«20% de la population allemande est constituée de personnes issues de l’immigration», lance Dr. Gerhard Wahlers, secrétaire général adjoint de la Fondation allemande Konrad Adenauer Stiftung, lors du séminaire organisé par cette fondation, le 5 octobre 2010 à Tunis. Un chiffre qui démontre le poids économique qu’ont les migrants dans les pays de destination. Avec toutes les problématiques qui ont été évoqués quant à la question migratoire, leur rôle dans le développement économique n’est pas à négliger.
«Le développement économique de la République Fédérale d’Allemagne n’aurait pas pu être possible sans l’engagement de ces personnes et leur participation active», admet M. Wahlers. On affirme également que 65% des migrants issus du sud de la Méditerranée vivent en Europe, soit 13 millions de personnes alors qu’ils sont seulement 3,7 millions dans les pays du Golfe et 1,7 million dans le reste du monde. On dénombre également 500.000 immigrants clandestins chaque année. La croissance de la population migrante augmente d’année en année. En guise d’exemple, le nombre de migrants tunisiens en Italie croit de 5% annuellement. On estime, selon une étude de l’Union européenne, que les trois quarts des jeunes issus des pays du sud veulent immigrer.
La mise en place d’une politique de gestion des flux migratoires devient une urgence que les politiciens s’attèlent à concrétiser, ne cessent-ils de nous répéter. Mais il est vrai que cette question dépasse l’aspect social et économique pour concerner l’aspect politique, s’agissant ici de la souveraineté et de la sécurité de l’Etat. Comme l’indique Mme Isabelle Schäfer, de l’Université de Berlin, les pays européens adoptent une politique ambivalente vis-à-vis de la migration. «D’un côté, ils développent une approche sécuritaire par le contrôle des frontières à l’entrée. D’un autre côté, ils oeuvrent à la mise en place d’un espace de libre circulation et admettent qu’il y a un manque de ressources humaines et recourent à une politique de compensation par la migration», précise-t-elle.
Ce qui fait que l’Union européenne n’a pas encore adopté une politique migratoire commune à tous les Etats membres. Chaque pays adopte sa propre politique et l’harmonisation n’est pas encore à l’ordre du jour. «On se base ici sur le modèle du Best Practice. On suit l’expérience du voisin et on essaie d’en tirer les avantages», ajoute Mme Schäfer. La France, par exemple, essaie d’appliquer ce qu’on appelle l’immigration organisée ou choisie. Elle a déjà signé un accord de gestion concertée de l’immigration avec la Tunisie. A noter que près de 600.000 Tunisiens vivent en France, actuellement.
Politique migratoire sélective…
Par le biais de cet accord, les cadres tunisiens peuvent -théoriquement- immigrer vers la France en toute légalité et travailler dans les entreprises françaises. Une disposition qui n’est pas totalement appréciée par les uns et les autres. «Par cette immigration choisie, on crée un déséquilibre dans les pays du sud et ceux du nord en attirant les cadres hautement qualifiés. De cette façon, on encourage la fuite des cerveaux et on vide les pays du sud de leurs compétences», s’est indigné un intervenant au débat.
Avec 22 millions d’emplois à créer dans les dix prochaines années, l’Europe est en besoin intensif de main-d’œuvre qualifiée. La politique migratoire sélective de plusieurs pays européens peut être qualifiée d’agressive. Ce qui requiert de porter une plus grande attention à un meilleur équilibre entre l’offre et la demande et repenser cette politique qui profiterait mal aux pays du sud. Selon M. Michael Alexander Speiser, conseiller auprès du Parlement européen, il ne s’agit plus d’une sélection arbitraire. «Nous sommes prêts à accueillir les migrants si nous sommes en mesure de les accueillir correctement. Il faudrait, donc, se baser sur une politique d’intégration plus cohérente et plus équilibrée : ferme pour l’immigration clandestine et ouverte pour l’immigration légale et organisée», explique-t-il.
Cependant, il faudrait manier la critique avec doigté et accuser les Européens de vouloir "absorver" les cerveaux des pays du sud de la Méditerranée, puisque souvent ces derniers, en mal d'offres d'emploi -autrement dit confrontés à un sérieux problème de chômage- préfèrent voir leurs diplômés partir ailleurs...
Source : webmanagercenter.com