samedi 23 novembre 2024 05:35

France : Les principales mesures de nouveau projet de loi sur l’immigration

La machine législative est lancée. Eric Besson, ministre de l’Immigration, a rendu public hier l’amendement gouvernemental sur la déchéance de la nationalité pour les Français meurtriers de policiers et gendarmes, naturalisés depuis moins de dix ans. Cette disposition sera incluse dans le projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité qu’Eric Besson présentera au Parlement, à partir du 27 septembre, et déjà dénoncé par les associations de défense des droits de l’homme.

L’extension des possibilités de déchéance de nationalité

Aujourd’hui, l’article 25 du code civil prévoit que «l’individu qui a acquis la qualité de Français peut, par décret pris après avis conforme du Conseil d’Etat, être déchu de la nationalité française, sauf si la déchéance a pour résultat de le rendre apatride». Les motifs de dénaturalisation sont «l’atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation», le terrorisme, et les actes «préjudiciables aux intérêts de la France».C’est le gouvernement Juppé, par la loi du 22 juillet 1996, qui avait inclus le motif de terrorisme. Le Conseil constitutionnel avait jugé cette disposition légale. Tout en posant le principe selon lequel «au regard du droit de la nationalité, les personnes ayant acquis la nationalité française et celles auxquelles la nationalité française a été attribuée à leur naissance sont dans la même situation», il avait jugé que cet amendement «au regard de l’objectif recherché par le législateur, soit le renforcement de la lutte contre le terrorisme», n’était pas «contraire au principe d’égalité».

Aujourd’hui, un fonctionnaire ou un élu peut également perdre sa nationalité s’il est convaincu de concussion (malversation), corruption et trafic d’influence ou espionnage. La loi Guigou de 1998 a maintenu ces possibilités, tout en stipulant que la déchéance ne peut être prononcée si elle rend un individu apatride. Seuls les binationaux sont concernés. D’après le ministère de l’Immigration, il n’y en a pas eu depuis 2006. Et pas plus d’une trentaine depuis le début de la décennie.

la Stigmatisation des Roms et des gens du voyage

La polémique a démarré lorsque Nicolas Sarkozy a annoncé le 21 juillet la convocation, la semaine suivante, d’une réunion «sur les problèmes que posent les comportements de certains parmi les gens du voyage et les Roms». Dans cette déclaration, le Président promettait «les expulsions de tous les campements en situation irrégulière». Ont suivi les démantèlements de camps et des expulsions de ressortissants roumains et bulgares, les Roms n’étant pas les seuls visés. Depuis, la controverse n’a pas cessé. Fin août, le Comité de l’ONU pour l’élimination de la discrimination raciale (Cerd) accusait la France de pratiquer les renvois «collectifs» de ressortissants roumains et bulgares. Or, le droit européen n’autorise que les expulsions «individuelles». «Ce ne sont pas des reconduites collectives, mais des reconduites individuelles», a répondu Besson. La France a également été accusée de faire pression sur les Roms pour qu’ils acceptent de rentrer chez eux «volontairement», en échange d’un petit pécule : 300 euros par adulte, 100 par enfant. Plus de 8 300 Roms ont été renvoyés entre le 1er janvier et la fin août. D’après Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur, «88 camps ont été démantelés».

le Recul des droits des étrangers

Besson l’avait annoncé : son projet de loi comprendra des amendements sanctionnant «l’abus du droit au court séjour». En théorie, les ressortissants de l’UE peuvent séjourner trois mois dans tous les Etats sans formalité. Mais le ministre de l’Immigration accuse les Roms de «faire une noria pour échapper à la législation sur les courts séjours». En clair, de multiplier les allers et retours entre leur pays et la France. Un autre amendement, a-t-il annoncé hier, permettra la reconduite dans leur pays d’origine de ceux «qui représentent une charge déraisonnable pour notre système d’assistance sociale». Un troisième amendement visera les «auteurs d’actes répétés de vols ou de mendicité agressive».

Ce texte, le deuxième depuis l’élection de Sarkozy, réduit aussi les droits des étrangers en situation irrégulière : à l’avenir, une personne placée en centre de rétention devra attendre cinq jours, au lieu de quarante-huit heures aujourd’hui, avant de comparaître devant le juge des libertés et de la détention, dont le rôle est essentiel puisqu’il se prononce sur la légalité des conditions d’interpellation. Pendant ces cinq jours, le juge administratif aura le temps de statuer sur la légalité de la mesure d’expulsion, voire de la mettre à exécution.

Les associations s’insurgent contre ce qu’ils qualifient de «bannissement» des sans-papiers expulsés : ceux-ci peuvent se voir interdire de déposer une demande de visa pour entrer, légalement cette fois, dans l’espace Schengen, pendant deux à cinq ans. Autre point litigieux : Besson propose la création de zones d’attente virtuelles, comme celles existant dans les aéroports. Cet artifice permettrait de considérer que ces personnes, bien que se trouvant en France, n’y ont pas encore mis les pieds. Or les règles de protection des étrangers cueillis à la descente de l’avion sont moins strictes que celles s’appliquant aux personnes interpellées sur le territoire national.

Source : Libération

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