Sommet citoyen de Dakar: près de 14.000 africains morts sur les routes de la migration clandestine
Près de quatorze mille africains sont morts en empruntant les routes périlleuses de la migration clandestine vers l'Europe entre 2006 et 2011, ont annoncé des acteurs des sociétés civiles réunis lundi à Dakar dans le cadre d'un "sommet citoyen des sociétés civiles du Nord et du Sud sur la migration".
"Que font les Etats africains pour protéger leurs ressortissants, alors que les pays européens ne lésinent pas sur les moyens pour obtenir la libération d'un seul de leurs concitoyens enlevé", s'est insurgé le coordonnateur de la manifestation, Mamadou Diouf qui déplore que des milliers d'africains sont réduits à l'errance et aux souffrances sur les routes de la migration clandestine à travers les déserts et la périlleuse traversée de la mer pour rejoindre les côtes européennes.
Par ce "contre sommet", le réseau des sociétés civiles du Nord et du Sud veulent ériger une tribune pour interpeller les officiels qui feront le déplacement à Dakar sur la question de la migration, des droits des migrants et personnes déplacées et déposer un mémorandum à la Conférence des Ministres.
La 3eme "Conférence ministérielle euro-africaine sur la Migration et le Développement" se tient, mardi et mercredi à Dakar, avec la participation des ministres compétents en matière de migration des pays d'Afrique centrale et de l'Ouest, du Maghreb et d'Europe.
Lors de ce rassemblement d'acteurs associatifs du Nord et du Sud mobilisés autour du slogan "Des ponts, pas des murs", les voix ont concordé pour dénoncer "les conséquences de la politique européenne d'immigration et proposer des alternatives à une Europe qui se transforme en forteresse, une Europe source de déséquilibre entre le Nord et le Sud".
Les critiques ont particulièrement fusé contre le "Frontex" (l'agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des Etats membres de l'Union) qui s'étend des côtes nord du Maghreb jusqu'à celle de l'Afrique de l'Ouest.
Les intervenants ont estimé que ce dispositif onéreux s'avère inefficace en se référant à la récente déferlante des migrants clandestins sur les côtes sud de l'Italie à partir de la Tunisie avec le lot de drames habituels.
Ils ont ainsi appelé à la suppression du Frontex qui s'est avéré inefficace et affecter plutôt son budget colossal à des projets de développement dans les pays du sud. Depuis que le Frontex a commencé à s'ériger en édifice entre l'Europe et l'Afrique, les migrants ont trouvé d'autres issues comme les pirogues qui empruntent la mer sur des distances de plus en plus longues avec un risque encore élevé, a-t-on expliqué à ce sujet.
Les organisations de la société civile ont également traité des accords de Cotonou sur la migration et particulièrement en son article 13 sur la réadmission des migrants clandestins refoulés.
Selon les activistes de la société civile, cet accord signé par l'Union Européenne et les pays ACP (Afrique-Caraïbes, Pacifique) est abusif pour les pays du sud qui sont obligés d'accepter la clause de la réadmission pour accéder à l'aide au développement.
Pour eux, l'aide européenne au développement ne doit pas être conditionnée au contrôle des flux migratoires, elle doit procéder d'une vision de solidarité et d'équité.
Par ce contre sommet, il s'agit de promouvoir une approche "Migration et développement " fondée sur les intérêts mutuels des migrants, des sociétés et des populations laborieuses du Nord et du Sud, indiquent les organisateurs, précisant que le contre-sommet de Dakar vise aussi à témoigner de "la mobilisation constante et sans faille des sociétés civiles face aux politiques migratoires des pays de l'Union Européenne".
Il est prévu que les travaux du sommet citoyen seront sanctionnés par un mémorandum qui sera adressé aux participants à la 3eme "Conférence ministérielle euro-africaine sur la Migration et le Développement".
Baptisée aussi "Processus de Rabat", la première conférence ayant été tenue dans la capitale du Royaume en juillet 2006, cette manifestation euro-africaine procédera à l'évaluation du "Programme de Coopération Triennal de Paris" (2008-2011), ainsi qu'à l'adoption d'une nouvelle stratégie qui fixera les priorités du dialogue sur la migration entre les pays partenaires pour la période 2012-2014.
22/11/2011
Source : MAP