Donald Trump tentait jeudi de consolider sa stature d'homme d'Etat, au lendemain de sa rencontre avec le président mexicain, mais la virulence de son discours contre les immigrés clandestins tranchait avec sa volonté d'élargir sa base électorale.
S'agit-il d'une habile stratégie politique: d'un côté gagner ses galons de diplomate, tout en s'assurant la fidélité des conservateurs? Ou Donald Trump a-t-il flanché sous la pression de la droite de la droite et renoncé à modérer sa position sur l'immigration?
Son discours de mercredi à Phoenix, en tout cas, restera comme celui de la dénonciation des 11 millions de clandestins, accusés de voler les emplois des Américains et d'être, pour certains, de dangereux criminels.
Le candidat républicain à la Maison Blanche ne s'est pas engagé à expulser manu militari la totalité des sans-papiers, reconnaissant peut-être le défi logistique qu'une telle opération représenterait. La priorité sera de renvoyer les criminels et les délinquants, ainsi que les visiteurs ayant dépassé leur durée de visa et ceux qui touchent des prestations sociales, a-t-il dit, promettant des moyens supplémentaires à la police et aux frontières.
Mais il a exclu toute possibilité de régularisation, alors qu'il avait brièvement évoqué une telle option la semaine dernière. Concrètement, cela signifierait la prolongation du statu quo pour ces personnes, en majorité mexicaines, qui attendent depuis des années voire des décennies de sortir de l'ombre.
Une majorité d'Américains est pourtant favorable à une réforme migratoire. Les chefs du parti républicain, au lendemain de la défaite présidentielle de 2012, avaient également tenté de conduire le parti vers une position plus conciliante, de façon à regagner la confiance de l'électorat hispanique, mais cette ouverture avait échoué face à l'opposition des ultra-conservateurs du Tea Party.
Aujourd'hui, quelque 77% des électeurs sont favorables à une forme de régularisation des clandestins, selon un sondage Fox News paru jeudi. En juillet 2015, ils étaient 64%. Il y a quatre ans, c'était seulement une moitié.
"Il y a un assouplissement", a pourtant assuré Donald Trump jeudi dans l'émission radio Laura Ingraham Show. "Nous le faisons de façon très humaine". Il a souligné qu'une décision serait prise plus tard sur les clandestins non considérés comme une priorité, "une fois que tout est stabilisé".
Les partisans d'une réforme migratoire n'ont pas interprété son discours de la même façon.
"Nous espérions que M. Trump présente un plan concret pour stopper l'immigration clandestine future tout en offrant une solution réaliste pour ceux qui vivent ici sans statut", a réagi Todd Schulte, président de l'organisation FWD.us, fondée par Mark Zuckerberg, créateur de Facebook, et d'autres patrons de la Silicon Valley. "Malheureusement, M. Trump a échoué sur les deux tableaux".
Le discours lui a coûté une première défection: un membre d'un comité hispanique pro-Trump, Jacob Monty, selon Politico. Un autre conservateur latino pro-Trump, Alfonso Aguilar, a écrit sur Twitter s'être senti "déçu et trompé".
Chez les démocrates, on donnait la leçon aux commentateurs qui croyaient Donald Trump capable de changer.
"Il a fait un discours qui ressemble aux discours donnés au fil de notre histoire contre les Irlandais, contre les immigrés d'origine italienne, contre les juifs d'Europe de l'est. Ce seraient tous des criminels qui font des choses horribles et nous devons les expulser", a dit sur MSNBC Tim Kaine, colistier d'Hillary Clinton.
Jeudi, lors d'un discours devant la Légion américaine, une grande organisation d'anciens combattants, Donald Trump a repris le ton d'un futur commandant en chef.
1 sept 2016
Source : AFP