La Commission européenne va présenter mardi un projet "audacieux" de corps européen de gardes-frontières qui, selon les médias, va permettre d'imposer l'intervention de ce corps à un Etat membre ne parvenant plus à contrôler une frontière extérieure de l'UE.
Mais ce projet, attendu depuis plusieurs semaines, s'il est accepté par les Etats membres de l'UE, n'ira pas jusqu'à priver un pays de sa souveraineté dans la gestion de ses frontières, a nuancé une source européenne interrogée par l'AFP.
"Les autorités nationales réussissent à faire de leur mieux, mais elles ne sont pas préparées pour" l'afflux actuel de demandeurs d'asile, a reconnu vendredi le commissaire européen aux migrations, Dimitris Avramopoulos, lors d'un forum sur la Méditerranée à Rome.
"Nous avons besoin de quelque chose de plus complet et de mieux structuré", a-t-il ajouté, sans évoquer les questions de souveraineté. "Les Etats membres ne peuvent pas agir tout seuls. Nous avons besoin de plus d'instruments", a-t-il plaidé.
Le projet de création d'un corps européen de gardes-côtes et de gardes-frontières, annoncé depuis septembre, doit être présenté mardi devant le Parlement européen à Strasbourg, a confirmé vendredi le porte-parole de la Commission européenne, en évoquant une "proposition importante et audacieuse".
Il fait partie d'une série de nouvelles propositions préparées par l'exécutif européen pour que l'UE reprenne la maîtrise de ses frontières extérieures, mises sous pression par un afflux sans précédent de migrants.
"Le contrôle effectif de nos frontières extérieures est une condition vitale pour s'assurer que les accords de Schengen (régissant la libre-circulation) ne soient pas menacés", a expliqué devant la presse le porte-parole de la Commission, Margaritis Schinas, qui s'est refusé à dévoiler plus en détails le projet.
- Réserves à l'Est
Selon le quotidien belge Le Soir ainsi que le Financial Times, l'exécutif européen souhaiterait qu'il soit possible d'imposer une intervention de gardes-frontières européens à un Etat déficient dans le contrôle d'une frontière extérieure de l'UE.
L'agence européenne Frontex, chargée de la coordination de la gestion des frontières extérieures, dépend des ressources apportées par les Etats membres et ne peut intervenir dans sa forme actuelle qu'à la demande d'un Etat membre.
C'est ce que Frontex s'apprête à faire à la frontière gréco-macédonienne et en mer Egée, après une demande d'Athènes qui a trop tardé à être formulée selon les autres Etats membres. D'où l'idée d'une procédure plus contraignante que pourrait lancer la Commission.
Mais "il ne sera jamais possible pour un garde-frontière européen d'intervenir dans une opération à une frontière sans l'accord du pays concerné", a souligné à l'AFP la source européenne.
L'exécutif européen souhaite renforcer considérablement le rôle actuel de Frontex pour en faire une agence aux effectifs et aux prérogatives renforcés, a-t-elle confirmé.
"L'objectif serait d'avoir un corps européen composé de mille personnes à l'horizon 2020", et rapidement mobilisable, a dit cette source, mais "l'idée c'est de pouvoir aider plus rapidement un Etat en difficulté, pas de le priver de sa souveraineté".
Le projet de gardes-frontières européens, soutenu notamment par la France et l'Allemagne, pourrait cependant se heurter à l'opposition d'Etats membres craignant de devoir renoncer à la maîtrise de leur territoire.
Plusieurs pays d'Europe de l'Est sont "hostiles" à ce projet, a dit à l'AFP une source européenne.
C'est "une ingérence excessive dans les compétences internes des Etats", a commenté une source polonaise, craignant que le champ de compétence du nouveau corps européen aille au-delà du simple contrôle des frontières et qu'il inclut notamment des possibilités de procéder à des enquêtes et des arrestations au préjudice des autorités nationales.
11 déc 2015
Source : AFP