Le gotha des intellectuels marocains a été sollicité, à l'occasion d'une rencontre organisée dernièrement à Rabat par le ministère de la Culture, pour faire la radioscopie de la situation culturelle au Maroc.
Animée par M. Driss Ksikes, cette rencontre inaugurale d'une série de conférences thématiques, a connu la participation des professeurs Ahmed Boukous, Abdellah Saâf, Abdelillah Belkeziz, Abdelhaï El Mouaden, Kamal Abdellatif, Mohamed El Ayadi et le ministre de la Culture, M. Bensalem Himmich.
Se référant aux conclusions qui se dégagent du rapport du Cinquantenaire de l'indépendance, en ce qu'il fait valoir la diversité culturelle du Maroc, le pr. Mohamed El Ayadi a appelé à mobilisation pour la sauvegarde du patrimoine culturel oral et architectural, qui risque de sombrer dans l'oubli.
Selon M. El Ayadi, le rôle du ministère de la culture ne doit pas se limiter au soutien et au parrainage des activités culturelles, mais doit inclure l'encouragement d'autres activités visant la sauvegarde et la mise en valeur du patrimoine architectural et des traditions vestimentaires.
Abondant dans le même sens, le pr. Kamal Abdellatif a relevé la richesse de la culture marocaine, un creuset qui offre tout un spectre de nuances, de variantes et de tendances.
Pour l'accompagnement du changement qui s'adosse sur un discours politique clair en matière de consécration des valeurs démocratiques, a-t-il dit, il y a lieu de promouvoir "une culture citoyenne", valorisant l'action sociale et les choix modernistes.
Les phénomènes de société suscitent l'intérêt et de la curiosité des intellectuels, a-t-il ajouté, rejetant l'idée de circonscrire la vie culturelle dans le cadre d'une charte, car la culture et la création artistique se nourrissent de la liberté et ne s'accommodent pas du confinement dans un espace restreint.
Pour sa part, le pr. Abdelillah Belkziz a estimé qu'il aurait été préférable, au préalable, de tenir une réunion préparatoire avant le lancement de ce cycle de conférences, pour baliser le terrain aux thématiques culturelles qui seront débattues.
" Il est temps de doter le Maroc d'un Conseil supérieur de la culture qui veille à la gestion du secteur culturel ", a-t-il dit, précisant que ce conseil aura aussi pour tâche d'élaborer les stratégies et les programmes d'action en collaboration avec ses partenaires, notamment le Ministère de la Culture et l'Union des écrivains du Maroc.
Il s'est également félicité de la dynamique que connait le champ culturel qui gagne en maturité grâce au climat de liberté de pensée prévalant au Maroc.
Selon M. Belkziz, le ministère de la culture n'est pas responsable de la production culturelle, mais il lui incombe de favoriser la création du climat propice à l'épanouissement culturel.
Le pr. Abdallah Saâf a, lui, abordé ce sujet, partant du rôle joué par l'Etat qui consiste à élaborer des politiques culturelles, et de la diversité culturelle qu'il conviendrait, selon lui, de qualifier de "diversité sociologique ", car en rapport avec les nouvelles tendances de la société marocaine.
Il a mis l'accent, également, sur le rôle central et stratégique de l'Etat dans la gestion de la chose culturelle, vu que la culture est un espace d'expression de la diversité politique, ajoutant que parmi les missions du ministère de la culture figurent la mise en place du climat propice à la dynamique culturelle et les taches de soutien et de mise en branle de "l'action culturelle directe".
Pour sa part, M. Boukous a appelé à mettre en place une stratégie culturelle, à l'instar du Plan Azur destiné à la promotion du tourisme, préconisant que cette stratégie soit gérée de "manière rationnelle" avec l'objectif de préserver l'identité nationale.
Le débat autour du domaine culturel ne concerne pas seulement les spécialistes mais constitue "une question intéressant tout le monde", a-t-il dit, mettant en relief la diversité culturelle et les différentes formes d'expression culturelle (théâtre, littérature, cinéma) qui ne se voient pas aujourd'hui, selon lui, suffisamment mises en valeur, tant aux plans quantitatif que qualitatif.
Pour sa part, Abdelhay Moudden a souligné la vocation du ministère de la culture en tant qu' "institution", affirmant que son rôle consiste aussi à soutenir Les différents affluents (édition et distribution), et ce, en partenariat avec les acteurs concernés, notamment ceux du secteur privé.
Il a indiqué que la mission du ministère consiste en principe à encourager le débat, l'échange et la délectation culturelle et à mettre en valeur les différents genres de la création culturelle, en plus du soutien aux cultures de "la marge" et à la liberté de création.
Le ministre de la Culture avait affirmé, dans une allocution prononcée à l'ouverture de cette rencontre (organisée dans l'enceinte de la Bibliothèque nationale du Royaume), que son département est "un contenant et une structure «œuvrant en collaboration avec les intellectuels afin d'assurer le rayonnement de la culture marocaine tant aux plans intérieur qu'extérieur.
Initiée par le ministère de la Culture pour faire la radioscopie de la situation culturelle au Maroc, cette rencontre a constitué une occasion pour dresser un état des lieux sommaire du fait culturel, en prélude à un examen exhaustif lors des prochaines rencontres.
Le ministre a émis le vœu que cette rencontre soit un "espace" pour "l'interaction féconde des idées afin que la lumière rejaillisse sur tout le paysage culturel", ajoutant que "l'œil des intellectuels devrait être scrutateur pour mettre le doigt sur les dysfonctionnements en proposant des solutions appropriées dans le cadre de la concertation et de l'échange".
Source : MAP