La Caravane Egalité et Citoyenneté sillonnera du 14 au 31 octobre la France. Mission : informer les MRE des dispositions du nouveau code de la famille.
Le code de la famille est sous les projecteurs à l'occasion de la Journée nationale de la femme célébrée le 10 octobre. Si, six ans après son entrée en vigueur, le nouveau code a été plus ou moins assimilé par les Marocains et les Marocaines d'ici, il n'en est pas de même pour les Marocains du monde. Ceux-ci ne sont pas suffisamment au courant des dispositions de la nouvelle loi qui les concerne au même titre que leurs compatriotes installés au Maroc, faute d'un travail sérieux d'information et de communication.
Il fallait que quelqu'un s'en aperçoive. Aujourd'hui, le ministère chargé de la Communauté marocaine résidant à l'étranger est bien décidé à aller à la rencontre des MRE dans leurs pays d'accueil pour éclairer leur lanterne sur la Moudawana. A cet effet, il organise «la Caravane Egalité et Citoyenneté» qui sillonnera du 14 au 31 octobre 2010 différentes régions de la France, un événement annoncé lors d'une conférence de presse tenue lundi 11 octobre à Rabat. Le département de Mohammed Ameur a voulu que la première édition de cette caravane soit une expérience-pilote menée dans un premier temps en France, dans la perspective de l'élargir dans les prochaines années à d'autres pays d'immigration. Même qu'arrivant un peu en retard, la Caravane Egalité et Citoyenneté sera certainement d'un grand secours pour plusieurs Marocaines du monde dont la vie en terre d'immigration n'est pas de tout repos.
Fouzia Assouli, présidente de la Ligue démocratique des droits des femmes, a mené un long travail de proximité avec les Marocaines du monde en situation de vulnérabilité et parle sciemment de leurs grands maux, dans une déclaration accordée Au ''Matin''. «Le premier constat à faire, c'est que ces femmes demeurent mal informées des changements apportés par le nouveau texte de la Moudawana.
En dehors de ce volet d'information et de sensibilisation, d'autres problèmes, toujours les mêmes, sont soulevés par les Marocaines qu'on a rencontrées en France, Belgique, Hollande, etc. Ils ont trait surtout à la procédure de divorce qui est engagée la plupart du temps au Maroc». A cet égard, la Ligue démocratique des droits des femmes a demandé à ce qu'il y ait des assistants de juges dans les tribunaux des pays d'immigration qui soient habilités à conclure le divorce sur place, afin d'épargner aux immigrées marocaines le déplacement au Maroc pour obtenir le divorce. «Par ailleurs, poursuit Mme Assouli, le phénomène du mariage sans acte ou ce qu'on appelle mariage coutumier, qui fleurit en terre d'immigration, préoccupe énormément les Marocaines du monde, d'autant qu'il promeut des pratiques illégales comme le mariage des mineurs et la polygamie».
Et pour conclure, Fouzia Assouli soulève un problème de taille découlant de la double nationalité des immigrées, à savoir le conflit des lois. «Les divorces proclamés en Hollande par exemple ne sont pas reconnus au Maroc et vice-versa. De ce fait, beaucoup de femmes marocaines voient leurs droits bafoués».
Pour redresser cette situation, l'accent sera mis durant la caravane sur deux volets stratégiques : sensibilisation du grand public et mobilisation des ONG s'activant au Maroc et dans les pays d'immigration. En effet, des objectifs chiffrés sont assignés à cette première caravane : mise en place de 30 antennes d'écoute ambulantes pour examiner les problèmes des Marocaines du monde et y trouver des solutions, distribution de 100.000 dépliants d'information sur la Modawana… Pour réussir ce pari, le ministère ne fera pas cavalier seul. Outre le ministère du Développement social, de la Famille et de la Solidarité qui est partie prenante de cette manifestation, le département de Mohammed Ameur mise gros sur l'apport de la société civile pour pouvoir toucher sa cible.
L'événement est ainsi organisé en étroite collaboration avec la Fondation Ytto, une ONG nationale vouée à la défense des droits des femmes à laquelle revient le mérite de proposer l'idée de la caravane, ''couvée'' par la suite par le ministère. Les organisateurs ambitionnent d'impliquer quelque 700 acteurs associatifs dans les activités programmées durant la caravane. Cette mise à contribution de la société civile se poursuivra à long terme, puisque l'un des objectifs annoncés est de signer 50 conventions de partenariats avec les ONG actives en France en vue d'«apporter une assistance juridique aux immigrées marocaines en situation de vulnérabilité», précise Mohammed Ameur.
Or, une telle assistance ne sera possible sans l'installation de mécanismes d'intervention appropriés, admet-il.
Conscients de cet impératif, les organisateurs de la caravane ont mobilisé 20 services sociaux des pays d'accueil, ainsi que de nombreux prédicateurs religieux «qui ont un rôle fondamental à jouer en matière de sensibilisation aux droits des femmes», insiste le ministre.
Il reste à savoir qu'outre les associations de la société civile, la caravane verra la participation d'un parterre d'artistes, intellectuels, sportifs, parlementaires et journalistes hommes et femmes.
La Moudawana, 6 ans après...
Nouzha Skalli, ministre du Développement Social, de la Famille et de la Solidarité, ne pouvait rater l'occasion sans passer en revue les progrès les plus saillants réalisés en matière de condition féminine depuis l'entrée en vigueur de la Moudawana en 2005. Il ressort du bref bilan dressé par la responsable gouvernementale que le nombre des mariages a progressé de plus de 12% entre 2003 et 2009. Sur la même période, le taux de divorce a chuté de 46%, alors que celui du ‘'divorce judiciaire'' a augmenté de 13%. La ministre reconnaît tout de même la persistance de plusieurs failles dans la condition des femmes, relatives surtout au mariage précoce qui représente 10% du nombre total des mariages et qui concerne à hauteur de 30% des mineures de moins de 16 ans. Mme Skalli rappelle à l'occasion les toutes récentes mesures prises par son département pour promouvoir la situation des femmes. Elle en cite notamment la mise en place d'un programme de renforcement des compétences des juges et un autre pour la formation d'assistantes sociales. Par ailleurs, un projet de création d'un fonds de solidarité familiale devra voir le jour dans les semaines à venir, annonce la ministre.
Activités programmées
25 ateliers de formation et de sensibilisation, 25 rencontres avec les immigrées marocaines, 5 ateliers thématiques, 15 rencontres sur les lieux publics, 10 ateliers de sensibilisation dans les établissements scolaires et des leçons religieuses dans les mosquées.
Source : Le Matin