Les Marocains résidant à l’étranger vivant dans les pays les plus impactés par la crise, notamment en Italie et l'Espagne, subissent de plein fouet les effets d'une conjoncture économique difficile.
Adil est un casablancais qui vient de rentrer au Maroc pour retrouver sa famille après un bon bout de temps passé en Italie. C'est un congé sans limite dans le temps que ce jeune vient de prendre. Du moins, jusqu'à ce que l'économie italienne atteigne la reprise tant promise par les responsables dans ce pays et qui tarde apparemment à venir. Lorsque Adil achète un contrat de travail voilà plus de cinq ans, il croyait dur comme fer que son rêve d'acquérir une voiture neuve et de construire une maison pour lui et sa famille allait enfin devenir une réalité. Mais au fil du temps, il a compris que ses rêves allaient rester encore des rêves jusqu'à nouvel ordre. Tout comme ce jeune, de nombreux marocains vivant en Italie et en Espagne, deux pays les plus touchés dans le vieux continent au côté du Portugal et de la Grèce, ont subi de plein fouet les résultats de graves problèmes financiers qui ont secoué quasiment toutes les économiques mondiales.
En Espagne par exemple, des chiffres non officiels estiment le nombre des Marocains qui seront rentrés au Maroc à près de 150.000 personnes. Selon des informations de l'association des travailleurs immigrés marocains en Espagne (ATIME), relayés par des médias espagnols et marocains, depuis le début de 2009, entre 130.000 et 150.000 immigrés marocains ont quitté l'Espagne principalement en raison de la situation de chômage dans laquelle de nombreux ressortissants marocains se sont retrouvés après la crise. Pire encore, l'ATIME, citée par l'agence Maghreb arabe presse estime que pas moins de 43% des Marocains établis dans ce pays ibérique sont sans emploi. Autrement, Sur une communauté évaluée à 758.900 ressortissants marocains en Espagne, 350.000 personnes ne trouvent pas de travail depuis au moins plusieurs mois. Même l'immigration saisonnière de la main d'œuvre marocaine n'a pas échappé aux dommages de la crise. L'on se rappelle tous des informations largement relayées par les médias espagnoles sur la décision du gouvernement autonome de l'Andalousie de renoncer à la main d'œuvre marocaine saisonnière composée essentiellement de femmes dans le secteur de l'agriculture.
Même si les chiffres sur l'ampleur du retour des immigrés n'émanent pas d'une source officielle espagnole, leur véracité peut être recoupée avec l'aide des statistiques sur les transferts des marocains du Monde. Exception faite des pays comme la France, l'Allemagne et la Belgique, les transferts des marocains du monde ont connu des baisses variables en 2009. Et les plus fortes baisses ont été relevées en Espagne et en Italie où les transferts ont baissé respectivement de 25% et 10%. Deux autres pays européens ont connu des baisses notamment en Hollande (8,7%) et en Grande Bretagne (12,9%).
Plus globalement, les transferts en provenance des pays accueillant des communautés relativement importantes de Marocains ont baissé. En 2008, le volume des transferts des MRE avait atteint 53.072 millions de dirhams(en baisse par rapport à 2007 avec 55.000 millions de dirhams). En 2009, les transferts allaient continuer leur trend baissier avec un volume de 50.273 millions de dirhams. Ces chiffres montrent bien que les immigrés marocains sont en difficulté. Ces derniers n'ont eu d'autres choix que de rentrer au bercail en attendant des jours meilleurs. «De nombreuses personnes sont revenues au Maroc parce qu'ils ne trouvaient pas de travail en raison de la crise. Il est très difficile de vivre dans un pays européen sans avoir la moindre source de revenu. Ceux qui sont restés ne pouvaient pas rentrer au Maroc puisqu'ils se trouvent en situation irrégulière ou n'ont pas encore renouvelé leur permis de séjours», explique Adil. Et de poursuive : «Rentrer bredouille dans son pays d'origine est une décision difficile à prendre. Seules des conditions comparables à ce que nous avons vécu peuvent pousser une personne à prendre une position pareille».
Si les effets de la crise sont perceptibles dans toute l'Europe. Ce sont surtout les populations immigrées qui en pâtissent le plus particulièrement dans les pays où l'immigration marocaine est récente. En effet, l'Italie et l'Espagne sont deux pays qui n'ont recommencé à accueillir les immigrés marocains qu'à partir des années 90, une époque où d'autres pays comme la France avaient déjà commencé à verrouiller leurs portes d'entrée face à l'immigration provenant des pays du Sud et ce plusieurs années à l'avance. Ce sont ces communautés qui ont été fortement impactés par la crise. Il faut dire également que d'autres éléments ne jouant pas en faveur des immigrés marocains sont entrés en jeu. En effet, depuis l'entrée en Union européenne de certains pays de l'ancien bloc communiste, la concurrence sur certains métiers pratiqués majoritairement avant par des ouvriers issus de l'immigration, est devenue acharnée. Surtout par les Roumains ,dont le pays vient d'intégrer l'UE quelques années auparavant seulement, et qui ont immigré vers d'autres pays de l'espace Schengen. Ainsi, la communauté roumaine est devenue la première communauté immigrée en Espagne devant la communauté marocaine avec 793.205 personnes. Une première…
Le gouvernement marocain a mis en place un dispositif pour venir en aide aux ressortissants marocains en Europe. Un dispositif qui a pour principal but de trouver des solution au tout au moins aider dans la résolution des problèmes juridiques et administratifs que peuvent rencontrer les marocains dans leur pays de résidence.
Dans ce sens, le ministère délégué chargé de la communauté marocaine à l'étranger, a initié, au sein de ses structures, un dispositif de veille juridique et administrative dont le but est d'écouter, d'orienter les MRE. Il s'agit d'une expérience menée en coordination avec Diwan Al Madhalim. A noter que des rencontres qui avaient pour thème la crise économique et protection des droits des MRE ont été organisées à l'occasion de la journée nationale de la communauté marocaine établie à l'étranger. Le but de ces rencontres était d'élargir le débat sur les moyens et les dispositifs susceptibles de préserver les droits des MRE en terre d'accueil.
Source : Le Matin