La Secrétaire générale adjointe du Conseil de l'Europe Mme Gabriella Battaini-Dragoni s'est félicitée, jeudi, de la nouvelle politique migratoire du royaume, en soulignant l'intérêt et le courage du Maroc dans le développement de cette politique novatrice qui est soutenue par les plus hautes autorités du pays.
Le Conseil de l'Europe va envisager le soutien de la mise en œuvre de cette politique à travers des propositions opérationnelles dans le cadre du prochain plan de coopération entre le Conseil et le Maroc 2015-2017, a-t-elle promis à l'issue d'une communication du président du Conseil national des droits de l'homme, Driss El Yazami devant la commission des migrations, des réfugiés et des personnes déplacées de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE).
Au terme de cette communication qui a été ovationnée par l'assistance, le président et les membres de la commission ont salué la démarche marocaine affirmant qu'ils la soutiennent pleinement.
Au cours de cette réunion, tenue en marge de la session plénière de l'APCE, M. El Yazami a donné un cadrage historique de la question migratoire au Maroc, en rappelant que le royaume est à la fois une grande terre d'émigration depuis la première guerre mondiale et une terre d'immigration et d'accueil, et qu'il subit incontestablement les effets de la politique drastique de contrôle par l'Europe de ses frontières extérieures.
Pour toutes ces raisons, le Maroc est devenu à son tour une terre d'asile et d'installation durable de migrants. Il accueille ainsi une immigration de travail régulière, un nombre relativement important d'étudiants étrangers, des migrants en situation irrégulière, en transit souvent depuis de longues années et enfin, des demandeurs d'asile et des réfugiés.
A ces flux, s'ajoutent des groupes installés depuis longtemps (Algériens, Syriens, diverses nationalités européennes), a-t-il indiqué, en évoquant aussi l'accélération des mobilités, notamment la circulation des élites professionnelles hautement qualifiées et les séjours prolongés de retraités européens.
Cette conjonction de dynamiques migratoires diversifiées fait du Maroc, insensiblement mais de manière irréversible, un pays cosmopolite. La poursuite de l'émigration des Marocain-e-s, de manière régulière ou irrégulière et la visibilité de populations venues de très loin (Chinois, Phillipins, Népalais) attestent de l'insertion incontestable du Maroc dans la mondialisation des mobilités humaines, a-t-il souligné.
L'intervenant a également abordé le contexte marocain et les mutations des dernières décennies, dans un continent africain confronté aux défis du développement et régulièrement secoué par des crises politiques et des conflits armés. Face à cette situation historiquement inédite, les pouvoirs publics ont agi de manière ad hoc, par touches successives, sans que leurs initiatives ne soient conçues de manière globale et adaptée aux nouvelles réalités.
M. El Yazami a développé par ailleurs la démarche scientifique du CNDH dans le développement son analyse de cette question, fondée sur des données statistiques et rapports et qui a eu pour référentiel la nouvelle constitution de 2011, les différents instruments internationaux de protection des droits de l'Homme, notamment la Déclaration universelle des droits de l'Homme, les deux Pactes (droits civils et politiques/économiques sociaux et culturels), la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, les conventions de l'OIT notamment la Convention N 87 portant sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical et les conventions N 97 et 143 sur les travailleurs migrants.
L'étude du CNDH a abouti à plusieurs recommandations appelant les pouvoirs publics, l'ensemble des acteurs sociaux et les pays partenaires du Maroc à prendre acte des nouvelles réalités et à agir en commun pour l'élaboration et la mise en œuvre d'une véritable politique publique protectrice des droits, basée sur la coopération internationale et intégrant la société civile.
Cette politique, a-t-il expliqué, s'articule sur quatre grandes composantes : La situation des réfugiés et des demandeurs d'asile , Les étrangers en situation administrative irrégulière , Les étrangers en situation régulière et La lutte contre la traite des personnes.
M. El Yazami a exposé, par la suite, le processus qui s'est déclenché après la présentation du rapport du CNDH à SM le Roi Mohammed VI qui, comme il a été souligné dans un communiqué du cabinet royal, a pris note des recommandations pertinentes du CNDH.
Ce processus, soutenu par les plus hautes autorités du pays, a donné lieu au lancement d'un véritable chantier dédié à la question migratoire, notamment par la mise en place de structures dédiées et une mobilisation tous azimuts, qui ont eu pour premier résultats l'ouverture de 83 bureaux des étrangers répartis sur l'ensemble des provinces et préfectures au Maroc, la régularisation de la situation de 524 réfugiés, le dépôt de plus de 6000 demandes de régularisation, la scolarisation des enfants de migrants en situation administrative, la préparation de deux projets de loi sur l'asile et la lutte contre la traite et le lancement de la refonte de la loi 02/03 sur la migration.
Le président du CNDH a également abordé les nouveaux défis, qui sollicitent une implication active des partenaires européens pour un partenariat rénové, notamment face aux urgences humanitaires comme c'est le cas concernant la protection temporaire des Syriens, la mise en œuvre et le développement d'une politique d'insertion ainsi que d'un partenariat Sud/Sud, évoquant à ce titre la nécessité d'une conférence euro-africaine sur le thème de la migration.
M. El Yazami a eu par ailleurs une série d'entretiens avec plusieurs hauts responsables du Conseil de l'Europe, notamment avec Mme Gabriella Battaini-Dragoni, secrétaire générale adjointe du Conseil de l'Europe, avec Nils Mui?nieks, Commissaire aux droits de l'homme Philippe Boillat, Directeur Général du département des Droits de l'Homme et Etat de droit et Jean-Paul Costa, Président de l'Institut International des Droits de l'Homme de Strasbourg qui ont porté sur leurs domaines respectifs et des questions d'intérêt commun.
Ces entretiens, qui se sont déroulés en présence du Consul général du Maroc à Strasbourg, Youssef Balla, ont également abordé le développement des relations de partenariat entre le Conseil de l'Europe et le Maroc dans le domaine des droits de l'homme, notamment au niveau du renforcement des capacités du CNDH, les échanges de visites et d'expertises ainsi que l'intensification de la participation du Maroc aux activités du Conseil dans ce domaine.
Le rôle des mémorandums du CNDH et de ses avis consultatifs au plan législatif et institutionnel dans le contexte de la nouvelle constitution du Royaume ont également été soulignés par M. El Yazami lors de ces différents entretiens.
31 janv. 2014
Source : MAP