dimanche 24 novembre 2024 20:28

Le terrorisme, l’immigration et le volet social, principaux thèmes de la rentrée politique en Belgique

Six mois après les attentats meurtriers de Bruxelles ayant fait 32 morts et plusieurs dizaines de blessés, la lutte antiterroriste continue de rythmer l’action du gouvernement, avec son coût budgétaire estimé à plus 740 millions d’euros, ses conséquences négatives sur l’économie évaluées à plus d’un milliard d’euros et son impact psychologique sur la population. 

Le volet sécuritaire sera au menu du programme politique de la rentrée du gouvernement de Charles Michel, qui en a dores et déjà décliné les contours dans des sorties médiatiques cette semaine.

Dans des interviews à la presse, M. Michel a souligné que la lutte antiterroriste portera d'abord sur le volet juridique. Beaucoup de textes sont sur la table. Ils consistent notamment à élargir le délai de garde à vue et à permettre des perquisitions la nuit. A rappeler que l'impossibilité de mener des perquisitions le soir avait empêché la police de mettre la main sur Salah Abdesslam, l’un des principaux suspects des attentats de Paris de novembre dernier, dans le quartier où il s'était retranché à Bruxelles.

Pour M. Michel, il s’agit également d’adapter la législation en vigueur sur les caméras privées de surveillance, de façon à les raccorder aux services de police. Cette mesure, permettra, selon lui, d’anticiper l’intervention des agents de sécurité et d’aider les enquêteurs à élucider les circonstances d’un acte terroriste ou criminel.

«Le plan sécurité» de la rentrée vise aussi à étendre le rôle des sociétés de gardiennage privé.

Le Premier ministre entend redéfinir clairement les missions des sociétés de gardiennage privé pour englober des taches de surveillance par exemple des centres commerciaux afin, entre autres, de permettre à la police de se consacrer à sa mission essentielle.

Le chef de l’exécutif belge a également annoncé la création d’un nouveau corps de sécurité pour la surveillance des bâtiments et sites potentiellement visés dans le but de remplacer l’armée déployée en rue depuis janvier dernier. 

«Nous avons décidé de mettre en place un corps de sécurité spécialement formé pour la surveillance de bâtiments, de sites potentiellement visés. Nos militaires n’ont pas vocation à rester éternellement dans les rues pour surveiller des sites ou des bâtiments», a-t-il affirmé. Avec cette décision, le premier ministre entend répondre aux revendications de certains éléments de l’armée qui se sont dit excédés par la mission de surveillance en rue, que le gouvernement vient de prolonger jusqu’au 2 octobre prochain. 
En ce qui concerne la déradicalisation, autre volet de la lutte antiterroriste, le Premier ministre belge s’est prononcé pour une plus grande mobilisation des bourgmestres afin de détecter le phénomène de radicalisation et trouver en coordination avec la justice les meilleurs moyens de l’endiguer.

Dans le même contexte, Charles Michel a annoncé que la législation sera plus dure avec les personnes qui prêchent la haine et les idées fanatiques, ainsi qu’avec les migrants en situation irrégulière. Il a soulevé cette question en rapport avec un imam radicalisé de la ville de Dison, répondant au nom de Cheikh Alami qui fait l’objet de mesures d’expulsion et dont le fils avait appelé récemment dans une vidéo au meurtre des chrétiens. 

Charles Michel souhaite également un débat au parlement autour du délit d’apologie du terrorisme. «Il y a eu des propositions de loi pour sanctionner l’apologie du terrorisme. Ce sont des débats que nos sociétés n’éviteront pas. Mais il faut un débat serein au parlement», a-t-il suggéré.

Le gouvernement souhaite aussi des mesures plus fermes à l’égard des combattants étrangers qui sont nombreux à retourner en Belgique. Le secrétaire d'Etat à l'Asile et la Migration Théo Francken a annoncé à cet égard que son département a élaboré un projet de loi qui vise à faciliter le retrait des cartes de séjour des étrangers - même s’ils sont établis depuis plusieurs années en Belgique - qui représentent une menace pour la sécurité nationale ou un danger pour l’ordre public. 

"Je veux les empêcher de rentrer ici. Ce sont des criminels. Pour eux, ce sera un aller simple pour la Syrie", a-t-il affirmé dans une récente déclaration rapportée par les médias.

Pour lui, «il faut leur couper (NDLR : les combattants étrangers) l’herbe sous le pied et retirer leur permis de séjour avant qu’ils ne rentrent en Belgique car, une fois retournés, leur rapatriement dans leur pays d’origine n’est pas toujours possible parce qu’il y en a qui sont des ressortissants de pays avec lesquels nous n’avons pas d’accords bilatéraux».

Sur le même sujet, le président du parti nationaliste N-VA, Bart De Wever, qui compte plusieurs ministres dans le gouvernement Michel, a annoncé qu’il déposera à la rentrée des propositions de renforcement de la sécurité. 

Ces textes que De Wever compare à un «Patriot Act», décidé par les Etats-Unis au lendemain des attentats du 11 septembre, proposent la possibilité d’incarcérer les combattants revenus de Syrie, de contrôler le financement des mosquées, ou encore de sanctionner les personnes qui marqueraient publiquement leur soutien à Daesh.

Autre volet de ces propositions, la possibilité d’arrêter des personnes suspectées de préparer un attentat et la fermeture préventive de lieux suspectés d’abriter des activités illégales, comme les prêches incitant à la haine.

Mais cette réforme ne semble pas avoir bon écho auprès des autres partis, y compris ceux de la majorité, estimant qu’il faut d’abord évaluer les mesures de sécurité qui ont déjà été prises.

Au sujet de la politique d’asile dans le contexte de la crise migratoire que connaît l’Europe, le Premier ministre belge a été sans détours : « nous serons accueillants avec ceux qui le méritent et qui sont dans les conditions, parce qu’ils sont pourchassés, brimés dans leur pays pour des raisons politiques. Et nous serons très sévères avec ceux qui ont l’intention d’abuser». 

Le gouvernement compte serrer l’étau autour des illégaux par des mesures coercitives, notamment l’augmentation de la capacité des centres fermés qui accueillent les migrants dans l’attente de leur expulsion, la signature d’accords de réadmission avec les pays d’origine. La question de réadmission, rappelle-t-on, a été largement évoquée en Belgique après l'attaque à la machette de deux policières à Cherleroi par un Algérien en situation illégale. 

M. Francken avait affirmé à cette occasion, que les autorités algériennes ‘’prétendent souvent’’ que leurs ressortissants qui font l’objet d’ordres de quitter le territoire belge pour séjour illégal ou actes criminels, sont marocains. ‘’L’Algérie est réticente à reprendre ses nationaux. Les autorités prétendent souvent que les personnes concernées sont marocaines. Et comme ces personnes n’ont pas de papiers, ou prétendent ne pas en avoir, l’identification est très difficile’’.

A ces mesures s’ajoute une restriction révélée récemment par la presse belge. Il s’agit d’une amende administrative de 200 euros, en vigueur depuis le 24 juillet dernier, qui serait infligée aux étrangers qui séjournent illégalement en Belgique.

Cette mesure s’applique aux étrangers qui sont entrés illégalement dans l'espace Schengen ou qui ne sont pas retournés dans leur pays d'origine après un séjour de 3 mois, mais également aux citoyens européens qui se sont présentés à l'aéroport sans documents en cours de validité ou qui n'ont pas signalé leur présence à l'administration communale dans les délais prévus par la loi…

5 sept 2016, Adil Zaari Jabiri

Source : MAP

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