Les attentats de Paris et de San Bernardino ont libéré en Occident un discours antimusulman d'une violence inédite, de l'Américain Donald Trump qui veut interdire l'entrée des musulmans aux Etats-Unis à l'Australien Tony Abott qui parle de "supériorité" de la culture occidentale.
Et le Front national d'extrême droite qui vient de réaliser un score historique aux élections régionales en France, trois semaines après le carnage qui a fait 130 morts à Paris, n'est pas en reste.
Insensible aux premières condamnations internationales, le favori pour l'investiture du parti républicain à la Maison Blanche Donald Trump a défendu mardi son idée de barrer l'entrée des musulmans aux Etats-Unis, estimant que Paris "devrait peut-être" adopter la même stratégie, au vu des "immenses" problèmes que connaît la ville avec sa communauté musulmane.
Il affirme que de nombreux musulmans sont favorables au jihad contre les Américains, et en veut pour preuve que les auteurs des carnages de Paris et de San Bernardino (sud-ouest des Etats-Unis, 14 morts) étaient musulmans.
Les propos incendiaires de M. Trump ont déchaîné un torrent de protestations et la Maison Blanche est sortie de sa réserve habituelle pour enjoindre le parti républicain à couper ses liens avec "un aboyeur de foire" afin de ne pas se laisser entraîner "dans les poubelles de l'Histoire".
Le président américain Barack Obama avait appelé dimanche ses compatriotes à ne pas céder à la tentation de stigmatiser les musulmans, assurant que le groupe Etat islamique "ne parle pas au nom de l'islam".
En Grande-Bretagne, une pétition sur le site du Parlement britannique appelant à empêcher l'entrée de Donald Trump au Royaume-Uni avait recueilli plus de 260.000 signatures mercredi en fin de journée.
Le gouvernement local écossais a annoncé mercredi qu'il lui retirait le titre "d'ambassadeur d'affaires" qu'il détenait depuis 2006, et l'université Robert Gorbon (RGU) d'Aberdeen (est de l'Écosse) l'a dépouillé d'un doctorat honorifique.
Les remous provoqués par les propos polémiques de Donald Trump se sont fait sentir jusqu'en Iran, où le président Rohani a jugé ces déclarations "des plus bizarres", accusant les Etats-Unis d'avoir "eux-mêmes créé le terrorisme".
"L'islam est la religion de la bonté et de la paix", a déclaré M. Rohani.
'Pas une terre d'islam'
Mais en Australie, l'ancien Premier ministre conservateur australien Tony Abbott a déclenché une autre tempête en faisant écho aux propos du milliardaire américain.
L'Occident doit "être prêt à proclamer la supériorité évidente de notre culture sur une culture qui justifie le fait de tuer des gens au nom de Dieu", a déclaré M. Abbott dans une tribune publiée mercredi par le Daily Telegraph.
"L'islam n'a jamais connu sa propre version de la Réforme et des Lumières, et l'acceptation consécutive du pluralisme et de la séparation de l'Eglise et de l'Etat", ajoute l'ancien séminariste catholique.
Les propos de Tony Abbott ont suscité de vives réactions, le chef de l'opposition travailliste Bill Shorten l'accusant de vouloir diviser le pays.
En France, l'étoile montante du Front National, Marion Maréchal-Le Pen, a affirmé la semaine dernière que les musulmans ne pouvaient être Français "qu'à la condition seulement de se plier aux moeurs et au mode de vie" hérités de l'histoire notamment chrétienne du pays.
"Nous ne sommes pas une terre d'islam, et si des Français peuvent être de confession musulmane, c'est à la condition seulement de se plier aux moeurs et au mode de vie que l'influence grecque, romaine, et seize siècles de chrétienté ont façonné", a-t-elle ajouté.
Elle s'inscrit dans le sillage de déclarations d'autres populistes européens: le Premier ministre hongrois Viktor Orban, tenant d'une ligne dure dans le dossier des migrants, estimait en octobre que l'islam "n'appartient spirituellement pas à l'Europe" et établit des règles "d'un autre monde".
Autre habitué de ce type de déclarations, le député anti-islam néerlandais Geert Wilders a salué les propos de Donald Trump, disant son espoir de le voir accèder à la présidence des Etats-Unis: "Ce sera bon pour l'Amérique, ce sera bon pour l'Europe. Nous avons besoin de leaders courageux", a-t-il déclaré.
Le Premier ministre israélien conservateur Benjamin Netanyahu recevra le milliardaire américain le 28 décembre, a-t-on appris mercredi, et ce malgré l'indignation soulevée par ses propos en Israël. Plus de 30 députés israéliens, sur 120, ont adressé une lettre à M. Netanyahu pour lui demander d'annuler cette rencontre et de condamner les paroles de M. Trump.
09 déc 2015
Source : AFP