vendredi 22 novembre 2024 20:52

Un an après l'ouverture aux réfugiés, Merkel face à une flambée populiste

Un an tout juste après la décision de l'Allemagne d'accueillir en masse les réfugiés, deux scrutins régionaux risquent fort de se solder par une poussée de fièvre de la droite populiste aux accents de gifle électorale pour Angela Merkel.

Le Mecklembourg-Poméranie occidentale (nord-est), circonscription de Mme Merkel, se rend aux urnes dimanche pour renouveler le Parlement régional.

Hasard de calendrier, le scrutin coïncide avec le premier anniversaire de la décision de l'Allemagne et de l'Autriche le 4 septembre 2015 d'ouvrir leurs frontières à des dizaines de milliers de migrants coincés en Europe de l'Est. La capitale, Berlin, qui a le statut d'Etat-région, votera, elle, le 18 septembre pour l'assemblée locale.

Après l'arrivée d'un million de demandeurs d'asile et deux attentats revendiqués en juillet par le groupe Etat islamique, ces élections plantent, à un an des prochaines législatives, le décor pour la dirigeante conservatrice.

Malgré la popularité croissante des populistes antimigrants de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD), Mme Merkel assume sans relâche son choix de l'automne 2015, le qualifiant de "devoir humanitaire" et martelant son credo "Wir schaffen das" ("Nous allons y arriver").

Mais l'enthousiasme des Allemands accueillant dans les gares les migrants épuisés a laissé place à une réalité contrastée: celle d'un pays où la mobilisation des bénévoles reste sans équivalent mais où, parallèlement, l'inquiétude gagne du terrain.

En Europe comme en Allemagne, Mme Merkel est accusée, jusque dans son propre camp, d'avoir provoqué un appel d'air migratoire qui a déstabilisé son pays et l'UE.

Avec l'arrivée de centaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants fuyant la guerre et la pauvreté, "de nouvelles craintes" ont saisi la première économie d'Europe, faisant "dévier vers la droite" le débat politique, analyse pour l'AFP Gero Neugebauer, de l'Université libre de Berlin.

Les attentats de juillet ont achevé d'installer "la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme" en tête des préoccupations, selon un sondage de Deutschlandtrend dévoilé vendredi par la chaîne ARD.

Angela Merkel, qui a longtemps paru épargnée par l'usure du pouvoir malgré onze années à la chancellerie, voit sa popularité s'effriter: 75% en avril 2015, 45% en août 2016.

C'est pour cette raison, selon la presse, qu'elle repousse l'annonce de sa candidature à sa propre succession, en 2017. Bottant sans cesse en touche, elle promet seulement une décision "au moment opportun".
Même affaiblie, Mme Merkel reste néanmoins pour l'heure dépourvue de rival crédible. Mais un mauvais score de son parti (CDU) dans le Mecklembourg sera d'autant plus analysé que s'y trouve son fief électoral.

Au niveau fédéral et local, le paysage partisan a déjà changé avec l'entrée dans la moitié des 16 parlements régionaux de l'Alternative pour l'Allemagne, qui s'est implantée comme aucune formation de la droite populiste n'y était parvenue depuis la guerre.

Avec des sondages lui prédisant 14% à Berlin et jusqu'à 23% en Mecklembourg, l'AfD influence la ligne des partis établis, poussant certains dirigeants à durcir leur discours, y compris dans les rangs sociaux-démocrates, alliés à Mme Merkel dans son gouvernement et en chute libre dans les enquêtes d'opinion.
Le patron du Parti social-démocrate (SPD), Sigmar Gabriel a ainsi estimé que la chancelière avait "sous-estimé" l'ampleur du défi migratoire et qu'il ne suffisait pas "de répéter en permanence +Wir Schaffen das+".
Lancée au printemps 2013 sur une ligne antieuro, l'AfD n'a cessé d'épouser les craintes du moment et a adopté à l'automne dernier un discours antimigrants, transformé après la fermeture de la route des Balkans en programme anti-islam.

Mobilisant les abstentionnistes, la nouvelle formation populiste chipe aussi des électeurs sur tout l'éventail politique, de la gauche radicale de Die Linke aux néonazis, en passant par les libéraux du FDP, selon l'institut de recherche DIW.

Dans un système proportionnel, le nouveau venu a déjà à plusieurs reprises contraint les partis établis à faire preuve d'imagination pour trouver des majorités de gouvernement dans les régions, à l'image de la coalition "Verts-conservateurs" installée au printemps dans le Bade-Wurtemberg (sud-ouest).

1 sept 2016

Source : AFP

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