Les représentants de dix pays européens parmi les plus concernés par la crise des réfugiés se sont rencontrés samedi à Vienne pour discuter des moyens de resserrer leur coopération et rapprocher leurs points de vue pour une gestion efficace de cette problématique migratoire, sans précédent depuis la seconde guerre mondiale.
Outre la chancelière Allemande Angela Merkel et le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, ce mini-sommet a mis en présence les chefs de gouvernement slovène, croate, serbe, albanais, hongrois, bulgare, macédonien ainsi que le ministre de l’intérieur roumain, Dragos Tudorache. Et du côté de l’Union européenne, le président du Conseil européen, Donald Tusk et le commissaire européen à la migration et aux affaires intérieures, Dimitris Avramopoulos.
Dans une déclaration à la presse peu avant l’entame des discussions, M. Tusk a noté que la fermeture de la route des Balkans a permis de stopper l’afflux des migrants, plaidant pour une consolidation de la coopération avec la Turquie alors que M. Avramopoulos a déploré un déficit de solidarité européenne face à cette crise, disant que le devoir de solidarité et l’exigence de la responsabilité ne s’imposent pas uniquement d’un point de vue moral mais par la force juridique des traités européens.
Une solidarité également souhaitée par le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, présent cette fois-ci alors qu’il n’avait pas été invité lors d’un sommet similaire organisé en février dernier à Vienne, débouchant à la fermeture en mars dernier de la route des Balkans, ce qui a provoqué une brouille diplomatique entre l’Autriche et la Grèce.
Tout en estimant qu’il convient d’urgence d’étoffer le personnel européen affecté en Grèce pour porter assistance aux services grecs de l’asile débordés par le traitement des procédures, il a souligné la nécessité de pérenniser l’accord sur les migrants conclu le 18 mars dernier entre l’Union européenne et la Turquie, lequel accord risque de tomber à l’eau si les ressortissants turcs ne bénéficient pas de l’exemption promise de visas dans l’espace Schengen.
Pour le chancelier autrichien, Christian Kern, promoteur de ce sommet, il s’agit avant tout de parvenir à un nouvel accord sur les moyens de protéger les frontières en Europe en renforçant les chances d’aboutir à une décision européenne commune qui transcende les intérêts nationaux. Pour se faire, il a plaidé pour un renforcement de la surveillance des frontières extérieures de l'Union européenne, une aide à la prise en charge des réfugiés dans les pays voisins de leur pays d’origine et aussi un "plan Marshall" pour l’Afrique, principal émetteur des migrants économiques qui s’ajoutent aux centaines de milliers de réfugiés fuyant la guerre en Syrie.
Il a également appelé, dans des déclarations à la presse, à la mise en œuvre avant la fin de l’année d’un programme européen de coopération avec l'Egypte, la Jordanie et le Liban, pour fixer dans ces pays les syriens déplacés.
Quant à la chancelière allemande, Angela Merkel, naguère surnommée par la presse allemande "Mère Angela" en référence à Mère Teresa pour sa politique de portes ouvertes en faveur des réfugiés, elle a souligné la nécessité de lutter efficacement contre l’immigration illégale, appelant à accélérer la procédure de rapatriement des demandeurs d’asile déboutés dans leurs pays d’origine, en Afrique du Nord, au Pakistan et en Afghanistan.
"Nous voulons stopper l'immigration clandestine tout en étant à la hauteur de nos responsabilités humanitaires’’, a-t-elle déclaré à la presse, jugeant que le système de relocalisation des réfugiés en Europe au départ de la Grèce et de l’Italie est encore "trop lent".
Ce sommet tenu sous haute surveillance policière avec aussi une interdiction d’accès près des lieux de la réunion dans le quartier administratif au premier arrondissement, a été aussi marqué par un rassemblement à l’appel d’organisations de droits de l’homme et d’aide aux réfugiés qui ont scandé des slogans en faveur d’une politique migratoire à visage humain, se disant alarmés par la situation dramatique des demandeurs d’asile bloqués en Grèce, plus de 60.000 personnes.
Un sommet, au final, qui est loin d’apporter une solution européenne commune mais il constitue, néanmoins, une étape vers l’aboutissement à cet objectif comme l’a fait d’ailleurs remarquer le chancelier autrichien, prudemment optimiste. Et pour cause, les positions et les intérêts des pays confrontés à l’afflux des migrants restent pour le moment inconciliables. Ce qui a poussé les dirigeants de certains pays à prendre des mesures unilatérales comme le Premier ministre hongrois, Victor Orban, défenseur imperturbable d’une ligne hostile aux migrants, qui a totalement fait grillager les frontières de son pays avec la Serbie et la Croatie.
De même, le gouvernement autrichien, redoutant un éventuel afflux massif des migrants comme l’année dernière avec plus de 90.000 demandeurs d’asile en Autriche, affiche une fermeté sans concession dans le traitement de cette crise, renforçant les contrôles aux frontières et établissant unilatéralement un plafond de 37.500 réfugiés pour l’année 2016, au grand dam de la Commission européenne à l'annone le 20 janvier dernier de cette mesure.
Pour le moment, il n’y a pas feu à la maison. Le nombre des demandeurs d’asile admis en Autriche depuis le début de l’année à fin août dernier se chiffre à 26.419 personnes, selon les derniers chiffres du ministère de l’intérieur. Mais, le gouvernement examine déjà la possibilité d’activer le décret d’urgence, lequel texte prévoit de refouler les réfugiés sans même leur donner la possibilité de déposer une demande d’asile et ce, au motif d’atteinte à la sécurité et l’ordre dans le pays.
24/09/2016
Source : MAP