Le Mexique a commencé à hausser le ton contre une loi promulguée, vendredi dernier dans l'Etat américain d'Arizona, qui "criminalise" la migration clandestine, majoritairement mexicaine, et autorise les contrôles d'identité aléatoires pour débusquer d'éventuels "sans-papiers".
La réaction la plus remarquée, lundi, est venue du Président mexicain, Felipe Calderon, qui a "condamné" dans des termes peu diplomatiques la nouvelle loi en Arizona, qui ouvre grandes les portes à "la haine, la discrimination raciale, l'intolérance et les abus''.
Il a promis de défendre "avec tous les moyens en sa possession" la dignité et les intérêts de ses concitoyens établis en Arizona, affirmant que cette situation adverse, qui "nous emplit de tristesse", doit être un "stimulant" pour s'unir et s'organiser de manière ordonnée.
La première volée de bois vert mexicaine était venue, vendredi, quelques heures seulement après la promulgation par la gouverneure d'Arizona, Jan Brewer (Républicaine), de la nouvelle loi controversée destinée, selon elle, à "protéger tous les citoyens d'Arizona et tous ceux qui résident légalement dans notre Etat".
La ministre mexicaine des Affaires Etrangères, Patricia Espinosa, avait indiqué que cette loi oblige le Mexique à revoir ses relations de coopération avec l'Arizona et n'hésitera pas à défendre "la dignité" de ses citoyens émigrés dans cet Etat du sud des Etats-Unis.
Le nouveau texte "affecte la relation entre Arizona et le Mexique et oblige le gouvernement mexicain à revoir la viabilité et l'utilité des schémas de coopération développés avec Arizona", a affirmé Espinosa, regrettant le peu de cas que fait cette loi de "l'immense" contribution des migrants mexicains à l'économie et la culture dans cet Etat américain.
Faisant écho à d'autres responsables officiels, le ministre de la santé, José Angel Cordova, a qualifié "d'abominable" le nouveau texte qui "viole" les droits humains des migrants en légalisant le délit de faciès.
La présidence du Sénat et les responsables des Commissions des Affaires Etrangères des deux chambres du Parlement mexicain se sont élevés contre cette nouvelle loi "inacceptable, comble de la xénophobie et de la haine".
Ces responsables parlementaires ont plaidé pour "une réponse ferme" du gouvernement mexicain face à cette situation.
Des appels ont été lancés pour le boycott des produits venus d'Arizona, voire la fermeture pure et simple de la frontière avec cet Etat, ou le report/annulation des voyages des Mexicains dans cette région frontalière.
A ce propos, le Parti Action Nationale (PAN) du président Calderon, a appelé les Mexicains à ne pas visiter l'Arizona, en représailles contre cette nouvelle législation, qui devrait "faire honte" aux Américains.
Le Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI-opposition) a estimé que la nouvelle législation en Arizona s'inscrit dans une surenchère "électoraliste" qui ferait les yeux doux à un secteur particulier de l'électorat de droite en Arizona.
Cette onde de rejet a atteint l'Ombudsman mexicain, Raul Plascencia, qui s'est dit mobilisé pour surveiller "24 heures sur 24" d'éventuelles violations des droits humains des migrants mexicains par la police américaine.
De même, l'église catholique, une institution très puissante au Mexique et auprès des 11 millions de migrants mexicains aux Etats Unis, a critiqué cette loi "injuste" qui doit être combattue de manière "intense et efficace" par les autorités mexicaines.
Les premiers effets de la réaction mexicaine se sont faits sentir par les compagnies aériennes desservant Arizona, qui ont reconnu que le trafic aérien a été "affecté de manière significative" par la nouvelle loi criminalisant les migrants clandestins.
La presse mexicaine, pour sa part, a durement attaqué cette nouvelle loi d'Arizona qui "criminalise l'apparence latine" et autorise la police d'interroger indistinctement les personnes "soupçonnées" d'être des "sans papiers".
La polémique sur cette loi est exacerbée par un climat délétère dans les relations mexico-américaines, à cause de la recrudescence de la violence des cartels de la drogue contre les forces de sécurité mexicaines, attribuée par Mexico à l'armement sophistiqué acquis illégalement sur le territoire américain et introduit au Mexique.
Ce climat a été résumé, lundi, par le maire de Mexico, Marcelo Ebrard, qui a estimé que le flux des armes en provenance des Etats-Unis "déstabilise" le Mexique.
Source : aufait/MAP