samedi 23 novembre 2024 17:53

Les Mexicains plus nombreux à quitter les Etats-Unis qu'à s'y installer

Pour beaucoup de Mexicains, le rêve américain n'est plus ce qu'il était: ils sont désormais plus nombreux à repartir au pays qu'à venir s'installer aux Etats-Unis, face à la récession et aux menaces d'expulsions.

Entre 2009 et 2014, un million de Mexicains ont fait leurs valises pour partir se réinstaller dans leur mère patrie, tandis qu'au même moment seuls 870.000 d'entre eux passaient la frontière vers le Nord, d'après une étude du centre de réflexion Pew Research.

Pourquoi cette soudaine inversion d'un flux migratoire qui se dirigeait depuis des décennies essentiellement vers les Etats-Unis ?

Beaucoup de Mexicains, qui représentent la première minorité des Etats-Unis, "passent des périodes prolongées sans trouver de travail ou avec un emploi irrégulier, d'autres ont perdu la maison où ils avaient investi toutes leurs économies pendant des années", a expliqué à l'AFP Ruben Hernandez-Leon, directeur du centre d'études mexicaines de l'université UCLA.

La crise économique démarrée en 2008 a particulièrement heurté des industries qui employaient beaucoup d'immigrés hispaniques, comme la construction. Se retrouvant sans travail, beaucoup ont ensuite perdu la maison qu'ils avaient achetée pendant le "boom" immobilier.

"Je suis venu ici parce que les choses allaient très mal (au Mexique) et ici il était plus facile de gagner des dollars. Mais maintenant il faut lutter pour obtenir quelque chose", a raconté à l'AFP Salvador Rodriguez, un Mexicain de 57 ans qui travaille dans le bâtiment à Los Angeles depuis 2001.

Pour le moment, il n'a pas l'intention de rentrer au pays, mais son collègue Miguel Garcia, 48 ans, est tenté.
"Si c'est pour que ce soit difficile, autant que ce soit là-bas avec mes parents et mes frères", estime-t-il.
Ceux qui sont les plus vulnérables à la crise économique américaine et aux expulsions sont les sans-papiers, soit 11 millions des quelque 55 millions d'hispaniques qui vivent aux Etats-Unis.

Le président Barack Obama a lancé par décret en novembre 2014 une réforme migratoire pour tenter de leur donner un statut.

Elle s'est retrouvée bloquée devant les tribunaux après que les gouverneurs de 26 Etats américains eurent contesté en justice sa constitutionnalité.

Espoirs déçus

Pendant que les efforts du président Obama pour régulariser les sans-papiers restaient lettre morte, les expulsions, elles, se sont accélérées: depuis son arrivée à la Maison Blanche il y a sept ans, quelque 2,5 millions de personnes ont été renvoyées au pays, pour la plupart des Mexicains.

"Chaque expulsion se ressent sur une famille toute entière. Quand un être aimé ou celui qui gagne l'argent de la famille est expulsé", les autres suivent, souligne auprès de l'AFP Armando Vazquez-Ramos, professeur à l'université UC Long Beach et directeur d'un centre d'études mexicano-californiennes.
Selon lui, M. Obama a généré "beaucoup d'espoir" pour résoudre le problème des sans-papiers "mais sa politique a eu pour conséquence plus de 700.000 enfants nés aux Etats-Unis qui se retrouvent à présent exilés au Mexique".

Les nouveaux chiffres sur les départs de Mexicains, s'ils se confirment sur la durée, pourraient ouvrir la porte à un changement de discours politique sur eux et sur la communauté hispanique.

Ces derniers mois, ils ont été particulièrement visés par le candidat républicain à la Maison Blanche Donald Trump qui les a qualifiés de violeurs et criminels et a promis d'expulser tous les sans-papiers, tout en contraignant le Mexique à financer la construction d'un mur le long de la frontière entre les deux pays.

Hillary Clinton et Bernie Sanders, candidats démocrates, se sont quant à eux montrés ouvert à une réforme migratoire s'ils étaient élus.

Le Mexique, pendant ce temps, se retrouve à son tour face à l'afflux de nouveaux venus, attirés par son taux de croissance de 2,14% en 2014, prévu à 2,2% cette année.

Ils y rencontrent de nouveaux problèmes, comme de se retrouver, soudain, sur-qualifiés pour beaucoup d'emplois locaux.

2 déc 2015,SARA PUIG

Source : AFP

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