Les associations de Marocaines à l’étranger se mobilisent pour sensibiliser leurs membres et sympathisants à l’importance du référendum pour la réforme de la constitution. Beaucoup incitent à voter « Oui » mais celles qui soutenaient le Mouvement du 20 appellent au boycott. Revirement pour l’Association des travailleurs immigrants marocains en Espagne. Elle qui a soutenu, jusqu'à présent, les revendications du Mouvement du 20 février, a décidé d'appeler à voter oui.
L’Association des Travailleurs Immigrants Marocains en Espagne (ATIME) qui avait activement et « sans hésitation » soutenu et accompagné le Mouvement du 20 février à ses débuts considère aujourd’hui le nouveau texte de la constitution comme une victoire. Elle appelle donc à voter « Oui », tout en renouvelant son soutien au Mouvement du 20. L'association, quelques jours avant le 20 février, rejetait l’hypothèse de « l'exception marocaine » et pensait au contraire que le Royaume ne serait épargné qu’en cas de « réformes politiques immédiates et profondes ».
L’ATIME explique dans son communiqué que « malgré les dérapages de l’appareil étatique, nos réserves sur la méthodologie adoptée, nous considérons qu’il est responsable et logique de répondre favorablement à cette réforme et nous impliquer dans sa mise en œuvre ». Pour l’ATIME, « ces réformes préparent une nouvelle ère où nous mettons à l’épreuve notre maturité et notre capacité à réaliser une révolution démocratique graduelle. » Cependant, L’ATIME, fidèle à sa vocation militante, invite les autorités à abandonner la répression et la désinformation contre ceux qui appellent à voter « Non ».
Un « Non » peristant
Comme le mouvement au Maroc, les membres du 20 février-Paris/Île-de-France campent sur leurs positions. Le Mouvement rejette le nouveau texte qu’il estime « en deçà de ses attentes, tant sur la forme que sur le fond ». Le Mouvement assure que « le temps réduit alloué à la préparation et la façon dont a été conduite la consultation montrent bien la volonté du régime de confisquer le débat démocratique ». La section parisienne du Mouvement appelle donc ses membres à boycotter le scrutin et à battre le pavé dimanche 26 juin. Le Mouvement tiendra également un sit-in devant l’ambassade du Maroc à 15h.
Le collectif de soutien du Mouvement du 20 février de l’Association des Travailleurs Maghrébins de France « boycotte le scrutin parce que le Mouvement du 20 Février le boycotte ». Ali El Baz, coordinateur de l’ATFM, explique la position de l’ATIME, « M. Kamal Rahmouni, le président de l’ATIME est également membre du Conseil consultatif des marocains résidant à l’étranger, il est d’une certaine manière proche du pouvoir. Le mandat de ce conseil expire à la fin de l’année, ses membres sont donc soumis à un certain chantage. »
Le « Oui » associatif
Chapeautées par les consulats du Maroc ou de manière indépendante, des associations marocaines à l’étranger, en nombre important et croissant, multiplient les réunions et les communiqués. L’objectif est le même : appeler leurs adhérents à voter « Oui » lors du scrutin du 1er Juillet. L’association Cap sud MRE et Génération France-Maroc « 2ème Génération », avec les 45 associations qui leur sont associées organisent un forum sous le thème « Les MRE prescripteurs et architectes du nouveau Maroc », le 25 juin à Mantes La Jolie. Le forum vise à sensibiliser l'ensemble des associations au vote du 1er juillet au referendum. Cap Sud MRE avait soumis des propositions à la Commission de Mennouni, concernant principalement le droit de vote pour les MRE.
L'association maroco-germanique Mouvement nouvel élan s’enthousiasme sur les dispositions concernant la communauté marocaine à l'étranger, particulièrement les articles 16, 17 et 18. L'association décrit le projet de la nouvelle constitution comme « une avancée majeure ». L'association la Maison du Maroc et l'association des Intellectuels marocains en Russie se sont également manifestées pour applaudir l’initiative.
