vendredi 22 novembre 2024 16:30

Immigration : l'OCDE appelle à sortir des discours "abstraits" pour contrer le populisme

Les arrivées de migrants ont augmenté de 10% en 2015 dans les pays développés, selon l'OCDE qui a appelé lundi leurs gouvernements à sortir des discours "abstraits" pour lutter contre les crispations croissantes de leurs opinions publiques.

Environ 4,8 millions de personnes ont immigré dans les pays les plus industrialisés l'an dernier, selon un rapport de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publié le jour où l'ONU organise son premier sommet consacré aux migrations.

Parmi elles, les demandeurs d'asile ont représenté 1,65 million de personnes, dont "environ 1,3 million" en Europe, un afflux record qui a nourri la poussée de partis d'extrême droite, en Autriche, Allemagne, France ou encore Hongrie.

De l'autre côté de l'Atlantique, surfant lui aussi sur les peurs que génèrent ces flux, le candidat républicain à la Maison Blanche Donald Trump promet de construire un mur à la frontière avec le Mexique et d'expulser une grande partie des sans-papiers.

"La confiance des citoyens dans la capacité de leur gouvernement à gérer les migrations tend à s'effriter", et dans de nombreux pays "une part croissante de la population adhère aux discours extrêmes rejetant l'immigration", regrette Stefano Scarpetta, directeur de l'emploi, du travail et des affaires sociales à l'OCDE, en introduction du rapport.

Pour lui, les études montrant "les effets positifs à moyen et long terme" des migrations sur l'économie restent des arguments "abstraits", qui ne font "que prêcher des convaincus", et le message "ne porte pas".
Les inquiétudes de l'opinion publique sont connues, que liste l'OCDE: des migrations hors de contrôles, qui ne profiteraient qu'aux riches, aggraveraient la pression sur les services au niveau local "au détriment des populations déjà installées"...

Sur ce point, l'organisation souligne que les études se sont surtout intéressées à l'échelon national, "bien que l'impact soit principalement ressenti au niveau local". Et il faut reconnaître "que l'impact de la migration n'est pas le même pour tout le monde", estime M. Scarpetta.

D'abord parce que les immigrés se concentrent presque toujours dans des régions "souvent les plus défavorisées", où ils peuvent concurrencer la main d'oeuvre locale peu qualifiée. .

Ensuite parce qu'ils utilisent les services publics. Transports, écoles.... "les infrastructures locales peuvent être mises sous pression par des flux importants", reconnaît l'OCDE.

C'est pourquoi "les gouvernements doivent trouver de meilleurs arguments, plus tangibles, afin de contrer les voix anti-immigration", martèle M. Scarpetta. Sans quoi "à terme, cela ne ferait qu'encourager le populisme, déjà très véhément".

Ils doivent notamment veiller à ce que les employeurs n'embauchent pas au noir ces migrants.

Jean-Christophe Dumont, chef du département "Migrations" à l'OCDE, plaide pour "écouter les préoccupations des gens (...) expliquer quelles dynamiques la migration peut amener", pour la survie des classes dans les écoles ou la création d'emplois par exemple.

Certains pays l'ont bien compris, comme l'Allemagne, qui a développé "une approche collective de la question", ou encore le Canada où "tout un effort est fait en amont dans les communautés pour anticiper l'accueil des migrants".

L'autre grand défi est "l'intégration" des migrants, a ajouté le secrétaire général de l'OCDE Angel Gurria au lancement du rapport à Paris, en appelant les pays d'accueil à mieux repérer les compétences professionnelles des exilés et à mettre davantage de moyens sur leur formation linguistique .

Aujourd'hui, il faut environ 20 ans à un migrant pour avoir les mêmes chances qu'un ressortissant du pays d'accueil sur le marché du travail, note l'OCDE.

L'OCDE appelle aussi à des solutions globales face à ce défi mondial, et lance plusieurs pistes: coopération renforcée entre les pays, "modulation des droits et des devoirs" en fonction de la durée de séjour octroyée aux réfugiés, voire critères de sélection des réfugiés, qui pourrait même prendre la forme d'un "tirage au sort" parmi les personnes enregistrées par le Haut commissariat aux réfugiés (HCR).
"Cela dissuaderait probablement les candidats à recourir aux filières clandestines", note le rapport.

19/09/2016

Source : AFP

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