samedi 30 novembre 2024 02:53

Le ton monte entre Obama et les républicains sur l'immigration

Devant la justice au Texas comme au Congrès à Washington, la bataille fait rage : Barack Obama, qui avait décidé d'agir seul sur l'immigration, fait face à des adversaires républicains déterminés à bloquer les millions de régularisations annoncées.

Le président américain, qui se rend mercredi à Miami en Floride, pour défendre son plan, assure avoir le droit et l'histoire de son côté.

Mais la guérilla parlementaire prend une tournure délicate et l'issue du combat devant la justice, qui pourrait remonter jusqu'à la Cour suprême, s'annonce incertaine.

Pour les quelque 11 millions de personnes, dont une grande partie de Mexicains, qui vivent et travaillent clandestinement aux Etats-Unis, cette phase qui s'ouvre est d'abord synonyme d'incertitude.
Pour M. Obama, qui avait fait de la réforme du système d'immigration une des principales promesses de campagne dès 2008, l'enjeu est de taille à moins de deux ans de son départ de la Maison Blanche.

Mi-novembre, il a présenté - sans passer par le Congrès - une série de décrets offrant une perspective de régularisation à quelque 5 millions de personnes en situation irrégulière. Mesure-phare: tout clandestin vivant depuis plus de cinq ans aux Etats-Unis, et ayant un enfant américain ou titulaire d'un statut de résident permanent, doit pouvoir demander un permis de travail de trois ans.

Mais il y a une semaine, un juge fédéral du Texas a ordonné que de ce plan de régularisation soit temporairement bloqué. La Maison Blanche a fait appel et demandé la suspension de la décision du juge du tribunal de Brownsville.

Mark Krikorian, directeur du Center for Immigration Studies, groupe de réflexion qui plaide pour un renforcement des contrôles aux frontières, met cependant en garde contre la tentation de lancer des régularisations avant que tous les recours n'aient été examinés.

"Le processus est, de facto, irréversible", explique-t-il à l'AFP, soulignant qu'un permis de travail accordé à un clandestin ne lui sera jamais retiré a posteriori. "Le dossier doit remonter jusqu'à la Cour Suprême car cela touche à la question fondamentale de séparation des pouvoirs", ajoute-t-il, se faisant écho de nombreux élus républicains qui estiment que M. Obama a outrepassé ses pouvoirs sur ce dossier sensible.

 "Nation d'immigrants"

Parallèlement, les républicains, désormais majoritaires au Congrès, ont déployé l'artillerie lourde: ils ont engagé un bras de fer sur la loi de financement du département de la Sécurité intérieure, dont dépendent en particulier les services d'immigration.

La loi qu'ils ont rédigée inclut plusieurs amendements qui annuleraient, faute de moyens, le plan de régularisations annoncé à l'automne par M. Obama. Sans surprise, les démocrates du Sénat font obstruction contre ce texte.

Pour l'heure, l'impasse est totale. Or si aucun document n'est adopté d'ici vendredi, le financement de ce ministère crucial ne sera plus assuré. Un jeu de poker menteur dont Washington a le secret s'est engagé, chaque camp tentant d'évaluer qui serait le plus touché politiquement en cas de blocage, avec la présidentielle de 2016 dans tous les esprits.

Citant en particulier l'urgence liée à la menace terroriste, le ministre de la Sécurité intérieure Jeh Johnson a jugé la situation "absurde".

Dans un tribune publiée mercredi dans The Hill, M. Obama appelle à mettre la politique de côté et à se concentrer sur "ce qu'il y a de mieux" pour l'Amérique, rappelant que ce pays a toujours été "une nation d'immigrants".

"Je suis persuadé que les mesures que j'ai prises finiront pas être mises en place", indique le président tout en soulignant qu'elles ne sauraient remplacer une réforme en profondeur, menée par le Congrès, d'un système d'immigration "qui ne fonctionne plus depuis des décennies".

Pour Ivan Reyes, 34 ans, en situation irrégulière depuis son arrivée du Mexique à l'âge de 10 ans, ce nouvel affrontement entre démocrates et républicains à Washington sonne comme une énième déception.
"J'avais l'intention de faire la démarche (de régularisation) et le processus est arrêté", raconte-t-il, très déçu. "A chaque fois que l'on est sur le point d'obtenir quelque chose, un nouvel obstacle se dresse", ajoute-t-il.

"Ce serait bien, un jour, de ne plus vivre dans l'inquiétude du lendemain".

24 fév 2015,

Jérôme CARTILLIER

Source : AFP

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