Les membres de la Maison départementale du Maroc, basée à Nice, confient qu’ils sont « fiers de notre modèle et de notre capacité [au Maroc] à faire d'autres choix que la rue et la révolution » et assurent qu’ils voteront « Oui ». Même son de cloche chez les Marocains d’Irlande. Ils sont « convaincus que la nouvelle Constitution permettra au Royaume d'avancer résolument vers un lendemain encore plus radieux. »
L'association des amis du Sahara Marocain en Espagne a aussi approuvé le nouveau texte. Pour cette association, qui regroupe Marocains et Espagnols, « le Maroc a démontré à nouveau qu'il constitue bel et bien l'exception dans la région ». « L’exception marocaine » a également trouvé écho chez les Marocains résidant en Pologne, qui ont été parmi les premiers à manifester leur adhésion au projet de réforme.
24/6/2011
Source : Yabiladi
Alors que les migrations sont à l’ordre du jour du Conseil de l’Union européenne qui se réunit actuellement à Bruxelles, la CNCDH rend public un avis sur les conséquences migratoires des Printemps arabes. Cet avis fait suite à un courrier qu’elle avait adressé aux différents ministres concernés…Consulter l’avis
Un ancien reporter d'origine philippine du Washington Post, lauréat du prix Pulitzer de journalisme pour sa couverture de la fusillade de l'université de Virginia Tech en 2007, a révélé, hier, qu'il vivait en immigré clandestin aux Etats-Unis depuis 20 ans. Jose Antonio Vargas, 30 ans, a annoncé la nouvelle dans un article du New York Times Magazine. Arrivé à l'âge de 12 ans sur le sol américain, le journaliste raconte que quatre ans plus tard, alors qu'il tentait d'obtenir un permis de conduire, un fonctionnaire lui avait ordonné de quitter les lieux au motif que ses papiers étaient faux. «Ces 14 dernières années, j'ai été diplômé du lycée et de l'université, j'ai bâti une carrière de journaliste et j'ai interviewé certaines des figures les plus célèbres de ce pays», écrit-il. «Je me suis créé une vie parfaite en surface, j'ai vécu le rêve américain», poursuit-il. «Mais je suis et je reste un sans-papiers. Et cela signifie vivre une réalité différente (...) Cela signifie vivre avec la peur d'être découvert. Cela signifie n'avoir confiance en quasiment personne.» Jose Antonio Vargas, qui a quitté le Washington Post en 2009 pour rejoindre durant quelque temps le Huffington Post, dit faire aujourd'hui ces aveux pour «ne plus fuir» qui il est.
23/6/2011
Source : Infosoir
L’Union européenne a décidé ce vendredi soir de renforcer de façon drastique les contrôles de l’immigration à ses frontières, mais de façon temporaire et exceptionnelle.
Face à l’arrivée massive de clandestins venus de Tunisie et de Libye, les Vingt-Sept se sont octroyés la possibilité de rétablir des contrôles à leurs frontières nationales en cas de pression exceptionnelle.
Cécilia Malmström, la commissaire européenne en charge de l’Asile et des Migrations, s’est inquiètée des risques de dérive sécuritaire, dictée par les partis d’extrême droite et les mouvements populistes de plus en plus actifs dans l’Union européenne.
C’est le Danemark qui avait lancé le mouvement en menaçant de rétablir unilatéralement ses frontières
Mais Copenhague dit n’avoir aucune intention de remettre en cause l’espace Schengen dans son principe de libre circulation des personnes.
Lars Løkke Rasmussen, le Premier ministre danois : “si les frontières extérieures sont sous forte pression, nous devons pouvoir profiter d’une exception, de façon aussi à ce que les gens continuent de soutenir cette idée générale de Schengen.”
Le président français Nicolas Sarkozy a été le fer de lance de ce repli européen, proposant que les pays d’Afrique du Nord s’engagent à reprendre les migrants partis illégalement de leur territoire.
24/6/2011
Source : euronews
Nous avons construit ce rêve selon les exigences de l'immigration. Nous avons été choisies sur la base de notre niveau d'études, de notre profession et de notre connaissance du français.
