vendredi 22 novembre 2024 20:51

La France, premier pays de transit sur la route des migrants

L’afflux record de migrants à Calais s’explique d’abord par la réactivation de flux subsahariens passant par la Libye et la Tunisie.

Pourquoi la France est-elle aujourd’hui plus concernée par les flux migratoires ?

D’après les associations, le camp de Calais aurait aujourd’hui franchi la barre des 10 000 migrant. Un nouveau record. Cet afflux est d’abord l’effet de la réactivation de la « route italienne », depuis le printemps 2016. Les candidats à l’exil prennent le bateau à partir de la Libye ou de la Tunisie, puis ils échouent en Sicile, à Lampedusa ou dans les Pouilles.

« Il y a des pics en fonction de la météo et de la présence des passeurs », explique Céline Schmitt du HCR. Depuis janvier, 105 000 migrants ont ainsi échoué sur les côtes italiennes. Pour gagner le nord de l’Europe, il existe bien un passage via la Suisse, mais la France reste le premier pays de transit. D’où l’embouteillage à Vintimille.

Entre janvier et mi-août, la préfecture des Alpes-Maritimes a renvoyé 16 500 exilés en Italie. Et malgré les renforts policiers, environ 70 migrants arrivent chaque jour à Paris, dont le prolongement naturel est Calais.

Que sait-on de cette route migratoire ?

À la différence de la « route des Balkans », considérablement tarie depuis l’accord signé entre l’UE et la Turquie, la « route italienne » n’est pas empruntée par des exilés du Moyen-Orient, mais par des populations subsahariennes. On y retrouve beaucoup de réfugiés originaires de la corne de l’Afrique. Entre le 1er janvier et le 31 juillet 2016, 6 500 Soudanais, 11 500 Érythréens et plus de 5 000 Somaliens l’ont parcourue.

La France est très attentive aux migrants d’Afrique de l’Ouest en raison de leur proximité historique et linguistique : 6 700 Ivoiriens, 6 300 Guinéens, 5 000 Maliens et Sénégalais ont fait le chemin en sept mois. Fait nouveau : le nombre de Gambiens est monté en flèche (7 000 départs) depuis que le pays est devenu une « République islamique », en début d’année.

 « Les besoins en protection sont difficiles à déterminer car beaucoup de motifs de départ mêlent immigration économique et asile », souligne Matthieu Tardis, du centre « Migrations et citoyennetés » de l’Ifri. Les organisations humanitaires s’inquiètent surtout des 14 000 mineurs non accompagnés qui ont pris cette route depuis janvier. Il y a aussi les femmes nigérianes, connues pour être victimes de réseaux de traite sexuelle. Elles représentent à elles seules 42 % de l’ensemble des femmes passées par l’Italie (13 000).

Quelle politique la France et l’UE envisagent-elles ?

La France participe au programme de « relocalisation » des migrants arrivés aux portes de l’Europe. Mais sur les 39 600 qui doivent être répartis depuis l’Italie dans l’UE d’ici à la fin 2017, seuls 1 012 l’ont été, dont 231 pour la France. Le HCR voudrait que les États membres accélèrent et amplifient le mouvement.

Autre piste poussée par Bruxelles : externaliser la gestion de l’asile à d’autres pays, à l’image de l’accord signé avec la Turquie. Mais cela n’est pas sans poser des questions de droit et d’éthique. En effet, la commission s’est rapprochée du Soudan dont le président, Omar Al-Bachir, fait l’objet d’un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale. La France, de son côté, s’intéresse à une coopération avec le Niger, sur la route des migrants en provenance d’Afrique de l’ouest.

Les associations françaises ont par ailleurs réclamé jeudi dernier un « plan d’ensemble » pour répondre à la « crise humanitaire » dès la rentrée. Un dispositif d’accueil est attendu mi septembre pour désengorger Paris. Trois structures doivent ouvrir dans la capitale : un centre de jour pour orienter ailleurs les demandeurs d’asile potentiels, un lieu d’hébergement provisoire dans le nord de la ville et un site dédié aux femmes et aux enfants, dans le sud.

29/08/2016, Jean-Baptiste François

Source : La Croix

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