Le président Barack Obama n'a pas tenu sa promesse de réforme migratoire et son concurrent républicain Mitt Romney prône une politique répressive envers les sans-papiers... Pour les Hispaniques aux Etats-Unis, l'immigration reste un sujet sensible de l'élection présidentielle.
A dix jours du scrutin, les républicains récoltent ce qu'ils ont semé et Mitt Romney ne peut guère espérer dépasser les 20% d'opinions favorables qu'il détient actuellement au sein des électeurs hispaniques, échaudés par les lois contre les sans-papiers votées par plusieurs Etats conservateurs.
Mais les 52 millions d'Hispaniques --dont 23 millions d'électeurs-- sont également déçus par un président qui a échoué à présenter la vaste réforme migratoire qu'il avait promise en 2008. Même s'il a sorti de son chapeau, il y a quelques mois, un texte promettant de régulariser partiellement, et pour deux ans, certains étudiants sans-papiers.
Barack Obama a néanmoins le soutien de 71% des Hispaniques, selon une étude de Latino Decisiones. Un chiffre qui étonne Gabriel Sanchez, professeur de Sciences politiques à l'Université du Nouveau-Mexique (sud-ouest): "Comment est-ce possible, avec la déception de la réforme migratoire?".
"Je pense que c'est parce qu'ils ont le choix entre Obama, un +bien immatériel+ qui parle beaucoup et ne fait pas grand chose, et +l'auto-expulsion+ comme modèle de politique migratoire", dit-il à l'AFP.
Le concept d'auto-explusion a été défendu par M. Romney pendant les primaires républicaines. Selon ses détracteurs, il revient à rendre la vie tellement impossible aux sans-papiers que ces derniers choisiraient de quitter les Etats-Unis de leur plein gré.
Les électeurs hispaniques, soit 11% du corps électoral, considèrent l'immigration comme l'une de leur cinq préoccupations principales, derrière l'économie et l'emploi, selon l'institut Pew Hispanic.
Faire pencher la balance
Si elle n'est donc pas la plus importante, elle pourrait néanmoins faire pencher la balance, notamment dans des Etats à forte population hispanique comme le Nevada et le Colorado (ouest) ou la Floride (sud-est).
Les "Latinos" républicains accusent les démocrates d'utiliser la thématique migratoire de manière fallacieuse pour "diviser le parti républicain et les communautés hispaniques hétérogènes", note Alci Maldonado, présidente de l'organisation Assemblée Nationale Hispanique et Républicaine.
Elle observe que ce sont pourtant "les républicains qui ont présenté une vaste réforme migratoire sous la présidence de George W. Bush", une réforme qui a échoué devant le Sénat en 2007.
Et aujourd'hui, les républicains "paient les conséquences de l'environnement négatif qu'ils ont créé pour les Latinos", déclare à l'AFP Jody Vallejo, professeur de Sociologie à l'Université de Californie du Sud. "En particulier dans des Etats comme l'Arizona (sud-ouest), où les Latinos sont visés par les législateurs républicains".
Dans cet Etat, les policiers sont invités à contrôler les papiers des personnes arrêtées s'ils ont "un doute raisonnable" sur leur statut migratoire.
Et si les Latinos de deuxième ou troisième génération n'ont pas de problèmes de papiers --ils sont citoyens américains--, des lois comme celle en vigueur en Arizona, copiée dans d'autres Etats, affecte toute la communauté.
"Cela ne change rien que tu viennes d'arriver ou que tu sois américain d'origine hispanique: ils te demanderont tes papiers si tu as l'air d'un Mexicain", lance Gabriel Sanchez.
De plus, les Américains d'origine hispanique ont des liens affectifs avec les sans-papiers et "sont particulièrement préoccupés quand ils sont face à un parti qui attaque les immigrés", ajoute Mme Vallejo.
Selon M. Sanchez, "la question aujourd'hui n'est pas de savoir si Romney pourra capter suffisamment le vote latino, car ce ne sera pas le cas, mais si les Latinos iront voter pour faire réélire le président".
28 oct. 2012
Source : AFP