La communauté marocaine en Espagne, forte de 830.000 personnes (85% du total de la communauté musulmane), célébrera, lundi, la fête du sacrifice (Al-Adha ou Aid Al-Kebir) avec énormément de joie mais également de tristesse pour les particulières circonstances que traversent certains de ses membres fortement affectés par les dures conditions de vie à cause du chômage. C’est une fête reconnue officiellement et respectée par la société. Elle est également acceptée par la population autochtone comme preuve de la nouvelle réalité d’une Espagne multiculturelle. Toutefois, la célébration de cette fête invite à une réflexion multiple dans une société occidentale.
D’abord, il n’existe aucune norme d’ordre national ou municipal qui interdit les musulmans de sacrifier des moutons en cette fête. De même, elle est reconnue officiellement comme jour férié, depuis 2009, pour l’ensemble de la population des villes occupées de Sebta et Melilla. D’ailleurs, ces deux villes célèbrent pour la deuxième année consécutive la fête du sacrifice le même jour, coïncidant ainsi avec le calendrier marocain (7 novembre). Enfin, des cérémonies religieuses sont organisées dans l’ensemble du territoire espagnol sans nulle restriction, telle la prière collective de l’Aïd dans la matinée.
Dans différents entretiens à bâtons rompus, des immigrés marocains et gérants de Boucheries Halal à Madrid ont indiqué à Al Bayane, que la fête d’Al-Adha revêt un aspect particulier cette année comme conséquence de la crise économique et le chômage qui touche plus de 220.000 marocains en quête d’un emploi. D’autant plus que dans une boucherie Halal au quartier de Vallecas, le prix moyen par tête de mouton varie entre 160 et 200 euros, un montant qui donne à réfléchir pour de nombreux foyers de marocains dont tous les membres sont en chômage. Pourtant, a ajouté la même source, chaque boucherie Halal à Madrid a eu un carnet de commande de 200 à 250 têtes de mouton, une moyenne qui n’a guère varié par rapport à d’autres années. En l’absence de statistiques officielles et fiables, certaines associations musulmanes ont signalé à Al Bayane que près de 400.000 moutons seront sacrifiés cette année en Espagne, un chiffre qui serait proche de celui de l’année précédente. Selon une association d’immigrés, nombreux sont les marocains qui effectuent le déplacement au Maroc à cette occasion alors que ceux, en chômage chronique, préfèrent célébrer cette fête en compagnie d’autres compatriotes.
Comment sont-ils sacrifiés les moutons? Les autorités municipales interdisent le sacrifice d’animaux par les particuliers ou dans les foyers. Les normes sanitaires sont très strictes en cette matière. C’est la boucherie Halal qui s’en charge en utilisant les abattoirs municipaux de manière que le mouton sacrifié soit livré au client prêt à consommer. Dans ce contexte, les associations de voisins ont la pleine compétence de la gestion de l’ensemble résidentiel et tout usage des installations communes est réglementé selon la législation municipale. En général, les marocains préfèrent passer par la boucherie Halal pour éviter toute éventuelle altercation avec leurs voisins.
Les villes occupées de Sebta et Melilla sont les seules qui jouissent d’un traitement de faveur en Espagne dans la mesure où la fête du sacrifice est un jour férié. C’est aussi les seules villes où il est possible de recenser avec exactitude le nombre de moutons à sacrifier à cette occasion. Selon des statistiques d’associations musulmanes parvenues à Al Bayane, entre 11.000 et 12.000 têtes de mouton ont été introduites dans les deux villes, dont près de 6.000 à travers le poste frontalier de Nador-Melilla. Par contre, les autorités de Sebta interdisent l’importation d’animaux du Maroc. Les moutons sont en général achetés dans la région d’Estrémadure, connue pour une race de mouton similaire à Sardi marocain, et acheminés à travers le Détroit de Gibraltar à Sebta.
Dans l’ensemble du territoire espagnol, la fête d’Al - Adha commence généralement par la prière collective aux mosquées ou dans des aires spécialement aménagées sur autorisation préalable des autorités municipales.
En dépit des dures conditions de vie et les impératifs de la conjoncture économique, le marocain, en bon fidèle, célèbre l’Aïd - Al Adha comme manifestation de son attachement à sa confession, à sa culture et à ses convictions dans une société occidentale. Les médias espagnols ont salué cet esprit avec des chroniques sur la manière dont les musulmans célèbrent la fête du sacrifice.
12/11/2011
Source : AL Bayane