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Colloque de « Terre des hommes » sur les droits de l’enfant

Berne, 18 novembre 2011 (Apic) Les enfants mineurs migrants seuls sont une réalité quotidienne qui préoccupe « Terre des hommes » et les instances politiques et juridiques du pays. Dans la perspective du Forum mondial migration et développement (GFMD) qui se tiendra à Genève les 1 et 2 décembre prochains, l’organisation humanitaire a réuni à Berne, le 18 novembre, des spécialistes des droits de l’enfant. La question centrale du jour était celle du statut des enfants mineurs migrants seuls et de leur situation dans les pays d’accueil, en particulier en Suisse. Tous les intervenants insistent sur la nécessité de protéger l’enfant.

Le Forum mondial, un instrument précieux pour protéger les enfants

Au plan international, la Suisse est fortement engagée pour la protection de l’enfant. Edouard Gnesa, ambassadeur extraordinaire pour la coopération internationale en matière de migrations et ancien directeur de l’Office fédéral des migrations, souligne l’importance du Forum mondial par rapport aux instances onusiennes. Le Forum est informel, il est porté par les 160 Etats qui y participent. Il est ouvert à tous les pays qui désirent y participer. Et surtout il est orienté vers la pratique.

Pour le diplomate, la Suisse s’est engagée dans ce Forum pour plusieurs raisons. Notre pays est un pays de migrations. Au Forum mondial, on reçoit des idées et on peut proposer nos expériences et projets. C’est encore l’occasion de se construire un réseau global de contacts. La Suisse apporte une contribution importante à la compréhension globale de la migration. De plus, le Forum travaille avec les différents partenaires sociaux. De nombreux projets sont en chantier pour protéger les migrants mineurs non accompagnés, tels que le programme japonais de «facilitation de la scolarisation des enfants étrangers » ou celui, mexicain, de l’instauration « d’agents de protection de l’enfant ».

Disparition de mineurs

Pour Bernard Boëton, responsable de l’étude de Tdh « Des enfants de trop en Europe », les études conduites depuis 2008 amènent à voir que les disparitions ne sont pas des cas exceptionnels, mais des pourcentages réels d’enfants qui disparaissent ou partent des institutions. Souvent, les enfants quittent leur pays, mais n’ont pas vraiment de projets. Ce sont des enfants entre 14 et 18 ans qui s’enfuient au péril de leur vie. Là où ils vont, ils ne trouvent pas de structures adaptées, et sont traités comme des migrants avant d’être considéré comme des mineurs. Ils sont en fait dans la salle d’attente de l’expulsion.

Cinq principes devraient, selon lui, être adoptés pour ces mineurs. Le principe de l’égalité : il faut un statut juridique pour tout migrant mineur non accompagné. En même temps, il est nécessaire d’échanger des données et signaler au plus vite toute disparition. Le principe de non discrimination dit que l’enfant doit être considéré comme tel, et non en fonction de sa provenance ou d’autres critères. Le principe de vulnérabilité insiste sur le fait que ces enfants qui ont des attitudes d’adultes sont des êtres très vulnérables. Il s’agit de les traiter avec une certaine sensibilité. Le principe de différenciation révèle que chaque enfant est unique et ne peut évoluer que s’il est pris en considération comme tel. Il s’agit alors d’adapter les institutions au cas par cas. Enfin, le principe de réalité demande de chercher des solutions adaptées pour faire diminuer les disparitions. Si les renvois au pays n’ont pas été bien préparés, et s’il n’y a pas un suivi, il ne faut pas s’étonner de retrouver ces enfants et jeunes revenir dans la clandestinité.

Bernard Boëton conclut en affirmant qu’il est inadéquat d’assimiler tout mineur étranger à la délinquance.

Enfants mendiants dans les villes de Suisse

Le chef des services habitants, migration et police des étrangers de la ville de Berne, Alexander Ott, s’inquiète de l’augmentation, depuis 2009, de la mendicité des enfants et des personnes handicapées dans les rues des villes suisses. Décrivant les formes que revêt la criminalité liée à cette migration d’enfants : travail au noir, mendicité, vol, prostitution ou pornographie, commerce d’organes, etc. Il constate que les enfants sont souvent victimes de réseaux, de bandes organisées, dont ils ne peuvent s’échapper. La Ville de Berne a lancé en 2009 le projet « Agora » qui a pour but de suivre les déplacements des mendiants pour remonter aux commanditaires. Décrivant le modus operandi des bandes organisées, Alexander Ott montre la nécessité, pour venir en aide à ces enfants, de travailler en réseau avec toutes les instances à disposition. S’il y a des mesures à prendre, elles doivent être contre les bandes et les commanditaires. Pour les enfants, il s’agit de leur venir en aide et de les sortir de ce carcan.

Un exemple : les Roms

Joseph Aguettant, délégué de Tdh en Roumanie, présente des photos de jeunes Roms et décrit la misère des banlieues des pays de l’Est. Les enfants sont déracinés, en ce qu’ils doivent quitter le cursus scolaire pour venir en aide à la famille. Les Roms souffrent de multiples meurtrissures. Ils ont été esclaves durant 500 ans, la Roumanie ne les reconnaissant pas comme des citoyens à part entière jusqu’il y a 150 ans. Joseph Aguettant déplore que l’on ne parle jamais de l’holocauste tsigane qui a eu lieu durant la dernière guerre mondiale. Cela permettrait de mieux comprendre cette ethnie. Son engagement sur le terrain consiste à mettre en œuvre des moyens pour une inclusion sociale des enfants roms en Roumanie. La DDC a développé en ce sens un projet et voté un crédit de 12 millions de francs, qui sera bientôt débloqué, assure le diplomate Edouard Gnesa à l’homme de terrain Joseph Aguettant.

La Convention internationale des droits de l’enfant

Jean Zermatten, président du Comité des Nations Unies pour les droits de l’enfant, constate que les Etats ont toute latitude pour réglementer la migration, ce qui découle de leur souveraineté. Mais cette liberté est limitée par les conventions, notamment par celle des droits de l’enfant de l’ONU, et aussi par les accords de Dublin-Schengen. Face à l’ampleur de la migration de jeunes vers l’Europe de l’Ouest, les mesures prises par les différents Etats ne suffisent plus. Il faut élaborer une politique de migration internationale, en accord avec les pays pourvoyeurs d’enfants.

La convention de l’ONU fixe les obligations des Etats pour les enfants, avec en particulier celle de voir l’impact des décisions sur ces derniers. Jean Zermatten constate qu’en Suisse on a peu pris en compte l’intérêt supérieur de l’enfant et qu’il est nécessaire de tenir compte de différents critères : représentation indépendante de l’enfant (et non par l’Etat), condition concrète de l’enfant, application nuancée des mesures de contrainte, participation des enfants, sujets de droits, aux décisions qui les concernent.

Si les Etats ne peuvent réguler les flux migratoires, ils ont alors intérêt à trouver des solutions humaines pour les enfants migrants.

18/11/2011, Jacques Schouwey

Source : , Apic

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