Les Pays-Bas qui faisaient, de par le passé, figure de terre traditionnelle d'accueil des réfugiés, semblent aujourd'hui renoncer, bon gré mal gré, à ce statut. L'actuelle crise migratoire a dévoilé un nouveau visage du royaume batave, désormais moins tolérant et moins ouvert, voire parfois agressif.
Aux Pays-Bas d'aujourd'hui, le quotidien des réfugiés est fait, entre autres, de débats politiques interminables et parfois violents, d'attaques contre des centres d'accueil, de menaces contre des responsables politiques favorables à l'asile et de mise en garde que leur vie au royaume de la Tulipe ne sera pas meilleure.
En effet, le gouvernement néerlandais, sous pression face à la montée de l'extrême-droite, n'a le choix que de surfer, lui aussi, sur la vague du durcissement face aux réfugiés en annonçant de nouvelles mesures pour dissuader de nouveaux réfugiés, accusés par des citoyens et certains politiciens d'exploiter les systèmes social et de santé, notamment.
Pas de priorité en matière d'accès au logement mais des abris 'sobres'' type container ou tentes, pas d'indemnité au logement et pas d'aides sociales non plus, telles sont les grandes lignes de la nouvelle politique promue par le gouvernement libéral-travailliste pour retirer le tapis sous les pieds du parti pour la liberté (PVV/extrême-droite) à l'approche des élections législatives.
Une surenchère politique qui poussera le gouvernement néerlandais à adresser une lettre ouverte aux demandeurs d'asile, les avertissant qu'ils ne doivent s'attendre aux Pays-Bas qu'à un "accueil austère", pour les décourager de venir dans le royaume.
La lettre, écrite en anglais et signée par le secrétaire d'Etat à la sécurité et à la justice, prévient qu'il n'y pas assez de places dans les centres d'accueil officiels, ce qui signifie que les demandeurs d'asile vont devoir se contenter d'un logement dans des centres de sport ou sous des tentes.
C'est 'la réponse juste et supportable'' évoquée par le Premier ministre Mark Rutte réagissant aux violences survenues dans certaines localités, notamment au village Oranje où le secrétaire d'Etat à la justice a été pris à partie par des habitants en colère à l'issue d'une réunion sur ce dossier épineux.
Un incident qui n'est toutefois pas isolé. Depuis des mois, la tension est vive dans différentes régions du royaume, où des centres ont été attaqués, des réfugiés intimidés, des voitures de responsables locaux incendiés et pis encore, des leaders politiques menacés de mort.
Des développements malheureux qui ont choqué les dirigeants du pays tout en leur rappelant qu'un soutien aux réfugiés pourrait désormais leur coûter cher aux législatives 2017, surtout que les sondages font état d'une montée fulgurante de l'extrême-droite.
Si les élections se déroulent actuellement, le PVV remporterait 27 à 31 sièges sur les 150 que compte la deuxième Chambre du parlement néerlandais, selon un récent sondage.
Ils se sont par ailleurs rendus compte, mais tardivement, que leur discours est pour quelque chose quant aux actes de violence liée à l'accueil des réfugiés.
Pour sauver les meubles, les présidents de groupes parlementaires à la chambre des représentants, y compris du PVV, ont signé, la semaine dernière, une déclaration où ils disaient 'se distancier de l'endurcissement du débat sur l'asile aux Pays-Bas'', et ce, sur proposition du jeune chef de file des Verts, Jesse Klaver.
'Ne confondez pas les menaces et les insultes avec les arguments ( ) Aux Pays-Bas, le débat se fait sans menaces, sans intimidation, ni violences'', ont-il averti.
Selon une récente enquête, 78 pc des Néerlandais qui soutiennent le parti pour la liberté, sont en faveur de la fermeture des frontières pour stopper les flux des réfugiés, contre 31 pc des sympathisants du SP (opposition) et 28 pc du parti libéral.
Des chiffres qui en disent long sur le sentiment de rejet des réfugiés dans ce pays de l'Union européenne, dont les dirigeants mènent une course contre la montre pour endiguer les flux migratoires.
Pas moins de 35.900 demandeurs d'asile sont arrivés à fin juin dernier aux Pays-Bas, un chiffre qui doit monter à 60.000 d'ici la fin de l'année.
Par rapport à la Hongrie, l'Allemagne ou l'Autriche, les Pays-Bas sont relativement peu touchés par les flux de réfugiés fuyant la guerre en Syrie et ailleurs. Sauf que le royaume n'arrive plus, malgré les grands efforts des ONG locales, à suivre le nombre exponentiel des nouveaux arrivants.
On prévoit dans ce cadre la construction de quelques 10.000 logements "sobres" de type container ou préfabriqué en six mois, pour alléger la pression sur les centres d'accueil et libérer de la place aux nouveaux arrivants.
Les Pays-Bas, rappelle-t-on, sont un des principaux contributeurs pour l'accueil des réfugiés aux frontières de la Syrie. Le gouvernement néerlandais plaide fortement pour la création de centres d'accueil bien équipés dans des régions sûres limitrophes des zones en conflit pour stopper les flux des migrants en direction de l'Europe.
03 nov. 2015,Said Youssi
Source : MAP