mardi 19 novembre 2024 17:44

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France/Sondages : le vote se jouera-t-il finalement sur l'immigration et la sécurité ?

L'emploi et le chômage sont les préoccupations les plus importantes pour les Français selon les enquêtes d'opinion. Insécurité et immigration seraient des enjeux secondaires. Pourtant, les choix des votants pourraient bien se faire sur ces questions, selon François Kalfon, secrétaire national délégué aux études d'opinion au PS.
Le drame de Toulouse représente-il le tournant de la campagne que les équipes de Nicolas Sarkozy ont si longtemps attendu et auquel elles n’osaient penser ? Le fameux évènement tant espéré à droite, tant redouté à gauche ? Selon que l’on soit dans les équipes de Nicolas Sarkozy ou celles de François Hollande les interprétations divergent.
Avenue de Ségur, on y voit plutôt une parenthèse, avec une campagne de nouveau dominée par des préoccupations économiques et sociales qui reprendrait désormais ses droits. Le thème de l’emploi reste largement en tête des préoccupations des Français ? C’est d’ailleurs essentiellement de ce sujet avec le pouvoir d’achat dont leurs parlent les Français dans les portes à portes.
Les prévisions au second tour inchangées
Après Toulouse, le thème de l’emploi apparaît bien avec 43% de citations le principal thème de préoccupation des Français dans une récente enquête OpinionWay (51% pour les sympathisants PS et 41 % UMP) tandis que l’immigration n’est citée que par 20% des répondants… Même s’il s’agit d’un sujet fortement clivant puisqu’il est cité par seulement 4 % des sympathisants PS, mais 28% des UMP et 74% des FN.
Alors, dans l’entourage du candidat PS on reste assez confiant. La preuve ? Un François Hollande qui, à moins de 25 jours du scrutin, se situe dans les enquêtes au niveau confortable de 26 et 29 % au premier tour, et surtout entre 53% (CSA) et 55% (TNS) au second tour, constitue un niveau qui demeure exceptionnel. Surtout, le total gauche progresse régulièrement au premier tour grâce (à cause ?) de la progression de Jean-Luc Mélenchon ce qui confirmerait la domination de "l’agenda" économique et social sur les thèmes régaliens chers à la droite comme l’autorité, la sécurité ou l’immigration.
Au PS, on préfère donc replacer la campagne sur les rails de l’économique et du social qui se situent au cœur identitaire des socialistes et qui constituent un terrain bien plus propice pour souligner le caractère "indigent" du bilan de Nicolas Sarkozy sur ces sujets : 1 million de chômeurs en plus, que les hasardeuses déclarations du président-candidat sur "la baisse de la hausse" ne sauraient masquer, une dette alourdie de 600 milliards d’euros ou une désindustrialisation qui s’aggrave.
Car, à l’évidence, malgré une certaine érosion des scores de premier tour, les "photographies" de second tour demeurent si confortables. C’est que le rejet de Nicolas Sarkozy, alimenté par une appréciation largement négative de son bilan, explique largement la convergence d’électorats très différents permettant d’être confiant sur la victoire de François Hollande.
A droite, au contraire on pointe que "la séquence" Toulouse a permis de conforter le fameux "croisement des courbes". Tous les instituts sont désormais d’accord pour décrire soit une égalité au sommet, soit dans une majorité d’enquêtes un Nicolas Sarkozy qui virerait en tête à l’issue du premier tour. La prise de guerre de Toulouse ? + 2 points dans les enquêtes au profit du président-candidat. 2 points qui traduisent une certaine remobilisation des électorats de droite sur la personne du candidat qui a montré dans l’épreuve – et malgré les critiques justifiées sur l’efficacité des services de renseignements – sa capacité à être "un vrai chef" comme on les aime à droite.
Ce désir d’autorité a (re)trouvé une incarnation rassurante en la personne du président de la République, de nouveau en situation de protection, de "capitaine dans la tempête" qui l’avait un peu perdu avec l’accalmie relative sur le front des dettes souveraines. Surtout, après ce succès contre le terrorisme, les électeurs de droite peuvent de nouveau être fiers d’appartenir au camp conservateur.
Toulouse, effet masquant du bilan ?
Sans doute. Et c’est bien sur ce terrain-là que le camp sarkozyste entend capitaliser en continuant à droitiser la campagne pour consolider le socle de premier tour. Et surtout faciliter les reports de voix entre Marine Le Pen au premier tour et Nicolas Sarkozy au second, suivant les recommandations du vieux sorcier Patrick Buisson. Car c’est là la deuxième conséquence de Toulouse : si la victoire estimée de François Hollande au second tour demeure généreuse, la courbe d’évolution des seconds tours est bien sur la voie d’un rééquilibrage (que tous les experts sérieux avaient anticipé). Mais jusqu’où ira-t-il ?
Autre dommage collatéral de cette séquence sécuritaire : François Bayrou qui avec ces déclarations décalées s’ajoutant à la plus faible détermination de son socle électoral est passé du statut de Plan B de la droite à celui moins enviable de… 5e homme de la présidentielle (notamment dans l’enquête BVA). Or ce dégonflement de la bulle du Modem se fait principalement au profit du président-candidat tant le MoDem 2012 est principalement alimenté par des électeurs issus du camp conservateur.
La poussée Mélenchon
Enfin, parmi les proches du président de la République, on dispose d’une lecture légèrement différente de la montée de Jean-Luc Mélenchon. On pointe qu’elle traduit d’abord un manque d’appétence d’électorats pourtant traditionnels du PS comme les classes moyennes qui subissent le déclassement, certains électeurs du non au TCE (traité de fonctionnement de l'Union européenne) ou des enseignants radicalisés dans l’altermondialisme.
On souligne ensuite que cette poussée de Mélenchon, en érodant le score de François Hollande, permet de sécuriser l’avance encore fragile de Nicolas Sarkozy au premier tour. Enfin, sur le terrain politique, on pense que le rééquilibrage à gauche sera l’occasion de pointer les contradictions – voire les incompatibilités – programmatiques et idéologiques supposées au sein de la gauche et on se réjouit d’avance des concessions que le candidat PS devra faire au Parti communiste rebaptisé "Front de gauche" qui ne devraient pas manquer d’effrayer, dans la perspective du second tour, les si précieux électeurs centristes, voire François Bayrou lui-même. Sera t-il condamné à s’allier à Nicolas Sarkozy ?
Si on a pu penser un moment que Toulouse pourrait représenter un tsunami aux conséquences électorales majeures, on sait maintenant que ce n’est pas le cas. Même s'il s’agit sans doute d’un moment clé. Celui où chaque camp peut désormais raisonnablement penser que la victoire est possible… Et qu’elle dépend désormais de la mobilisation et du talent de chaque candidat.
29/3/2012, François Kalfon
Source : Le Nouvel Observateur

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