Le retour définitif des Marocains du monde n’est pas motivé que par des projets de retraite, mais aussi par le souhait de se lancer dans des projets générateurs de revenus.
La communauté des Marocains résidant à l’étranger a depuis toujours été au centre des préoccupations de plusieurs acteurs du pays, dont le ministère de tutelle, la société civile… Son degré d’intégration, la mobilisation de ses compétences, les motifs, motivations et freins liés au retour définitif au Maroc sont autant de questions qui ont été passées au peigne fin par une étude réalisée dans le cadre du projet Sharaka, une initiative conjointe du ministère chargé des MRE et Expertise France. Il en ressort une nette évolution du profil, de l’intérêt et des intentions de retour des MRE au Maroc, et tout cela, en fonction des pays pris en considération (France, Belgique, Allemagne, Pays-Bas).
En France, les MRE bénéficient d’une forte représentation et enracinement dans la société. Cette communauté a été aidée par une dynamique associative qui a permis la création d’un réseau d’immigrants marocains dense et organisé. Elle a même connu une féminisation, une montée et une variété des diplômes et un rajeunissement. Malgré une meilleure représentativité politique des MRE en Belgique, il reste que les obstacles rencontrés par les premières générations persistent pour leurs descendants aussi. D’autant que l’identité culturelle de ces MRE n’est pas liée à leur attachement à leur pays d’origine mais plutôt à leur appartenance religieuse. Le profil des migrants en Allemagne a évolué, lui, à travers les générations. D’une génération masculine, individuelle, temporaire et ouvrière, il a basculé vers une autre mieux enracinée, stable, et se dédiant à des études d’ingénieurs et de mathématiques. Parallèlement, grâce aux actions de sensibilisation et aux évolutions technologiques, les ressortissants marocains gardent un lien solide avec leur pays d’origine. Les Pays-Bas ont également connu un dynamisme du profil des immigrants. Alors qu’ils étaient essentiellement des travailleurs dont la logique était d’épargner en vue d’un investissement futur au Maroc, ils sont depuis quelques années plusieurs à s’inscrire dans des universités. Toutefois, leur attachement à leur pays reste des plus solides et les jeunes ne manquent pas d’afficher une volonté entrepreneuriale.
Cela dit, bien que l’attachement soit bien solide, les jeunes MRE considèrent le Maroc plutôt comme un lieu de villégiature. Ils n’écartent certes pas l’idée de s’installer au Maroc, mais ce souhait diffère selon le pays. Il est plus présent en France et aux Pays-Bas et moins important en Allemagne et en Belgique. Et si retour au pays il y a, il n’est pas forcément motivé par des projets de retraite comme c’était le cas il y a quelques années. La nouvelle génération des immigrants fait ce choix sciemment ; cela, accentué par la conjoncture économique assez difficile des pays d’accueil qui a précipité le retour des MRE. Naturellement, la part des MRE ayant quitté leur pays d’accueil sans travail est plus élevée dans les pays touchés par la crise récente (Italie et Espagne) et la France, où elle culmine à 44%. A l’inverse, 94% des MRE de Belgique, 92% des MRE d’Allemagne et 84% des MRE des Pays-Bas sont rentrés au Maroc même s’ils avaient un travail à l’étranger. Par ailleurs, il est des cas où le projet de retour semble réfléchi en dépit d’une situation professionnelle stable.
Transferts plus conséquents à l’approche du retour définitif au Maroc
Il faut savoir que les MRE faisant le choix du retour sont majoritairement jeunes. La tranche d’âge la plus concernée est celle des 30-40 ans, composée donc d’individus en phase d’activité et de productivité. Ceux-ci se préparent en amont, ce qui induit donc des transferts de fonds plus fréquents et plus importants. Le montant moyen de fonds rapatriés s’élève à 169 765 DH. Il est plus élevé pour les anciens pays européens d’immigration, se situant à 221 817 DH que pour les nouveaux et les autres pays. D’autant que la communauté des étrangers qui affiche des ambitions de retour définitif au pays investissait essentiellement dans l’immobilier alors elle est davantage orientée actuellement vers les projets générateurs de profits à l’instar de l’agriculture et l’achat de terrains agricoles qui accapare une part de 25%, suivis par le commerce avec 22% et les business comme le café/boulangerie (6,3%) et la restauration avec 13,8%. Ils correspondent généralement à des microprojets qui, dans près de 48% des cas, n’emploient aucune personne.
Le montant moyen des investissements des migrants de retour s’élève à 574 282 DH. Les migrants de retour des nouveaux pays européens d’immigration ont investi en moyenne beaucoup plus que ceux des anciens avec un budget moyen de 1080 659 DH contre 294521 DH auparavant. Cependant, bien que le souhait de rentrer définitivement au pays de leurs aïeux est plus fort que jamais et que le désir de monter sa propre affaire l’est encore plus, il n’en demeure pas moins que les MRE entrepreneurs sont généralement rebutés par la bureaucratie et la méconnaissance réglementaire du Maroc. D’autres déplorent des problèmes de foncier, le manque d’incitations et de reconnaissances de leur statut, mais aussi le déficit d’information et de transparence de l’administration, notamment en région. Au final, il est des difficultés liées essentiellement à l’accès au financement ou encore au manque d’information sur les opportunités d’emploi et l’environnement économique.
Source : La Vieéco