Droite populiste et partisans de la fermeté en Europe sur l'accueil des réfugiés ont durci le ton lundi après les attentats de Paris, conséquence à leurs yeux de l'afflux de milliers de réfugiés en provenance du Moyen-Orient.
Selon les enquêteurs français, les empreintes digitales d'un des auteurs des attaques vendredi près du Stade France, près duquel un passeport syrien a été retrouvé, concordent avec celles d'un homme contrôlé le mois dernier comme réfugié en Grèce.
La Hongrie, connue pour sa ligne intransigeante à l'égard des migrants, s'est empressée d'établir un lien. Son Premier ministre, le populiste Viktor Orban, a dénoncé lundi les terroristes qui "ont exploité les migrations de masse" en se mélangeant à la foule des réfugiés.
En Allemagne, une dizaine de milliers de sympathisants du mouvement islamophobe Pegida ont manifesté dans la soirée à Dresde (est), accusant l'afflux de migrants d'être responsable de la tragédie de Paris qui a fait 129 morts.
"Ces attentats ne viennent pas de nulle part, ils sont le résultat d'une politique d'immigration de gens n'ayant pas du tout les mêmes valeurs", a clamé l'un des responsables du mouvement, Siegfried Däbritz, sous les clameurs de la foule hurlant "Merkel doit partir!".
Plusieurs des partisans du mouvement des Patriotes Européens contre l'Islamisation de l'Occident (Pegida) ont brandi des drapeaux français. Et une banderole "Hier à Paris - Demain en Allemagne".
La chancelière allemande Angela Merkel doit faire face dans son pays à une contestation croissante de sa politique d'ouverture aux migrants, dont près d'un million sont attendus cette année.
Certains élus bavarois de sa famille politique conservatrice l'exhortent à arrêter le flux des migrants et ont lié la question des réfugiés au terrorisme. "Paris a tout changé", a estimé un ministre CSU de Bavière, Markus Söder, jugeant "naïf" de croire que des islamistes ne figurent pas parmi les migrants en route vers l'Europe.
Eviter les amalgames
Parmi les voix qui s'élèvent en Europe pour réclamer la fermeté à l'égard des migrants figurent des responsables politiques de pays pourtant proportionnellement peu mis à contribution dans l'accueil des migrants venus des Balkans, comme la France, où la chef de l'extrême droite (opposition) a appelé à "l'arrêt immédiat" des arrivées, ou encore la Pologne.
Marine Le Pen a ainsi estimé que les craintes de voir des terroristes potentiels se mêler aux migrants étaient "une réalité malheureusement concrétisée".
En Pologne, où un nouveau gouvernement conservateur et eurosceptique est au pouvoir, le chef de la diplomatie, Witold Waszczykowski, a proposé de renvoyer les migrants syriens se battre chez eux.
Ceux qui, empruntant les voix maritimes très périlleuses pour rejoindre l'Europe, "sautent de leurs bateaux gonflables avec leur iPad à la main" et cherchent en premier à recharger leur téléphone portable, pourraient tout aussi bien repartir combattre l'EI dans leur pays, a-t-il estimé.
Plus de 800.000 migrants sont arrivés en Europe par la mer depuis le début de l'année, en majorité depuis le Moyen-Orient.
Avant les attentats de Paris, de nombreux pays d'Europe centrale et de l'Est rechignaient ou refusaient d'accueillir les réfugiés, tentant de les repousser en érigeant des clôtures ou en les orientant vers des Etats voisins.
Et aux Etats-Unis, trois Etats, le Texas, l'Alabama et le Michigan, ont annoncé lundi leur refus d'accueillir des réfugiés syriens dans l'espoir d'éviter des attentats. Pourtant le pays n'a prévu d'accueillir qu'un nombre limité de réfugiés.
Les responsables allemands appellent dans ce contexte au calme. Plusieurs ministres, dont celle de la Défense Ursula von der Leyen, ont enjoint les Allemands à ne pas mélanger la problématique des réfugiés avec celle du terrorisme.
Un message également martelé lundi par le président américain Barack Obama: "les gens qui fuient la Syrie sont ceux qui souffrent le plus du terrorisme", a-t-il dit.
16 nov. 2015,Yannick PASQUET
Source : AFP