L'UE survivra à la "crise existentielle" suscitée par le Brexit, a certifié mercredi le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, dans son discours annuel sur l'état de l'Union, exhortant les gouvernements à résister au populisme.
"Il y a des fractures, des fissures, des fragmentations qui s'expriment parfois et cela fait le lit du populisme", a-t-il estimé devant le Parlement européen, réuni en session plénière à Strasbourg.
Mais "le populisme ne règle pas les problèmes, au contraire", a-t-il ajouté, déclenchant des applaudissements nourris. Et les railleries des europhobes: "Après vous avoir entendu, je suis heureux que nous ayons voté pour partir", lui a lancé le député britannique Nigel Farage, militant du Brexit, tandis que la députée d'extrême droite Marine Le Pen l'accusait de n'avoir "rien entendu de l'immense aspiration des peuples à retrouver leur indépendance".
Au fil de son discours programme, Jean-Claude Juncker a énuméré des "solutions concrètes" visant à ressouder une Europe divisée "entre l'Est et l'Ouest", à deux jours d'un sommet de chefs d'Etat et de gouvernement à 27, sans le Royaume-Uni, vendredi à Bratislava.
Parmi elles, le renforcement du plan d'investissement qui porte son nom, pour renforcer la croissance, et la création d'un quartier général unique dans l'UE, afin d'améliorer la coopération en matière de sécurité et de défense.
Sous pression depuis le vote sur le Brexit, il a commencé par inviter le Royaume-Uni à demander "rapidement" sa sortie de l'UE, afin de "mettre un terme aux (...) incertitudes".
Son espoir: une future "relation amicale" avec Londres, mais pas d'Europe "à la carte".
La Commission a d'ailleurs officiellement lancé mercredi un groupe de travail chargé de ces négociations, qui débutera le 1er octobre autour du Français Michel Barnier et de l'Allemande Sabine Weyand.
"Nous respectons la décision britannique tout en la déplorant, mais l'UE n'est pas menacée dans son existence par cette décision", a insisté M. Juncker.
Ce serait une "erreur fatale" de ne pas tirer les leçons du Brexit, avait déjà prévenu le président du Conseil de l'UE, Donald Tusk, pour qui le sommet de Bratislava doit constituer "un tournant décisif" sur la protection des frontières extérieures européennes face aux inquiétudes nées de la crise migratoire.
L'UE doit "s'affirmer davantage en matière de défense", a également déclaré M. Juncker, qui a plaidé pour la création d'un quartier-général unique au sein de l'UE.
"Nous devons (...) nous orienter vers des ressources militaires communes, qui dans certains cas relèveront de l'Union en pleine complémentarité avec l'Otan", a-t-il ajouté.
Sur le plan économique, il a réclamé "une Europe qui protège", plus sociale: "L'Europe n'est pas le Far West, c'est une économie sociale de marché", a-t-il résumé.
Il a ainsi promis de continuer à lutter contre le chômage, notamment des jeunes, proposant pour cela, non seulement d'accélérer l'Union des marchés des capitaux, mais aussi de doubler la capacité du plan d'investissement qui porte son nom, lancé en 2014 pour stimuler la croissance.
Nouvel objectif: 630 milliards d'euros d'investissements dès 2022.
Le chef de l'exécutif européen a par ailleurs annoncé deux importants projets de réforme, sur les télécoms et les droits d'auteurs, avec plus de trois millions d'emplois à la clé.
Pas "fanatique du libre-échange", il a cependant appelé à poursuivre les accords commerciaux avec des pays tiers, qui "apportent plus d'emplois", malgré l'impasse actuelle des négociations, très critiquées, avec les Etats-Unis.
Enfin, il a évoqué un nouveau projet calqué sur le "plan Juncker", mais orienté vers l'Afrique et le Moyen-Orient.
L'objectif sera de lever au moins 44 milliards d'euros, chiffre qui pourra atteindre 88 milliards en fonction de la participation des Etats membres, afin de s'attaquer "à l'une des causes profondes de la migration".
14/09/2016
Source : AFP