Sarkozy n'avait pas le monopole du durcissement des lois sur l'immigration. François Fillon, aussi, entend la maîtriser drastiquement.
« Rompre avec le laxisme en matière d'immigration », c'est le mot d'ordre de François Fillon, qui n'a pas laissé à Nicolas Sarkozy le monopole des propositions sur ces thèmes. Alain Juppé, non plus, n'est pas en reste. La droite durcit ses positions et estime dorénavant que la France ne peut plus accueillir 200 000 migrants légaux hors Union européenne par an. En effet, François Fillon estime que la démographie française suffit en soi à alimenter le monde du travail et, par conséquent, à financer notre modèle social (le paiement des retraites), à condition bien sûr que le chômage reflue.
L'homme de la Sarthe agit donc sur plusieurs leviers : une politique familiale plus généreuse pour maintenir la démographie, un choc de compétitivité et un assouplissement des règles du travail pour relancer l'emploi et une maîtrise des flux migratoires. Cela pourrait être résumé par un slogan : la France aux travailleurs français !
Quotas
Fillon n'a pas éprouvé le besoin d'utiliser ses formules simplistes et, en vérité, outrancières pour se définir sa politique. Elle repose sur un principe fort qui exigera une modification constitutionnelle (par référendum ?) afin d'inscrire dans la loi fondamentale que l'immigration doit dorénavant « dépendre de la capacité d'accueil et d'intégration de la France ». Comme Juppé, il reprend l'idée de faire voter chaque année par le Parlement une limite annuelle de migrants admissibles et leur provenance. Cela exigerait de réorganiser notre réseau consulaire dans le monde à l'image des Canadiens.
Mais le candidat Fillon va plus loin que son adversaire de la primaire. Il précise, dans ce cadre, que les statistiques ethniques de la population française devront être légalisées. Au-delà du caractère polémique de cette proposition, cela signifierait que, pour établir le quota de migrants autorisés à entrer dans notre pays, les autorités tiendraient compte du nombre de Français issus de l'immigration déjà installés. Une véritable bombe qui nécessiterait, là encore, de réviser la Constitution.
Une réforme de l'aide médicale d'État
Chez Fillon, le regroupement familial sera conditionné à « une perspective d'intégration » (chez Juppé, le demandeur devra justifier de revenus d'un travail suffisants). L'aide médicale d'État (1 milliard d'euros par an) sera aménagée en « dispense de frais de santé limitée », hormis pour les mineurs. Et réservée aux seuls soins d'urgence et aux maladies contagieuses. Un contrôle strict sera mis en place et cette dispense ne sera délivrée que dans les hôpitaux publics ou des établissements agréés et sous réserve d'un examen des titres de séjour, de sorte que les clandestins malades, une fois soignés dans l'urgence, seront effectivement renvoyés du territoire national. L'accès aux principales prestations sociales françaises sera conditionné à une résidence régulière de deux ans sur le territoire français.
Les procédures trop longues du droit d'asile seront écourtées à 6 mois. Cela exigera de doter l'Ofpra de quelques moyens supplémentaires, mais sans doute de réduire les nombreuses possibilités de recours qui, de fait, actuellement allongent à 5 ans l'examen des procédures.
Les demandeurs d'asile ne seront plus laissés libres dans la nature, mais devront « résider dans des centres dédiés ». Autrement dit, ils doivent pouvoir rester à la disposition des autorités administratives afin que les OQTF (obligations de quitter le territoire) puissent être valablement mises en oeuvre. C'est ce que Fillon appelle « mettre en oeuvre une politique volontariste d'éloignement du territoire ».
Le droit du sol ne serait plus automatique dans l'acquisition de la nationalité française. Le jeune né en France de parents étrangers devrait en faire la demande à sa majorité.
22/11/2016, Emmanuel Berretta
Source : Le Point