Après la France, le débat autour du burkini s’invite en Belgique. Et c’est une députée d’origine marocaine qui en est l’initiatrice. Elle appelle à l’interdiction du burkini sur les plages et dans les piscines, le qualifiant d’« horreur » dont les femmes « ne veulent pas ».
« Il faut absolument éviter que des femmes se promènent en burkini en Flandre. Ni dans les piscines, ni sur les plages. Je ne pense pas que les femmes veulent, au nom de la foi, se balader avec une telle horreur sur la plage. Si vous l’autorisez, vous mettez les femmes au ban de la société. » C’est l’appel sans concession lancé par la députée N-VA d’origine marocaine, Nadia Sminate, membre de la Commission radicalisme au Parlement flamand, selon le quotidien flamand De Standard.
En Belgique en effet, une poignée de femmes musulmanes se baignent en burkini sans que ce costume de bain ne suscite la levée de boucliers recensée auprès de certains élus municipaux chez son voisin français.
C’est sans compter le soutien de la direction du N-VA apporté à Nadia Sminate. Celle-ci « veut imposer » une interdiction du port du burkini sur l'ensemble de la Flandre et même à l’échelle nationale. « Nous vivons en Flandre et nous déterminons les règles. Si on dit qu'il faut faire respecter nos normes et nos valeurs, il faut joindre l'acte à la parole », a-t-elle martelé.
« On ne peut pas tout résoudre avec une interdiction »
Au moment où les arrêtés anti-burkini gagnent l’Hexagone - y compris dans des villes où aucune femme arborant cette tenue n’y a été aperçue, à l’instar du Touquet -, le débat que tente d’initier le parti nationaliste flamand n’excite guère la classe politique. « Evidemment, ça se voit (des femmes en burkini sur les plages, ndlr). Mais est-ce que ça crée des désagréments ? Absolument pas. Il n'y a eu aucun problème », estime le bourgmestre (Open VLD) Patrick De Klerck.
Si le député fédéral Franky Demon s’est dit favorable à une éventuelle interdiction du burkini à la piscine pour des raisons d’hygiène, il prend ses distances avec la logique du N-VA. « On ne peut pas tout résoudre avec une interdiction. Ou alors vous obtenez un Etat policier », argue-t-il.
En fonction depuis le 1er janvier 2016, Nadia Sminate, 34 ans, est la première femme d’origine marocaine bourgmestre en Belgique. De mère flamande et de père marocain, elle avait déclaré à la presse n’avoir « été élevée qu’en flamand ». « Mais aujourd'hui, je regrette que mon père ne m'ait pas plus appris l'arabe », confiait alors la députée que nous avons tenté de joindre en vain pour obtenir des explications quant à ses présentes prises de position.
Instrumentalisation de l'origine de la députée ?
Sa sortie médiatique ne surprend pas les politiques bruxellois d’origine marocaine. « Elle a le droit de réclamer ce qu’elle veut », déclare d’emblée Fouad Ahidar, vice-président du Parlement de la région Bruxelles-Capitale, joint par Yabiladi. « Mais on sait comment ça se passe, poursuit-il. On laisse des personnes aux noms à consonance arabe faire ce genre de déclaration, pour montrer quoi ? Que les Marocains sont si bien intégrés qu’ils peuvent être présents à tous les niveaux de la société : balayeurs, ingénieurs… et même parmi les racistes et islamophobes ? »
Pour ce député d’origine marocaine, les débats polémiques autour des musulmans en Europe en général et en Belgique en particulier n’ont que trop duré. « Aujourd’hui, il faut que ça s’arrête », clame-t-il. Et d’ajouter : « Quand les surfeurs s’habillent de la tête aux pieds, cela ne dit rien à personne. Mais quand une maman musulmane porte une tenue qui couvre son corps, on en fait toute une histoire. On attend que les musulmans soient massacrés pour qu’on dise que c’est trop ? »
17/8/2016, Ristel Tchounand
Source : Yabiladi