Nous sommes des intellectuelles, nous travaillions, et pour beaucoup, nous parlons français. Nous avons obtenu les points nécessaires; on nous a assuré que le Canada avait besoin de nous. Ça tombait bien, nous avions aussi besoin du Canada. De sa qualité de vie et de sa tolérance. Nous nous sommes donc lancées dans la grande aventure de l'immigration.
Après trois ans d'attente, partagées entre l'appréhension et l'enthousiasme à la perspective des grands espaces canadiens, nous avons reçu notre billet d'entrée au paradis. Nous avons vite appris que ce n'était pas une simple balade qui commençait, mais un parcours de combattante.
D'abord, nous avons assisté à la séance d'information du ministère de l'Immigration, puis nous avons été référées au centre local d'emploi qui nous a envoyées au bureau des équivalences. Trois mois plus tard, nous avons reçu une lettre nous informant que notre diplôme avait perdu une partie de ses crédits en touchant le sol québécois.
Mais, ne nous décourageant pas, nous avons décidé de retourner à l'école, afin de retrouver les crédits perdus. Lors de notre inscription à l'université, nous avons appris qu'il était probable que ce retour aux études prenne plus d'un an et que l'équivalence émise précédemment ne serait pas reconnue. Celles qui en avaient le courage et les moyens ont repris les études et obtenu leur diplôme.
Mais une fois sur le marché du travail, surprise! Quelle est la question la plus fréquente? «Avez-vous de l'expérience pertinente?» Bien sûr! J'ai travaillé plus de 10 ans dans ce domaine dans mon pays d'origine, répondons-nous, naïves. Non! Ces années de notre vie n'existent plus; rayées, oubliées, balayées! L'expérience pertinente, c'est l'expérience canadienne, seulement celle-ci.
Nous comprenons l'importance d'acquérir de l'expérience dans la société d'accueil, mais alors pourquoi nous choisir sur la base de notre profession? Pourquoi nous faire croire que nous constituons un atout? Pourquoi ne pas nous offrir la possibilité d'acquérir cette expérience?
Nous nous sommes donc résignées à chercher un emploi qui ne correspond pas à nos compétences. En plus de la nécessité d'être bilingues, nous nous heurtons aux craintes de certains employeurs qui appréhendent les différences culturelles. En attendant, nous voulons vivre la tête haute et ne pas être à la charge de la société.
De guerre lasse, nous avons demandé l'assistance-emploi. Nous, avocates, professeures, médecins, découragées, seules, à la maison, reléguées aux travaux ménagers, bénévoles dans le meilleur des cas, nous avons l'impression d'avoir perdu une partie de notre identité; nous vivons une perte d'estime et de l'angoisse vis-à-vis de l'avenir, nous nous sentons inutiles et à la charge de la société québécoise.
Et pourtant! Il y aurait peu à faire pour améliorer les choses: informer les candidats des difficultés reliées aux équivalences. Pourquoi ne pas faire les équivalences chez nous? Nous passerions les examens nécessaires à la reconnaissance de notre diplôme dans notre pays. Cela nous épargnerait argent et angoisse, et permettrait au gouvernement de jouir de nos compétences, plutôt que de nous verser des prestations.
Nous pourrions aussi améliorer notre anglais si nous connaissions son importance pour le marché du travail québécois. Ensuite, arrivées ici, il pourrait y avoir, au moins pour celles qui ont obtenu une équivalence, des stages offerts.
25/6/2011
Source : Cyberpresse.ca
Les dirigeants européens ont négligé les questions des droits humains et ont axé leurs discussions sur le renforcement des frontières
Le sommet du Conseil européen qui s'est achevé le 24 juin n'a fait aucun progrès significatif dans la lutte contre les graves lacunes des politiques d'asile et migratoires de l'Union européenne, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.
Les dirigeants européens n'ont pris aucun engagement pour réformer les aspects injustes de la politique d'asile européenne, pour offrir une réinstallation aux réfugiés d'Afrique du Nord, ou pour intensifier les efforts visant à prévenir les décès de migrants traversant en bateau la Méditerranée, a indiqué Human Rights Watch. Au lieu de cela, les discussions ont porté presqu'entièrement sur la police des frontières et la gestion des migrations.
