Une étude dresse le profil-type du "fan" de partis d'extrême-droite : masculin, de plus en plus jeune, et soucieux de défendre une identité culturelle. Par Ronan Kerneur.
Au cours de la dernière décennie, les partis d’extrême-droite ont acquis un "poids prépondérant" dans de nombreux parlements au sein de l’Union européenne, et représentent dans certains pays "la deuxième ou la troisième force politique", constate une étude du centre de réflexion britannique Demos, publiée lundi 7 novembre. Et les réseaux sociaux constituent, selon l'auteur de l'enquête, Jamie Bartlett, "un outil d’organisation, de recrutement et de prosélytisme" qui accompagne cette montée du populisme. Dans le cadre de cette recherche, réalisée sur onze pays européens, plus de 10.000 sympathisants de partis "populistes", répertoriés comme des "fans" sur le site de socialisation Facebook, ont été interrogés.
A quoi ressemble le partisan d’extrême-droite ?
"Les partisans en ligne des mouvements populistes représentent une nouvelle génération de militants en majorité jeunes qui vont plus souvent voter et s’impliquer dans la vie politique et l’activisme que le reste de la population", explique l'auteur de l'étude. Près des deux tiers d'entre eux ont moins de 30 ans, contre 51% en moyenne pour les utilisateurs de Facebook.
Les hommes représentent trois quarts des partisans des partis d'extrême-droite recensés, tandis que la part des femmes ne dépasse jamais les 36%. La majorité des partisans se déclarent comme employé et un tiers comme étudiant. Avec 14% de chômeurs, contre 16% en moyenne sur Facebook, l’absence de travail ne constituerait pas un facteur incitatif à l'adhésion d'un parti populiste.
Qu'est-ce qui motive leur engagement ?
La perception de "l’immigration" et du "multiculturalisme" représente un facteur décisif dans l'adhésion en ligne à un parti d'extrême-droite, explique l'étude. Plus d’un tiers des personnes interrogées citent l’immigration comme un de leurs deux principaux sujets de préoccupation. L'extrémisme islamique étant le deuxième le plus cité (25%).
Une crainte palpable pour les sympathisants des deux mouvements d’extrême-droite français relevés dans l’étude. Les partisans interrogés du "Bloc identitaire", mouvement créé en 2003, connu pour ses dérives islamophobes, sont 67% à placer l’immigration comme un sujet d'inquiétude, et 56% pour ceux du Front national. Des préoccupations éloignées de celles de l'Européen moyen qui met l’inflation (46%), la situation économique (20%) ou encore le chômage (19%) en tête, selon la dernière enquête Eurobaromètre.
L'immigration est plus souvent perçue chez les sympathisants des partis d'extrême-droite sous le prisme identitaire que sous l'angle économique, contrairement à ce qu'avance "une grande partie de la littérature académique", souligne l'étude. Ils craignent plus "la perte leur identité culturelle" que "leur emploi ou leurs logement".
"Désenchantement" ou adhésion idéologique ?
La recherche suggère aussi que de "nombreux supporters des partis populistes ont des niveaux extrêmement faibles de confiance dans les institutions politiques traditionnelles". Seul 20% des partisans ont confiance en leur gouvernement national et 14% en l’Union européenne. Des taux nettement inférieurs à ceux obtenus par le baromètre européen proches des 45%. Et seul 30% de ces sympathisants ont confiance dans le système judiciaire contre 60% au niveau européen. "Un désenchantement qui pousse les individus à rejoindre ces groupes d’extrême-droite en signe de protestation sans pour autant rejoindre les principes idéologiques de tels groupes", pointe le rapport.
Selon Jamie Bartlett, les responsables politiques européens doivent "se secouer, écouter et répondre" à ces partisans d’extrême-droite. Mais si une partie des militants rentre dans cette forme de populisme par dépit, ils sont tout de même 26% à estimer que "la violence est acceptable si elle conduit à imposer leurs idées".
08-11-11, Ronan Kerneur
Source : Le Nouvel Observateur