jeudi 4 juillet 2024 06:21

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Diplômés étrangers : "Si j'avais su, je n'aurais pas fait mes études en France !"

Une fois leurs études terminées, les jeunes étrangers diplômés en France peuvent-ils tenter leur chance dans l'Hexagone ? La circulaire du 31 mai 2011, dite "circulaire Guéant", relative à la maîtrise de l'immigration professionnelle, restreint en effet les possibilités pour les jeunes diplômés étrangers de travailler en France à l'issue de leur formation. Désormais, toute demande de titre de séjour professionnel doit faire l'objet "d'un contrôle approfondi". Alors que la gauche et le centre se montrent critiques envers la nouvelle disposition, la grogne se propage chez les étudiants étrangers. Dans ce contexte, djOnscOpe est allé à la rencontre des premiers concernés...

"Les étudiants étrangers ont prioritairement vocation à regagner leur pays"

"Si j'avais su qu'à l'issue de mes études j'aurais tant de difficultés à trouver un emploi en France du fait de ma nationalité, j'aurais achevé mes études dans un autre pays", affirme cet étudiant gabonais, diplômé d'un master de sciences physiques à l'université de Bourgogne (UB). D'après le ministère de l'Intérieur, le gouvernement s'est fixé pour objectif "d'adapter l'immigration légale aux besoins comme aux capacités d'accueil et d'intégration de la société française", dans un contexte de crise économique qui affecte en profondeur le marché de l'emploi.

En conséquence, le gouvernement entend donner la priorité à l'insertion professionnelle des personnes ayant déjà le statut de demandeur d'emploi résidant en France, qu'elles soient de nationalité française ou étrangère. "J'ai été contacté par plusieurs boîtes de recrutement et à chaque fois, elles m'interrogent sur ma nationalité. Lorsque je leur répond, elles me rétorquent que ça va être compliqué pour l'entreprise, du fait notamment du changement de statut", explique le jeune diplômé.

D'après la circulaire du 31 mai 2011, dite circulaire Guéant, "il convient de rappeler que les étudiants étrangers ont prioritairement vocation, à l'issue de leur séjour d'études en France, à regagner leur pays pour y mettre en œuvre les connaissances acquises". Dans ce cadre, la procédure de changement de statut - étudiants demandant un titre de séjour professionnel – fait donc l'objet d'un contrôle approfondi de la part des services préfectoraux concernés. "Mes compétences portent sur les nouvelles technologies et je ne pourrai pas trouver un emploi dans mon pays, à moins de faire une reconversion professionnelle", poursuit l'ancien étudiant de l'UB, qui rappelle qu'il est loin d'être le seul dans ce cas.

"Une situation incohérente !"

"Je constate que la circulaire Guéant tend à dissuader les entreprises d'embaucher des jeunes diplômés étrangers. À force d'essuyer des échecs en préfecture au sujet du changement de statut des jeunes diplômés étrangers, elles deviennent plus frileuses", observe Aleck Do Rego, jeune étudiant ivoirien de 25 ans, tout juste diplômé d'un master axé sur la finance à l'École supérieure de commerce (ESC) de Dijon Bourgogne. D'après le jeune homme, cette situation est incohérente car elle bloque l'emploi alors que les entreprises qui le contactent cherchent pourtant à recruter.

La nouvelle disposition génère des conséquences multiples. Pour de nombreux jeunes diplômés étrangers, la situation est source de difficultés financières. "J'ai investi dans une école qui coûte plus de 8.000 euros par an. J'ai pu obtenir un prêt avantageux auprès de la banque qui était certaine que je trouverais aisément un emploi en sortant d'une école de commerce de qualité. Mais aujourd'hui, qui va le garantir ? Le gouvernement français ?". Si Aleck Do Rego bénéficie du statut étudiant jusqu'au printemps 2012, il déplore de n'avoir aucune visibilité sur le long terme.

"La formation est un marché concurrentiel !"

Le jeune homme insiste aussi sur l'importance d'une première expérience professionnelle en France pour acquérir les savoir-faire même si ensuite, "à terme, tout le monde veut rentrer au pays". L'ensemble des implications de la circulaire n'aurait pas bien été mesuré, d'après Stéphan Bourcieu, directeur de l'ESC Dijon Bourgogne. "Cette décision est consternante ; elle va l'encontre de l'intérêt international de la France qui aurait besoin de ces étudiants. La formation est un marché concurrentiel. S'ils ne trouvent pas de débouchés en France, ils ne viendront plus".

"L'accueil d'étudiants étrangers qui payent des droits de scolarité permet de développer l'activité de l'ESC. De même, pour une entreprise française qui s'implante à l'étranger, recruter un étudiant du pays concerné qui connait les mœurs et la culture locale est un réel atout", rappelle Stéphan Bourcieu.

Si ce dernier reconnaît qu'il faut sans doute réguler le marché du travail, il insiste sur le fait que "le taux de chômage des cadres n'est que de 4%, nous avons donc une situation de quasi plein emploi". Plus généralement, après avoir investi dans l'éducation d'un étudiant, "il est dommage de le renvoyer chez lui, de surcroit au bénéfice d'entreprises étrangères concurrentes", affirme le directeur de l'école de commerce.

4/11/2011, François Aubert

Source : DijonScope

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