lundi 25 novembre 2024 06:54

L'exécutif lance la rénovation express de la Fondation pour les œuvres de l'islam de France

La FOIF végétait depuis sa création en 2005, une nouvelle version verra le jour en octobre. Elle devra trouver une solution pour le financement des mosquées et la formation des imams. Décryptage.

Coquille vide depuis 2005, la Fondation nouvelle version verra le jour en octobre. En marge de projets culturels, elle aura la lourde tâche de trouver une solution pour le financement des mosquées et la formation des imams. Décryptage.

Qu'est-ce que cette institution ?

La Fondation pour les œuvres de l’islam de France (FOIF) est née en 2005, fruit de la guerre de positions que se livraient alors Dominique de Villepin, Premier ministre, et Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur. Deux ans plus tôt, ce dernier avait mis sur les rails le Conseil français du culte musulman (CFCM), première tentative d’organisation politique de l’islam de France, qui n’avait cependant pas de ressources propres. Via la FOIF, il s’agissait donc – déjà – de lever des fonds pour la construction de mosquées. La FOIF, comme le CFCM sur lequel elle était adossée, a très vite été paralysée par les rivalités entre fédérations de mosquées liées aux principaux pays d’origine. L’instance est tombée en désuétude.

Pourquoi cette décision de la relancer ?

Dès les attentats de janvier 2015, Bernard Cazeneuve a tenté de réactiver les instances de l’islam de France. Perclus de dissensions, le CFCM «n’était plus perçu comme l’échelon pertinent, relate un conseiller ministériel. Il fallait créer un cercle de discussions plus représentatif». «Les jeunes Français de confession musulmane, les classes moyennes, les femmes ne se reconnaissent plus forcément dans l’islam de leurs parents qu’incarne le CFCM», abonde un proche de Manuel Valls. D’où, en février 2015 la naissance d’une «instance de dialogue avec l’islam» plus large, incluant des non religieux, des auteurs, des chercheurs, des maires... Elle a déjà tenu trois réunions.

En parallèle, le ministre de l’Intérieur a voulu, dès le printemps 2015, «redonner de la force» à la FOIF afin de démêler l’imbroglio politico-constitutionnel encadrant le financement des lieux de culte musulmans. Confié à un haut fonctionnaire du ministère de l’Intérieur, Christian Poncet, le chantier a pris du retard. Avant d’être relancé dimanche dernier par Manuel Valls dans sa tribune au Journal du Dimanche (JDD). Lundi, Bernard Cazeneuve a assuré que cette nouvelle «Fondation de l’islam de France» verrait le jour en octobre alors que son cabinet parlait jusqu’alors plutôt de la fin de l’année 2016. «On a beaucoup avancé ces dernières semaines», rapporte un conseiller.

Quel sera son rôle, selon Cazeneuve et Valls ?

Selon les interlocuteurs, les futures missions ne sont pas tout à fait les mêmes. En toile de fond, c’est toute la question – explosive – du financement des mosquées et de la formation des imams et de l’adaptation (ou non) de la loi de 1905 sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat qui se pose. En laissant le volet religieux au CFCM, le volet culturel de la fondation ne pose de problème à personne. Elle aura ainsi vocation à financer des recherches sur l’islam (thèses ou chaires), à accompagner des projets pour une meilleure connaissance de l’islam ou accorder des bourses aux aumôniers et imams.

Pour ce qui est du volet cultuel, c’est bien plus compliqué. L’idée consisterait à adosser une association cultuelle à la fondation pour centraliser les dons des personnes morales et des entreprises privées, voire faire transiter les fonds venant de pays étrangers. Dans un entretien à Libération lundi, Manuel Valls a expliqué qu’il ne souhaitait pas toucher à la loi de 1905. Il y était favorable il y a quelques années, mais juge aujourd’hui le sujet «très périlleux» dans un pays sous le choc après des attentats perpétrés par des terroristes se réclamant d’une religion. L’approche de la présidentielle n’aide pas. Le Premier ministre explique donc que le gouvernement est à la recherche de «biais législatif ou réglementaire» pour permettre une forme de financement public des mosquées sans modifier la loi de 1905. Pour les financements étrangers, difficiles à interdire en droit, certains réfléchissent à un encadrement drastique, comme stipuler qu'ils doivent rester minoritaires et fixer leur niveau maximum ou alors écrire noir sur blanc que ces financements ne donnent aucun pouvoir sur la future mosquée, dans le choix de l'imam ou la formulation des prêches.

Pour piloter ce nouveau vaisseau amiral de l’islam de France, le gouvernement promet une nomination «avant la fin de l’année». Son choix serait en réalité déjà arrêté sur une «personnalité issue de la société civile reconnue de tous», selon une source ministérielle. 

2 août 2016, Laure Bretton

Source : Libération

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