La proposition de loi sur le droit de vote et d'éligibilité des étrangers non communautaires aux élections municipales qui doit être discutée jeudi 8 décembre au Sénat a déclenché les foudres de la droite.
Aiguillonnée par la Droite populaire, qui, dès la mi-octobre, a lancé une campagne de pétition "contre le vote des étrangers", l'UMP s'est lancée dans une véritable surenchère contre cette proposition, adoptée à l'Assemblée nationale en 2000, toujours bloquée depuis. Jean-François Copé, le secrétaire général de l'UMP, a accusé la gauche de vouloir "brader la citoyenneté". Le ministre de l'intérieur, Claude Guéant, a affirmé ne pas avoir "envie de voir, dans le département de Seine-Saint-Denis qui a une forte population étrangère, la majorité des maires devenir étrangers".
En renfort, l'UMP a sorti une affiche recensant le nombre d'immigrés dans les principales agglomérations. L'attaque est grossière, car le texte de la proposition de loi exclut que les étrangers, élus dans un conseil municipal, puissent exercer les fonctions de maire ou d'adjoint ni participer à l'élection des sénateurs.
Sur ce terrain de l'immigration, la droite entend ne pas se laisser "déborder" et elle s'empare de ce thème, en des termes similaires à ceux de l'extrême droite: "Le droit de vote doit être réservé aux Français et la nationalité française redevenir une fierté", rappelle sur son site la présidente du Front national, Marine Le Pen. Jeudi, le premier ministre lui-même, François Fillon, s'opposera, au nom du gouvernement, à cette proposition de loi.
ARDENTS DÉFENSEURS
A gauche, la mesure est défendue par le Parti socialiste (PS) depuis que le candidat François Mitterrand en avait fait la 80e de ses 110 propositions en 1981. Le PS l'a reprise dans son projet pour 2012, adopté à l'unanimité le 28 mai. Trente ans après, si les mots sont les mêmes, l'esprit ne l'est pas tout à fait.
"L'enjeu a changé de nature, explique Sandrine Mazetier, députée de Paris et secrétaire nationale du PS à l'immigration. La question n'est pas tant d'accorder un droit aux travailleurs immigrés vivant en France que de favoriser l'inclusion démocratique: comment comprendre que des ressortissants de l'Union européenne qui vivent depuis six mois en France puissent voter aux élections municipales et européennes et que ce droit ne soit pas accordé à des étrangers non citoyens de l'UE mais qui vivent en France depuis des années et exercent une citoyenneté de fait ?"
Les socialistes veulent croire que les Français sont prêts à cette évolution. "La droite cherche le clivage. Elle cherche à compenser l'abandon de souveraineté par le débat sur l'immigration au risque de favoriser le Front national. Mais l'opinion française a évolué", estime Manuel Valls, responsable de la communication auprès du candidat François Hollande.
Les écologistes sont les plus ardents à défendre cette proposition. L'idée d'en faire une mesure emblématique d'un Sénat passé à gauche a été défendue dès le lendemain des élections sénatoriales par Jean-Vincent Placé. Le nouveau sénateur de l'Essonne s'est parfois plaint d'une certaine "tiédeur" chez ses alliés socialistes. C'est la sénatrice (EELV) du Val-de-Marne, Esther Benbassa, qui en est la rapporteure, comme Noël Mamère, député (Verts) de la Gironde, l'avait été, en 2000, à l'Assemblée nationale.
7/12/2011
Source : Le Monde