« Les attentes étaient faibles, mais il a quand même été décevant de voir les dirigeants européens s'en tenir à la stratégie du ‘gardez-les dehors' », a déclaré Judith Sunderland, chercheuse senior sur l'Europe de l'Ouest à Human Rights Watch. « Il y a un grand fossé entre les beaux discours de ces dirigeants au sujet du printemps arabe et la dure réalité sur leur propre continent. »
Dans ses conclusions, le Conseil européen a souligné la nécessité d'une gestion efficace des frontières extérieures et approuvé une proposition visant à permettre le rétablissement temporaire des contrôles aux frontières intérieures dans l'espace Schengen. Il a souligné la nécessité de partenariats avec les pays voisins orientaux et méridionaux de manière à « traiter les causes premières de la migration au niveau structurel ».
Le manque de clarté sur la façon dont les États membres feraient respecter la liberté de mouvement et le droit d'asile tout en imposant des contrôles aux frontières soulève des préoccupations concernant le recours des gardes-frontières au profilage ethnique pour tenter d'identifier les personnes qui ne sont pas des citoyens européens, a déclaré Human Rights Watch.
Le Conseil a approuvé les propositions de la Commission européenne de réviser plusieurs parties du système d'asile commun, notamment la Directive Accueil, qui couvre l'assistance aux demandeurs d'asile, et la Directive Procédures, qui traite des procédures d'asile, et a réaffirmé son engagement à créer un système commun d'ici 2012.
Certaines des modifications proposées semblent conçues pour parvenir à un consensus en abaissant les normes relatives à la détention, à l'accès à l'assistance sociale et aux soins médicaux, et aux procédures d'asile accélérées, selon Human Rights Watch.
Les dirigeants européens ont également omis de répondre aux préoccupations au sujet du règlement Dublin II, qui exige que les demandes d'asile soient entendues dans le premier État de l'UE atteint par les migrants, a ajouté Human Rights Watch. Cela fait peser un fardeau disproportionné sur les États situés aux frontières extérieures de l'UE, dont la Grèce, qui a un système d'asile dysfonctionnel et des conditions de détention abusives.
« Le Conseil parle du système d'asile commun, mais ne semble pas disposé à prendre les décisions difficiles pour y parvenir », a conclu Judith Sunderland. « Sans la réforme de Dublin, et une plus grande aide à la Grèce afin d'assurer que son système de migration et d'asile réponde aux normes internationales, un système commun d'asile ne sera qu'une utopie. »
Le Conseil a également omis de répondre à l'appel de la Commissaire européenne, Cecilia Malmström, à une plus grande « solidarité en action » à l'égard des personnes qui fuient les violences en Libye. Il n'a pris aucun engagement pour augmenter la réinstallation des réfugiés d'Afrique du Nord - moins de 1 000 personnes à ce jour - ou pour intensifier les efforts visant à prévenir les décès dans la région méditerranéenne.
24/6/ 2011
Source : HRW
Tout étranger condamné à une peine d’emprisonnement au Danemark sera désormais expulsé à sa sortie de prison. La loi a été adoptée au Parlement par une écrasante majorité. 97 députés ont voté pour, et seulement sept s’y sont opposés. Pour le ministre de l’immigration, membre de la coalition de centre-droit au pouvoir, cette loi est tout à fait logique:
“Seulement les gens condamnés à des peines de prison seront expulsés, et dans ce pays être condamné signifie que l’on a commis un crime. Ensuite, elle est conforme aux standards internationaux des droits de l’homme.” affirme-t-il.
Tous ne sont pas de cet avis. Les rares députés ayant voté contre la loi estiment au contraire que le Danemark pourrait être condamné par la Cour Européenne des Droits de l’Homme:
“Le Danemark risque d‘être épinglé pour violation des droits de l’homme. La majorité le sait. Elle adopte une loi qui est susceptible de violer les droits des citoyens.C’est grotesque.” estime cette députée.
