L'UMP et le FN se livrent une rude concurrence pour dénoncer le projet PS d'élargir aux étrangers hors-UE le droit de vote aux élections locales, répétant une bataille déjà engagée en 2007 sur le thème de l'immigration, qui avait alors profité à Nicolas Sarkozy.
De l'interview accordée le 19 octobre à l'hebdomadaire d'extrême droite Minute par le ministre et co-fondateur du collectif UMP «la Droite populaire», Thierry Mariani, à la venue symbolique jeudi de Marine Le Pen devant les portes du Sénat, les deux camps n'auront pas ménagé leurs efforts pour condamner cette mesure qui n'a aucune chance d'être adoptée dans l'immédiat.
Signe de l'importance accordée par la majorité à cette question, c'est le Premier ministre, François Fillon, qui défendra la position du gouvernement jeudi au Sénat. Nicolas Sarkozy a qualifié d'«hasardeuse» la proposition de loi du PS, alors qu'il s'était montré plus ouvert sur le sujet dans le passé.
Dès la victoire de la gauche au Sénat, fin septembre, la Droite populaire s'était emparée des choses, multipliant les attaques jusqu'au lancement médiatisé d'une pétition, qui aurait recueilli depuis le 19 octobre près de 28.000 signatures, selon le collectif.
Une nouvelle pétition a vu le jour dix jours plus tard... sur le site du Front national, qui revendique lui 47.000 signatures. Et ce mardi, à deux jours du vote au Sénat, le parti d'extrême droite a lancé sa propre campagne, avec un «dépliant-pétition» imprimé à 1,4 million d'exemplaires et 120.000 affiches.
Le tract reprend la position ancienne du chef de l'Etat pour affirmer qu'«Hollande et Sarkozy sont pour» le droit de vote des étrangers et que seule Marine Le Pen s'y oppose.
«C'est profondément malhonnête, la position de Nicolas Sarkozy et de l'UMP est claire. Mais ils se réveillent un peu tard. On a tiré plus vite sur ce coup-là», se félicite auprès de l'AFP, Thierry Mariani.
«Stratégie de neutralisation préventive»
«Ils n'ont aucune légitimité sur le sujet», répond Nicolas Bay, conseiller à l'immigration de Marine Le Pen, qui parle d'une «fausse droite» sarkozyste et qualifie la Droite populaire d'«agence de communication frauduleuse».
Le FN prend néanmoins la question au sérieux. «On est obligé de faire du désenfumage. Le FN était un peu en roue libre sur ces questions en 2007. A l'époque, il a été pensé que la méthode de Sarkozy ne fonctionnerait pas. Or, elle a fonctionné en partie», convient M. Bay.
Avec 10,4% à la présidentielle, et moins de 5% aux législatives, le FN a gardé un souvenir cauchemardesque des scrutins de 2007, qui l'ont laissé sur la paille financièrement. Le parti d'extrême droite n'avait relevé la tête qu'aux régionales de mars 2010.
«Le FN sent à nouveau venir le danger, notamment en raison de la tonalité actuelle qu'a donnée Claude Guéant à la pré-campagne» présidentielle, souligne le politologue et spécialiste de l'extrême droite, Jean-Yves Camus.
«La campagne de l'UMP en 2007 avait consisté à couper l'herbe sous le pied du FN dans la surenchère rhétorique sur l'immigration», ajoute-t-il. En d'autres termes, selon lui, une «stratégie de neutralisation préventive».
Depuis des mois, les cadres frontistes répètent à l'unisson que «cette fois, Sarkozy ne refera pas le coup».
«En 2010, lorsque quelques membres de la droite classique ont essayé d'aborder le sujet de l'identité nationale, ils se sont cassé les dents lors du scrutin des régionales», en veut pour preuve le secrétaire général du FN, Steeve Briois.
6/12/2011
Source : Libération/AFP