De nouvelles tensions ont opposé lundi soir des migrants et la police à Lesbos, une île grecque de la mer Egée, au moment où l'Europe annonçait des gestes de solidarité face à un afflux de réfugiés qui ne se tarit pas.
Plus de 15.000 personnes s'entassaient dans la journée sur Lesbos, soit environ un cinquième de la population de l'île, porte d'entrée vers l'Europe pour ceux fuyant la guerre qui déchire la Syrie.
Et, dans la soirée, des policiers équipés de matraques peinaient à contrôler une foule de quelque 2.500 migrants qui attendaient de pouvoir embarquer sur un ferry pour Athènes affrété spécialement par le gouvernement grec.
Les migrants poussaient vers l'avant, voulant désespérément monter à bord du navire pour continuer leur périple vers l'ouest de l'Europe.
Les autorités d'Athènes, qui jugent la situation "au bord de l'explosion" à Lesbos, ont pris une série de mesures d'urgence pour soulager Mytilène, chef-lieu de l'île, accélérer le transfert des déplacés vers la capitale grecque et faciliter leur prise en charge.
Par ailleurs, plus de 2.000 migrants sont entrés de Grèce en Macédoine lundi tandis que quelque 8.000 autres attendaient de pouvoir franchir la frontière pour rejoindre l'Europe occidentale. A plusieurs reprises, la police macédonienne est intervenue à coups de matraque.
Depuis le début de l'année, 366.402 personnes sont arrivées par la Méditerranée, a annoncé le Haut-Commissariat de l'ONU (HCR) pour les réfugiés. 2.800 autres sont mortes ou ont été portées disparues.
Selon l'envoyé spécial de l'ONU en Syrie, Staffan de Mistura, des milliers de nouveaux réfugiés syriens pourraient vouloir se rendre en Europe à cause de la poursuite de la guerre civile chez eux.
Après moult tergiversations, le Premier ministre britannique David Cameron a annoncé que son pays était prêt à accueillir 20.000 Syriens sur cinq ans, et la France s'est engagée à accepter 24.000 réfugiés en deux ans, dans le cadre d'un plan de répartition de l'Union européenne.
Federica Mogherini, qui dirige la diplomatie de l'Union européenne, a salué cette décision de Paris, appelant tous les membres de l'UE à agir "avec le même courage".
Sans politique d'ensemble, ce sera "la fin de (l'espace de libre-circulation) Schengen", a averti le président français François Hollande qui souhaite aussi une conférence internationale sur la crise.
"Ce que nous vivons est quelque chose qui va (...) nous changer, et nous voulons que le changement soit positif et nous pensons que nous pouvons y arriver", a souligné la chancelière Angela Merkel à Berlin, détaillant un programme fédéral de six milliards d'euros pour 2016 qui vise à améliorer la prise en charge et l'intégration des migrants.
La dirigeante conservatrice a souligné que la facture pourrait atteindre un total de 10 milliards d'euros l'année prochaine.
Début d'un 'véritable exode'
Selon le président du Conseil européen, Donald Tusk, cet "exode" risque de durer. "La vague actuelle d'émigration n'est pas un incident ponctuel mais le commencement d'un véritable exode, ce qui signifie que nous devrons traiter de ce problème pendant bien des années à venir", a expliqué M. Tusk à Bruxelles. Il a ajouté qu'il était "très important d'apprendre comment vivre avec elle (la crise) sans s'accuser les uns les autres".
Encore 3.000 migrants étaient parvenus lundi en milieu d'après-midi en Allemagne, à l'issue d'un week-end qui a vu l'arrivée dans ce pays de 20.000 personnes en provenance de Hongrie via l'Autriche.
La Commission européenne va proposer mercredi de répartir entre Etats membres de l'UE 120.000 réfugiés au cours des deux prochaines années. Un projet qui va s'ajouter à la réinstallation de 40.000 migrants annoncée en mai.
Ces quotas d'accueil placent l'Allemagne en première ligne (26,2%, 31.443 réfugiés), suivie de la France (20%, 24.031) et de l'Espagne (12,4%, 14.931).
L'Allemagne s'attend à recevoir 800.000 demandes d'asile cette année, quatre fois plus que l'année précédente. Un mouvement qui n'a fait que croître depuis que les autorités ont décidé de ne plus renvoyer les Syriens vers leur point d'entrée en Europe.
'Un seul gagnant', l'EI
Le principe des quotas est loin de faire l'unanimité, notamment dans l'est de l'Europe.
Le Premier ministre hongrois Viktor Orban a d'ores et déjà jugé prématuré de débattre de la répartition tant que l'afflux de migrants ne serait pas sous contrôle.
Des centaines d'entre eux ont marché à contresens sur une autoroute hongroise sur une quinzaine de kilomètres en direction de Budapest lundi avant d'accepter d'être transférés dans un centre d'accueil.
Au Danemark, la police a partiellement fermé dans la soirée une autoroute, empêchant ainsi des réfugiés syriens de marcher vers la Suède.
Au-delà des frontières européennes, le Québec a annoncé qu'il accueillerait 3.650 réfugiés syriens d'ici à décembre.
Le président vénézuélien Nicolas Maduro a déclaré qu'il avait ordonné au ministère des Affaires étrangères d'organiser l'accueil de 20.000 réfugiés de Syrie au sein de la communauté syrienne du Venezuela.
La présidente brésilienne Dilma Rousseff a dit que son pays accueillait à "bras ouverts" les réfugiés syriens et le Chili "travaille pour accueillir un nombre important de réfugiés", selon la présidente Michelle Bachelet.
"Pourquoi les gens partent-ils ? Parce qu'ils ont perdu tout espoir après cinq ans de conflit et qu'ils ne voient qu'un seul gagnant, Daech (acronyme arabe de l'organisation Etat islamique)", a déploré l'envoyé spécial de l'ONU en Syrie, plaidant pour qu'on trouve une solution à ce conflit, "sinon il ne restera plus de Syriens".
8 sept 2015,Katy LEE
Source : AFP