Le centre-droit dirige le pays depuis 2001, grâce au soutien du Parti du Peuple Danois, troisième force politique du pays. En échange de son soutien, il a toujours exigé un durcissement de la politique migratoire. Sous sa pression, le Danemark avait annoncé le mois dernier un renforcement des contrôles aux frontières avec ses voisins européens.
24/6/2011
Source : euronews
Toujours le même dilemme : le Front national est-il un parti comme les autres ? Faut-il débattre avec lui avec la même suavité, la même onctuosité, la même neutralité qu'avec les autres formations ? Ou bien, en exprimant son opposition de manière convaincue, quitte à paraître véhément, la transformer en victime de la "caste médiatique".
Lors de l'émission "Des Paroles et des Actes" hier soir sur France 2, il m'a semblé que la première position était intenable. J'étais invité comme éditorialiste, directeur d'un journal qui a toujours défendu des options rigoureusement opposées à celles du FN. Dès lors cette opposition devait s'exprimer, dans un esprit de vivacité démocratique, quitte à prendre le mauvais rôle aux yeux d'une partie des spectateurs.
Certes le FN n'est pas un parti fasciste, un repaire de putschistes en puissance, une organisation mussolinienne. Il joue le jeu électoral, respecte les lois et se garde d'user de violence. Il prodigue de louables efforts pour revêtir un manteau de respectabilité et joue du visage plutôt avenant de Marine Le Pen pour faire passer des thèses dont les scories antisémites et les provocations xénophobes ont été gommées.
Alors ? Alors le principe de l'émission consistait à interroger Marine Le Pen sur son programme, à lui demander de préciser son projet pour la France. Il fallait donc le lire, avec attention, tout comme il fallait écouter les interventions précédentes de Marine Le Pen pour se former un jugement circonstancié sur "le nouveau FN". L'exercice fut donc fait. Il conduit à une conclusion nette : les questions économiques mises à part, il n'y a pas de "nouveau FN". Le Front national reste ce qu'il a toujours été : un parti nationaliste, héritier de l'extrême-droite française la plus traditionnelle, dont les propositions en matière d'immigration et de nationalité sont contraires à la tradition républicaine. Il n'est plus antisémite - même s'il compte dans ses rangs de solides ennemis des juifs - mais il est devenu anti-musulman, antipathie fondée essentiellement sur des préjugés, qu'il masque derrière un discours anti-communautariste et laïque.
1. On remarquera d'abord que Marine Le Pen, tout affichant une différence de principe avec son père, a refusé de le désavouer que quelque point que ce soit. Son discours est celui d'un héritière qui s'est donné pour mission de poursuivre l'oeuvre du fondateur sans rien renier des principes originels du Front. La seule différence qu'elle admet porte sur le rôle de l'Etat, à qui elle attribue une importance supérieure à celle que lui conférait l'ancien programme du FN. Pour le reste, c'est une approbation filiale et totale, quitte à employer pour maintenir ce cap les plus vieilles ficelles de la rhétorique politique. Quand David Pujadas rappelle les condamnations en justice infligées à Jean-Marie Le Pen, elle esquive en citant immédiatement la francisque de Mitterrand, sujet qui n'a aucun rapport et qui n'excuse en rien les dérapages de Jean-Marie Le Pen, alors qu'il eût été si simple de plaider l'erreur ancienne du père en lui trouvant une quelconque excuse. Mais non : le FN a toujours été calomnié, a-t-elle dit, il ne s'est jamais fourvoyé.
2. Le passage consacré à l'armée française et cité par Caroline Fourest existe bel et bien. Il suffit de le lire au chapitre Défense Nationale du FN. Il y est bien indiqué, en deux phrases qui se suivent logiquement à la fin du même paragraphe, que le niveau de recrutement de l'armée française est en baisse, dans la mesure où 20% des nouvelles recrues sont d'origine musulmane. Les musulmans, ainsi, sont tenus par le FN pour de mauvais soldats et de mauvais Français. Les familles des anciens combattants de Monte Cassino, âpre bataille gagnée en Italie contre les nazis par des troupes françaises composées pour l'essentiel de musulmans, apprécieront. Tout autant que les familles de soldats français musulmans tués en opération ces dernières années.
