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La misère des milliers d'Afghans poussés hors du Pakistan après le massacre de Peshawar

Au Pakistan, Neik Mohammad est devenu indésirable depuis décembre et le massacre taliban dans une école de Peshawar. Comme des milliers d'autres sans papiers afghans, il a dû tout quitter pour rentrer dans son pays, où seules une tente et la misère l'attendaient.

"Nous étions heureux là-bas, nous avions nos maisons et nos commerces", résume le jeune père de cinq enfants, rentré du Pakistan il y a deux mois avec sa famille élargie de 16 personnes.

Dans la foulée du raid taliban contre une école fréquentée par des enfants de militaires à Peshawar, la plus meurtrière de l'histoire du pays avec ses 154 morts, le climat s'est nettement dégradé pour les Afghans établis dans le nord-ouest du Pakistan, à la lisière de l'Afghanistan.

Depuis des années, des responsables pakistanais accusent les quelque trois millions de réfugiés afghans, légaux et illégaux, de contribuer à déstabiliser le pays en étant proche des groupes criminels ou des rebelles talibans.

Après Peshawar, la pression est montée d'un cran supplémentaire sans qu'un lien soit concrètement établi entre ces réfugiés et l'attaque talibane.

Partis en exil pour certains il y a trois décennies pour fuir la guerre, ces Afghans sont aujourd'hui repoussés vers leur pays d'origine, bien que la situation y reste très instable.

Saïd Ahmad, 63 ans, la barbe blanche, est le chef d'une de ces familles afghanes revenues du Pakistan. "Les Pakistanais étaient très gentils avec nous, mais leurs autorités perquisitionnaient nos maisons, nous dérangeaient, et nous déshonoraient", dit-il.

Depuis janvier, environ 70.000 Afghans ont ainsi franchi la frontière pour fuir les "pressions" côté pakistanais, soit neuf fois plus que pendant la même période en 2014.

Outre les 64.000 rapatriés "spontanés", qui ont choisi de rentrer volontairement en Afghanistan, près de 6.000 Afghans sans papiers ont été expulsés par le Pakistan, détaille l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).

Les trois quarts se sont installés juste derrière la frontière, près de Jalalabad, la grande ville du sud-est afghan. Les autres sont partis vers Kaboul ou les provinces du centre dont ils sont originaires.

La majorité d'entre eux sont des jeunes adultes et des enfants. Ils sont nés au Pakistan, pendant que la guerre faisait rage dans leur pays d'origine, et n'avaient jamais mis les pieds en Afghanistan.

 'Défi humanitaire'

De retour au pays, ils se sont installés là où ils ont pu, souvent sur des parcelles de terrain poussiéreuses, entourées de hauts murs de terre séchée. A Behsud, un petit village proche de Jalalabad, ils sont des centaines à avoir planté leurs tentes et improvisé des abris de fortune.

Dépourvus de papiers afghans, et arrivés sans rien ou presque, ils ne peuvent espérer de sitôt des emplois.
"La vie est très difficile pour nous maintenant", raconte Khan Padshah, 35 ans, père de sept enfants, revenu en Afghanistan au début du printemps, après avoir été emprisonné par la police au Pakistan.

A l'intérieur de l'enclos, sa tente abrite trois lits de camp, pour une famille de neuf personnes. Et la chaleur de l'après-midi s'accumule à l'intérieur en ce mois de mai déjà caniculaire.

"La plupart de ces sans papiers sont originaires de la province de Kunar (est, ndlr), qui est malheureusement un des points chauds du conflit afghan", explique Rahim Gul Amin, le coordinateur du Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC) à Jalalabad. Ils n'ont donc pas pu aller plus loin.

Au Pakistan, les autorités assurent ne pas avoir refoulé les réfugiés légaux, mais seulement les sans papiers. "La sécurité s'est beaucoup améliorée depuis que nous avons expulsé tous les sans papiers", soutient Imtiaz Qureshi, un haut responsable de la province du Khyber Pakhtunkhwa (nord-ouest), où vivent la majorité des réfugiés afghans.

Côté afghan, cet afflux est un problème majeur pour le gouvernement et les organisations humanitaires. "A la frontière, c'est un vrai défi humanitaire d'aider des gens qui reviennent, qui n'ont rien et qui ont été hors du pays pendant des décennies", estime Matthew Graydon, de l'OIM.

Jusqu'à présent l'organisation internationale n'a pu aider que 9 à 12% des Afghans revenus du Pakistan depuis le début de l'année. Mais elle estime au total que 30 à 40% d'entre eux ont besoin d'une aide d'urgence.

13 mai 2015, Emmanuel PARISSE

Source : AFP

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