Les Pays-Bas ont décidé, au début de ce mois, de surseoir à la dénonciation de l'accord maroco-hollandais sur la sécurité sociale signé en 1972 afin de permettre aux deux parties d'engager des négociations «sérieuses» et «substantielles» pour parvenir à «un accord qui préserve les intérêts des deux pays».
Pour Abdou Menebhi, président du Centre euro-méditerranéen de migration et de développement (EMCEMO), cette décision est provisoire. Ce qui signifie que le dossier n’est pas encore clos. Pour jeter la lumière sur cela, son centre a organisé une conférence conjointe avec l’Organisation marocaine des droits de l’Homme hier matin au siège de cette dernière à Rabat.
Il a, dans ce cadre, rappelé quelques faits. Ainsi le gouvernement des Pays-Bas avait réduit de 40 % en 2013 les pensions des retraités marocains ayant travaillé dans ce pays et qui résident, à présent, au Maroc. Rabat n’a pas réagi, et ce sont les associations de la société civile hollandaise qui ont attaqué cette décision devant la justice qui a tranché, en fin de compte, en faveur des retraités, car la décision d’Amsterdam enfreignait les dispositions de la convention de 1972 liant le Maroc et les Pays-Bas.
Déçues par cette décision, les autorités hollandaises ont, par la suite, recouru à un nouveau stratagème : elles ont décidé unilatéralement d’annuler ledit accord.
Pour Abdou Menebhi, elles ont suspendu provisoirement leur projet de loi, mais la balle est toujours dans le camp du gouvernement marocain qui ne doit pas faire de concessions à ce propos. «Nous avons déjà des expériences avec le gouvernement marocain et je crains qu’il cède. Mais nous ne cèderons pas. Nous allons recourir tant à la justice qu’aux manifestations pour dénoncer toute atteinte aux acquis des Marocains et l’islamophobie ainsi que la xénophobie dont ils sont victimes aux Pays-Bas», a-t-il précisé.
Il a également annoncé qu’Anis Birou, ministre chargé des Marocains résidant à l'étranger et des Affaires de la migration, tiendra prochainement une réunion avec les associations de la société civile, «mais seulement avec celles qui ont été triées sur le volet par les consuls et les ambassadeurs. Le gouvernement a la même mentalité que celle qui était en vogue à l’époque de Driss Basri», a-t-il martelé dans une déclaration à Libé.
Le président d’EMCEMO a, par ailleurs, dénoncé la pression exercée sur les 6.600 retraités marocains par les autorités hollandaises via le contrôle de leurs biens au Maroc «en connivence avec les autorités marocaines. «C’est un abus auquel il faut faire face».
A rappeler que les autorités hollandaises ont décidé au cours de l’année dernière de mettre fin au traité de sécurité sociale qui les liait au Royaume et le ministre des Affaires sociales, Lodewijk Asscher, avait tenté de définir de nouvelles modalités de versement des allocations familiales pour les Marocains qui ne résident pas aux Pays-Bas.
Récemment, le ministre de l’Emploi et des Affaires sociales, Abdesslam Seddiki, avait déclaré à une chaîne de télévision hollandaise que les autorités marocaines ne sont pas égotistes et qu’elles prennent en compte les intérêts des Pays-Bas, mais elles demandent que ces derniers prennent en considération ceux du Maroc. Il avait également précisé que la baisse des allocations pour les ayants droit marocains résidant aux Pays-Bas est une question sensible pour le Maroc qui n’est pas près de céder d’un iota sur les acquis de ses ressortissants qui font partie de leurs droits fondamentaux et qu’il s’agit des allocations auxquelles ils ont cotisé.
Le ministre avait assuré que Rabat est prêt à négocier à condition que le gouvernement néerlandais annonce le retrait du projet de loi sur l'annulation de l'accord bilatéral de 1972.
19 Mai 2015, Mourad Tabet
Source : Libération