La France, critiquée pour sa politique d'expulsions de Roms, estime n'avoir "pas de leçons à recevoir", alors que s'est poursuivi vendredi le renvoi de Roumains et de Bulgares vers leur pays, motivé par la lutte contre l'insécurité, après des vols très médiatisés jeudi.
Un groupe de 124 Roms est arrivé à l'aéroport de Timisoara, dans l'ouest de la Roumanie, selon les chiffres communiqués par la police aux frontières roumaine.
Dans la soirée, un premier groupe de treize Roms bulgares reconduits de France est pour sa part arrivé à Sofia. "Il ne s'agit pas d'un rapatriement, mais d'un retour volontaire", a précisé à l'AFP la porte-parole du ministère bulgare des Affaires étrangères, Vessela Tcherneva.
Le ministre français de l'Immigration, Eric Besson, avait annoncé que 139 Roms de Roumanie seraient expulsés par un vol depuis Paris vendredi, après le renvoi jeudi de 86 personnes vers la Roumanie, le premier depuis l'annonce fin juillet par Nicolas Sarkozy de mesures sécuritaires ciblant les immigrés.
A Timisoara, les rares expulsés qui ont accepté de parler n'ont pas caché leur colère et leur envie de "repartir en France" pour échapper à la pauvreté.
Face à la montée des critiques, Paris a défendu sa politique.
"La France est le pays d'Europe le plus respectueux en matière de droits des étrangers et notamment des étrangers en situation irrégulière, ou - soyons plus modestes - l'un des pays les plus respectueux, donc nous n'avons pas de leçons à recevoir", a ainsi assuré Eric Besson.
D'ici la fin du mois d'août, le nombre des personnes reconduites devrait atteindre "à peu près 850", a-t-il précisé.
Ces expulsions ne sont, selon le gouvernement, qu'une accélération d'un processus à l'oeuvre depuis des mois, puisque plus de 25 vols de ce genre ont eu lieu depuis le début de l'année.
Les Roms seraient 15.000 en France, où ils vivent souvent dans des squats. Le gouvernement les accuse d'exploiter leurs enfants à des fins de mendicité et de trafics, tandis que l'opposition dénonce un "racisme officiel".
En Roumanie, la politique française passe mal. "J'ai le sentiment que l'on stigmatise un groupe dans son ensemble. C'est contraire à la tradition française de respect des droits de l'Homme", a déclaré au journal Le Parisien Valentin Mocanu, secrétaire d'Etat à la Solidarité, chargé du dossier des Roms.
La presse roumaine a aussi dénoncé une "hypocrisie" française.
Paris et Bucarest se rejoignent cependant pour demander davantage de mobilisation de l'Union européenne.
Le ministre français de l'Intérieur, Brice Hortefeux, "attend que la Commission européenne démontre toute sa valeur ajoutée dans l'accès des Roms à l'éducation, à l'emploi et au logement par exemple", alors que le président roumain Traian Basescu a réclamé un "programme européen d'intégration".
Mais Bucarest se voit reprocher à Bruxelles de ne pas présenter de projets concrets pour utiliser les aides massives disponibles depuis l'adhésion de la Roumanie à l'UE.
La France n'est pas le seul pays européen à faire face à la question rom et à pratiquer des expulsions, mais Nicolas Sarkozy a choisi de médiatiser fortement ces actions et a fait un lien entre immigration et insécurité.
"Les évacuations de camps roms en France et leurs expulsions de France et d'Allemagne risquent d'attiser les sentiments racistes et xénophobes en Europe", a averti vendredi le président de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, le Turc Mevlüt Çavusoglu.
Un responsable du Vatican a également critiqué la politique française. "Les expulsions en masse de Roms vont à l'encontre des normes européennes", a déclaré à l'AFP le secrétaire du Conseil pontifical pour les migrants et les gens du voyage, Agostino Marchetto.
Source : La Croix/AFP