3. De la même manière, la première phrase du premier chapitre du même programme indique que l'immigration est à la source de la plupart des maux qui affectent le pays. Certes l'immigration est un problème et la gauche a grand tort de le nier trop souvent. Mais en faire la source principale de la crise française, c'est recourir à une outrance propagandiste inadmissible. La crise financière, la crise écologique, la crise industrielle, la crise du commerce extérieur, la crise de l'euro, n'ont rien à voir avec la présence d'immigrés en France. Par cette proclamation brutale, on assigne aux immigrés un rôle de bouc émissaire qui reflète avant tout un préjugé ethnique.
4. Les mesures prévues par le FN pour lutter contre l'immigration sont draconiennes, parfois cruelles et le plus souvent anticonstitutionnelles. La suppression des allocations familiales pour les familles étrangères en séjour régulier revient à s'attaquer aux enfants pour réduire le nombre des étrangers. La majoration des cotisations sociales des salariés étrangers instaure un apartheid dans le travail. La réduction à trois ans des titres de séjour aujourd'hui prévus pour dix ans, proposée par le FN, s'appliquerait, si on lit le texte, aux détenteurs actuels. Ainsi un étranger titulaire d'une carte de dix ans depuis trois ans serait aussitôt expulsable, aux termes d'une loi elle-même rétroactive, au mépris de la parole de l'Etat républicain.
5. Le chiffrage du coût de l'immigration est si exagéré qu'il en devient farfelu. Marine Le Pen évalue à 60 milliards par an le déficit des comptes publics lié à l'immigration (plus même, selon ce qu'elle a dit hier soir). La plupart des spécialistes universitaires de la question arrivent à des chiffres très inférieurs. Beaucoup estiment que les immigrés rapportent aux comptes sociaux et budgétaires plus qu'il ne coûtent (voir l'étude de l'Université de Lille réalisée par le groupe Equippe, cohérente avec les résultats qu'on obtient généralement à l'étranger). Marine Le Pen se réfère au rapport Milloz, publié dans les années 90 et qui aboutit au chiffre de 60 miliards. Elle oublie de préciser que ce monsieur Milloz est un membre du Club de l'Horloge, think tank d'extrême-droite bien connu et qu'il est très proche du FN. C'est un peu comme si Nicolas Sarkozy disait "ma politique est excellente, comme le démontre le rapport Guéant". Là encore, les immigrés sont des bouc émissaires.
6. Le programme de restauration du franc est très dangereux. Une dévaluation unilatérale ouvrirait une guerre des monnaies en Europe. Le lâchage de la Grèce entraînerait son défaut. Cette banqueroute peut provoquer une panique bancaire égale à celle qui a suivi la faillite de Lehman Brothers et qui a failli jeter bas l'économie mondiale. Marine Le Pen écarte ces arguments d'un revers de main. Il y a fort à parier que sa volonté de quitter l'euro n'est pas liée à son piètre bilan mais à ses convictions nationalistes qui lui font préférer - elle l'a dit hier soir avec une grande force - la souveraineté nationale à tout autre système de relations internationales.
7. C'est ainsi qu'elle a des mots très durs pour ceux qui soutiennent Dominique Strauss-Kahn mais trouve toutes sortes d'arguties pour regetter l'arrestation d'un Mladic, dont les crimes sont peu de choses à ses yeux à côté de l'abomination que constitue l'existence d'un tribunal pénal international. Marine Le Pen condamne toute intervention extérieure, serait-elle destinée à arrêter les menées du dictateur le plus sanguinaire. Les relations du FN avec Saddam Hussein ou avec les potentats de la fançafrique sont bien connues.
8. Tout cela forme un tout cohérent : une politique nationaliste, intolérante envers les étrangers, hostiles à tout projet européen, souvent contraire à la constitution et qui piétine allègrement les principes républicains qui sont les nôtres. Voilà pourquoi il fallait s'opposer avec vigueur à Marine Le Pen.
25/6/2011, Laurent Joffrin – Directeur de Le Nouvel Observateur
Source : Le Nouvel Observateur