Au Maroc, le code de la famille, promulgué en 2004, fondé sur l'équilibre familial, la coresponsabilité des époux, le droit des femmes et des enfants, a permis de réaliser, malgré les multiples résistances, une avancée en matière des droits de la femme. Parce qu'il aura su tenir compte du substrat culturel et religieux, il a évité une fragmentation de la société, tout en conciliant la loi avec les règles universelles du droit du respect et de la dignité de chaque personne. Avec la tutelle qui disparaît, l'égalité des droits, le partage des biens, le divorce par consentement mutuel, les droits des enfants et les conditions draconiennes pour la polygamie, la loi renouvelle l'esprit et la lettre de l'ancienne Moudawana. Ce faisant, le Maroc s'inspire des principes du droit et obligations des différentes Chartes internationales auxquelles il a souscrit, ainsi qu'aux textes normatifs internationaux relatifs au droit de la femme.
Reste que cette avancée en matière juridique n'a pas permis, du moins pas encore, de transformer la société ni même de transformer la condition des femmes au Maroc ou en Europe où les droits de la femme sont pourtant bien ancrés. On ne change pas la société par « décret », souligne le sociologue Michel Crozier car il faut que les mentalités suivent, que la loi soit acceptée, appliquée et comprise. Pour cela, il faut un travail d'information par les médiateurs sociaux pour expliquer le code de la famille car beaucoup ignorent les mesures du code. Il fallait également traduire ce code dans d'autres langues, c'est chose faite déclare Mme Nouzha Skalli avec le soutien de l'Agence canadienne du développement international. La ministre du Développement social, de la Famille et de la Solidarité a rappelé dans son intervention une tendance lourde, celle de la féminisation de l'émigration et la place des Marocaines dans le marché du travail en Europe.
Malgré ces avancées, la femme est toujours en butte à la violence physique et morale. Combien de mineures sont mariées contre leur consentement, combien de femmes sont abandonnées avec leurs enfants, privées de papiers, combien de femmes trompées et abusées ! Pour M. Ameur, il faut accompagner les femmes émigrées en diffusant par tous les canaux l'information relative au code de la famille qui passe par le renforcement des capacités des ONG, vecteur de développement, et par un travail de proximité et de partenariat avec les sociétés civiles de l'Europe. Il faut, d'autre part, que le Maroc soit en mesure de tirer les bénéfices de ces changements et que la femme «use de son droit au droit» pour sortir de ses enfermements, et des discriminations et violences physiques et psychologiques dont elle est souvent victime.
C'est dans ce sens qu'une caravane de l'égalité et de la citoyenneté a été lancée qui sillonnera les routes de France, d'Espagne, d'Allemagne des Pays-Bas et de la Belgique du mois d'octobre au mois de décembre avec à son bord des juristes, des travailleurs sociaux, des artistes... qui animeront débats et conférences des rencontres avec les élus des pays hôtes et ateliers de sensibilisation et de formation menés par la Fondation Yto. Trois mois donc de conscientisation et d'information qu'il faudra évaluer fin décembre en termes d'impact et d'avancées car la caravane de l'égalité et de la citoyenneté ne doit pas être synonyme de sinécure !
Source : Le Matin