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28 octobre - Rabat - Le CCME partenaire du colloque : "Les morisques et leur héritage : d'hier à aujourd'hui"

mercredi, 28 octobre 2009
En Espagne, l'année 1609 et le siècle qu'elle inaugure ont constitué un tournant décisif. Ils ont façonné profondément son devenir historique. Leur incidence continue du reste d'agir, suscitant la curiosité des historiens et des chercheurs. En effet, au-delà des circonstances à l'origine des édits d'expulsion, le départ forcé des Morisques a représenté une tragédie humaine. L'expérience historique de ces derniers est d'autant plus singulière qu'elle coïncidait, dans le contexte général d'alors, avec une fragilité politique, un affaissement économique, des embarras religieux et une fracture socioculturelle qui a distendu les liens entre les musulmans et les chrétiens d'Espagne, augurant d'une impasse historique.

Confirmant la cession de Grenade, la convention de 1491, établie par les rois catholiques et le souverain Abu Abd Allah, a eu pour effet de mener à terme la conversion des andalous en mudéjars. Par suite de la résiliation de l'accord, de la remise en cause notamment des clauses relatives à la garantie des droits, à la question de l'identité et de l'appartenance, le statut des mudéjars évolue une nouvelle fois. Ils deviennent des Morisques. Cette modification inaugure le cycle de l'exil collectif forcé, premier jalon posé en vue de l'expulsion définitive.

Les édits d'expulsion ont été émis entre 1609 et 1614. La pression exercée par les dignitaires religieux et politiques, accentuée par la précarité politique, économique et religieuse du règne, y a constitué un ressort capital. Plus grave, la monarchie s'est servi de la décision d'expulsion  afin de contourner ses crises. L'opinion générale l'y avait conforté, identifiant les Morisques à une menace et les accusant de résistance et d'alliance avec les Turcs. On leur a tenu rigueur d'avoir fondé une « république » andalouse indépendante au Maroc et la mauvaise foi quant à l'intégration religieuse. On a mis en avant enfin leur refus de l'assimilation sociale et culturelle. Depuis, le drame des Morisques s'est exacerbé dans des manifestations dont la rigueur a obéi à un processus général complexe.

Les documents officiels, la littérature religieuse, les rapports de l'Inquisition et les annales de l'époque apportent des preuves tangibles concernant le sort de cette communauté. L'historiographie morisque en témoigne également, adoptant des fois une allure pédagogique mais semble parfois disparate et moins crédible. Elle présente néanmoins une vision singulière d'une expérience humaine pénible. Les Morisques, à travers la voix de ceux d'Espagne et des exilés, ont exprimé des convictions ambivalentes, ils ont tergiversé entre le conflit et la concorde, l'incrimination et la nostalgie, la séparation et le rêve du retour.

En réalité, l'édit d'expulsion et les articles afférents n'auraient jamais pu existé en l'absence de textes établis par les religieux, de procédures militaires engagées par les politiques et de l'historiographie qui l'a justifié, habillant l'iniquité et la turpitude de justice et de vérité.

De la rive sud, limitrophe et contemporaine en permanence, l'Institut des Etudes Hispano-Lusophones (Unité de Recherche sur la Moriscologie) de l'Université Mohammed V-Agdal, Rabat et la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Ben Msik, Casablanca (Laboratoire Maroc et monde occidentaux) s'apprêtent à commémorer le 400ème anniversaire de l'expulsion des Morisques. Ils organisent un congrès international scientifique et interdisciplinaire dont l'objet sont le patrimoine et l'histoire morisques.

Nous aspirons à voir émerger des visions et des opinions diverses,  des réflexions et des apports inédits. Nous visons à créer un espace scientifique de rencontre, indispensable pour des débats et des critiques riches et constructifs. Les organisateurs s'attendent à des lectures de l'histoire morisque et à des études de la documentation de l'époque, en mesure de révéler en profondeur  leur vie religieuse, leur condition socio-économique et leur vicissitude identitaire, à même également d'analyse les causes, les préambules et les conséquences de leur expulsion. Retracer leur expérience d'exilés dans des pays à stabilité précaire, comme le Maroc, ne manquera pas d'intérêt. Les Morisques ont dû exprimer leur vie et leurs sentiments, c'est pourquoi un des chapitres du congrès est consacré à leur production intellectuelle et littéraire et à leur patrimoine matériel.

L'histoire est irréversible. La cohabitation entre les nations a ses règles, le dialogue entre les peuples ses fondements. Si dans le récit de l'histoire, cette cohabitation a brillé par son absence, à présent le destin et l'avenir de l'humanité sont liés à notre capacité de la réactiver au lieu d'en faire un simple hymne. Une relecture et une réécriture de l'histoire sont donc nécessaires  pour pouvoir édifier un nouveau message. Cette entreprise est possible si nous parvenons à nous affranchir des idées reçues et à démanteler les stéréotypes au profit de postures équilibrées et raisonnables.

Pour consulter le programme du colloque dont le CCME est l'un des partenaires :

http://calenda.revues.org/nouvelle14660.html

 

SG au JT de 2m: spécial programmation de la journée internationale des migrants

Les entretiens du symposium

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