a refusé en janvier d’embarquer à bord d’un avion pour être expulsé. Ce qui lui a valu deux mois de prison à Corbas, maison d’arrêt proche de Lyon sur le chantier de laquelle, ironie du sort, il avait travaillé au noir quelques mois plus tôt.
Couverture. A sa sortie, des policiers sont venus le chercher, sans lui laisser le temps de voir sa compagne et son avocat, ou de prendre des affaires. Il s’est recouvert de matières fécales pour éviter d’être expulsé, mais des policiers l’ont enveloppé d’une couverture avant de le sangler. Un pilote a refusé de continuer le voyage dans ces conditions après une escale en Allemagne. La préfecture a demandé la prolongation de cinq jours de sa rétention, le temps d’organiser une nouvelle expulsion. Un juge de la liberté et de la détention (JLD) a refusé et le parquet a fait appel. Cela doit être jugé ce matin.
Le JLD s’appuie entre autres sur l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme, qui garantit le droit au respect de la vie familiale. La préfecture répond que l’homme a des attaches en Angola, et qu’elle doute de «l’ancienneté» et de «l’intensité» de ses liens familiaux en France. Les parents de l’école Gilbert-Dru répondent qu’ils sont «une bonne centaine» à pouvoir témoigner que «M. Hauka-Azanga accompagne et va chercher [ses enfants] à l’école et à la crèche chaque jour». Ils devraient être nombreux ce matin devant la cour d’appel.
Source : Libération.fr